- Namibie : du 15 au 25 juin 2021 : Messum crater, Swakopmund, Walvis Bay
329 km réalisés du 15 au 25 juin 2021 dont 180 accrochés à un 4×4 !
76 766 km parcourus depuis le départ
Mardi 15 juin 2021 :
6h15, le réveil sonne. Je prépare un gros porridge pour que Sylvain et Anaïs prennent des forces avant leur traversée du désert. Je leur ai préparé un sac à dos chacun, avec quelques provisions, des réserves d’eau, une trousse de secours, une couverture de survie, de l’argent, leurs passeports. Ils ne prennent finalement pas la matraque masaï pour éloigner les prédateurs.
7h15, c’est l’heure du départ. Impression bizarre de les voir s’éloigner le long de cette piste alors que l’aube apparait à peine. Je reste avec mon grand garçon, qui a serré fort son papa et sa sœur avant qu’ils s’en aillent. Il est un peu inquiet. On fait des câlins. Nous avons suffisamment d’eau et de nourriture pour tenir plusieurs jours si besoin. J’ai peu d’espoir qu’un véhicule passe par ici, mais le moral est bon malgré tout.
7h45 : Je pars quand même me défouler un peu. J’ai construit un petit cairn à 250 mètres de la Tiny, pas trop loin car on a déjà notre dose d’aventure. Je multiplie les aller retours. C’est assez incroyable de courir dans cet environnement totalement désolé, alors que le jour se lève. 5 kilomètres plus tard, je rejoins mon petit bonhomme qui a commencé à rédiger son carnet de bord.
10h30 : J’imagine que Sylvain et Anaïs ont parcouru la quinzaine de kilomètres jusqu’à la civilisation. Enfin j’espère. Victor me prépare un petit café. On s’installe dehors. On sort les jumelles. Au loin, très loin, on croit observer un troupeau de zèbres. Non, c’est un mirage. Il n’y a pas beaucoup de vie ici…
Je (Sylvain) reprends le clavier de mon ordinateur alors qu’Audrey a écrit les premières lignes de ce blog… C’est bon signe, vous allez penser, ça veut dire qu’Anaïs et moi sommes revenus !! Mais avant tout, un petit rappel pour ceux qui ont raté le dernier article, nous sommes tombés en panne hier après-midi en sortant du Cratère de Messum dans la région désolée du Damaraland en Namibie. N’ayant pas réussi à me dépanner tout seul, il n’y a pas d’autre choix que d’aller chercher de l’aide… Car évidemment, il n’y a pas de réseau ici. Et de plus il n’y a pas de passage d’autres véhicules dans cet endroit si reculé. Cela fait 48 heures que nous sommes dans le cratère et à part nos amis belges, partis en sens opposé hier matin, nous n’avons vu absolument personne. Nous ne pouvons donc nous permettre d’attendre un hypothétique passage car nos réserves en eau n’excéderont pas deux ou trois jours de plus…
7h15, c’est l’heure du départ. Impression bizarre de quitter Audrey et Victor et de partir de nuit main dans la main avec Anaïs pour une sacrée aventure. Nous partons pour une traversée du désert de 15 km. Nous avons de l’eau en quantité suffisante dans nos sacs ainsi que des barres de céréales pour tenir le coup. Il fait frais ce matin mais assez vite, le Soleil se lève et nous réchauffe le dos. C’est incroyable de marcher dans un environnement aussi désolé, aussi hostile où il n’y a presqu’aucune vie végétale, humaine ou animale… Enfin, on l’espère pour l’espèce animale… car ça serait mal venu de tomber face à face avec un lion du désert affamé. Mais contrairement aux jours passés, nous ne voyons pas de traces de leurs pas. Juste celles de chacals.
Régulièrement, nous nous retournons pour voir si un 4×4 n’arrive pas, ce qui nous éviterait d’avoir à marcher jusqu’au réseau téléphonique droit devant nous au Mile 108 sur la piste de sel longeant le littoral Atlantique.
8h15, déjà 5,4 kilomètres de parcourus. L’instant partagé avec ma fille est agréable. Nous prenons des photos, nous écoutons de la musique… Nous marchons, nous marchons… Mais qu’allons-nous trouver au Mile 108 ?
9h15, petite pause après déjà plus de 10 km dans les pattes. Pas de fatigue mais juste une petite barre de céréales pour reprendre des forces. Aucun nuage de poussière à l’horizon annonçant le passage d’un véhicule. Toujours pas de lion non plus, ce qui nous arrange. Audrey avait insisté pour que je prenne ma matraque de défense achetée sur un marché aux bestiaux Masaï au Kenya. Mais en même temps, je me vois mal assommer un lion en cas d’attaque. Nous commençons à entendre les vagues de l’océan, signe que nous approchons de notre premier but de la journée. Je commence à avoir du réseau et je joins nos amis Isa et Manu au cas où ils soient près d’une grande ville pour nous envoyer un dépanneur. Mais non, ils sont dans un endroit presqu’aussi isolé que le nôtre appelé « Solitaire » (ça veut tout dire…), dans lequel ils vont eux aussi tomber d’ailleurs en panne aujourd’hui avec leur Oscar…
10h05, « merde, mon masque », demi-tour à la Tiny… Non, c’est une blague.
10h10, après 15 bons kilomètres, nous voici arrivés à Mile 108 censé être un camping et une petite station-service.
Mais en cette saison encore creuse, tout est fermé !! Nous faisons le tour du bâtiment. Personne n’est présent.
Une affichette sur la porte indique un numéro de téléphone d’urgence. Considérant la situation comme telle, je profite du maigre réseau GSM pour appeler ce numéro. Par chance, quelqu’un me répond en anglais « oh mais quelle chance tu as de pouvoir me joindre, je suis juste en train de passer sous une antenne réseau, la seule avant de nombreux autres kilomètres, je suis à 12 km, je fais demi-tour ! ». À peine 10 minutes plus tard, un gros 4×4 arrive. J’explique ma détresse à ce monsieur qui est en fait le responsable du Mile 108 embauché par la NWR qui est la société nationale qui gère les parcs nationaux de Namibie. Il nous fait monter dans son 4×4 et en un quart d’heure, nous voici déjà de retour à la Tiny à peine 3h30 après l’avoir quittée !
Audrey et Victor n’en reviennent pas de la chance que nous avons eue et de nous voir déjà revenus. Aussitôt, Albert et son collègue Olavi, accrochent la sangle de traction que j’avais déjà préparée à l’attelage de leur puissant 4×4. Et c’est parti pour le remorquage. Mais Albert roule à plus de 50km/h sur la piste en tôle ondulée, là où on ne roule d’habitude qu’à 20 ou 30 km/h. La Tiny rebondit. Puis la piste s’améliore.
La poussière entre de partout car on n’a pas eu le temps de boucher comme d’habitude les orifices par laquelle elle entre. De plus, je n’ai pas eu le temps de remettre non plus le capot d’accès au moteur depuis l’intérieur de la cabine. Le 4×4, à 5 mètres devant nous, à cette vitesse, soulève un nuage de poussière. Qu’importe, la Tiny sera (encore un peu plus) poussiéreuse mais on ne sera plus isolés en plein désert… Tellement soulagés d’avoir eu cette chance d’arriver au bon moment à Mile 108, d’avoir pu joindre Albert et qu’il accepte de nous venir en aide.
Nous rejoignons la piste principale longeant l’océan et alors que nous pensions qu’Albert marquait l’arrêt pour décrocher la sangle pour nous permettre d’aller appeler une dépanneuse, il nous demande où est-ce que nous comptons aller. Je lui réponds avoir trouvé sur mon application de partage entre voyageurs iOverlander une adresse d’un garage Mercedes à Swakopmund à 180 km de là. Il me répond, « pas de problème, je vous y emmène ! ». Incroyable, la chance continue de nous sourire. Mais 180 km en remorquage avec une sangle souple et non une barre rigide, c’est du sport pour moi, d’autant plus que mon chauffeur roule jusqu’à 75km/h… Et d’autant plus que comme le moteur ne tourne pas, je n’ai pas d’assistance au freinage ni de direction assistée. La pédale de frein est donc super dure et le volant aussi… Heureusement, la route est rectiligne. Mais je ne fais pas le malin quand-même. Déjà que 180 km en temps normal, c’est une bonne journée de conduite, mais dans ces conditions, c’est épuisant. Au départ, nous sommes sur la route de sel puis nous retrouvons l’enrobé, enfin, après 800 km de pistes ! La route est dans le prolongement de la Côte des Squelettes et de ses épaves de bateau dont celle du Zeila échouée en 2008.
A l’approche d’une ville, nous voyons de belles villas surgir du désert.
Nous arrivons sains et saufs à Swakopmund, dans la cour du garage de la belle concession M&Z Motors qui est en fait une multimarque Mercedes et Fiat. Albert est tout aussi éprouvé par la conduite de ces 180 km qui n’a pas été de tout repos pour lui non plus en raison des nombreux à-coups créés par la sangle souple. Nous le rémunérons évidement pour ce dépannage et le remercions chaleureusement. On s’en sort bien.
Aussitôt, plusieurs mécanos se mettent au travail mais ne font que les mêmes diagnostics que j’ai effectués dans le désert. Rien de plus. Les mécanos ne parviennent pas à brancher leur valise sur le calculateur de la Tiny. Ma valise également ne fonctionne pas aujourd’hui… Donc pas d’avancée pour ce soir. Je passe de longs moments au téléphone avec notre ami Joaquim en France, qui est un spécialiste Mercedes et qui connaît bien notre Tiny. Vous vous souvenez certainement mais c’est notre ange gardien Joaquim qui nous a déjà sortis de toutes nos précédentes galères mécaniques juste en nous faisant une ô combien précieuse aide par téléphone, par échange de photos et de vidéos…
Par chance (encore), l’équipe du garage nous autorise à continuer à vivre dans la Tiny dans l’enceinte du garage fermée et sécurisée pour la nuit. Ils nous laissent même les clés de la concession pour qu’on accède aux toilettes et aux douches… Le luxe… Ma chérie nous fait une bonne pizza maison pour nous réconforter.
Mais le sommeil ne vient pas.
Mercredi 16 juin 2021 :
Dès 8 heures, les mécanos sont déjà au boulot. Je leur demande de remplacer les 5 bougies de préchauffage car nous avons un doute sur un des éléments du circuit de préchauffage. En effet, avant que le moteur ne s’arrête, le voyant orange de ces bougies s’est allumé au tableau de bord. Les mécanos ne me paraissent pas super pro. L’un d’eux me dit que l’une des bougies est cassée et qu’il ne peut pas la démonter car elle tourne dans le vide. C’est certainement la cause de la panne mais si la bougie est tombée dans le moteur, elle a pu faire du mal. J’insiste auprès du mécano pour qu’il démonte cette bougie mais il insiste en me disant qu’elle est indémontable. Il s’écarte un peu du camion et je regarde de mon côté pourquoi il n’y parvient pas. Rapidement, je m’aperçois qu’il a pris une douille de 12 trop petite. A son retour, je lui suggère avec diplomatie d’essayer de dévisser la bougie récalcitrante avec une douille de 14… En 30 secondes, il sort la bougie, qui n’est pas cassée… Il remplace les 5 bougies par des neuves de rechange que j’ai dans la soute mais rien ne change.
Je perds confiance dans les mécanos. Ils tournent en rond ne me donnant pas l’impression de se donner à fond pour chercher l’origine de la panne. Ils se lancent dans le démontage des injecteurs qu’ils soupçonnent défectueux. J’aurais préféré qu’ils cherchent plus au niveau du boitier de préchauffage mais je ne veux pas non plus trop les brusquer. Difficile dans ces moments-là. Il faut faire de la diplomatie. Ce sont eux les professionnels et j’ai besoin d’eux. Et je n’ai pas la prétention de vouloir leur apprendre leur métier mais cela me paraît prématuré de vouloir démonter les injecteurs d’autant plus que le diesel arrive à chacun d’eux, certes peut-être pas comme il le faudrait mais s’ils étaient réellement défectueux, nous n’aurions pas eu une panne franche comme on a eue.
Je demande à une autre équipe de mécanos de démonter le réservoir de gasoil. Car dans la panique lors de notre panne, nous avons vidé notre bidon de gasoil de secours dans le réservoir et nous avons mal remis le bouchon que nous avons perdu. Beaucoup de poussière a été dégagée lors de notre remorquage et il y en a forcément qui est entrée dans le réservoir. De plus, nous avons des doutes sur les deux derniers pleins de gasoil que nous avons faits à Palmwag et à Sesfontein car c’étaient deux toutes petites stations. Peut-être que de l’eau ou des petites particules poussiéreuses étaient en suspension dans ce gasoil et cela a endommagé le circuit d’injection.
Le démontage des 5 injecteurs dure plusieurs heures car ils galèrent pour en enlever deux qui sont grippés. L’accès est limité et ce n’est pas facile pour eux. Une fois enfin démontés, ils les envoient pour contrôle et nettoyage chez un prestataire spécialiste en injection. Nous devrions avoir le résultat ce soir.
Nous recevons la visite de nos amis belges qui se trouvent dans la même ville que nous. Les enfants prennent plaisir une nouvelle fois à se retrouver pour jouer sur le parking de la concession alors que nous prenons un café dans la Tiny entre adultes.
Pendant l’attente des injecteurs, je profite de ce passage chez Mercedes pour faire remplacer les amortisseurs avant que je pense fatigués. Après démontage, je m’aperçois qu’ils étaient vraiment au bout de leur vie et n’avaient plus aucune efficacité. Cela devrait nous assurer plus de confort, si nous reprenons un jour la route.
17 heures, les injecteurs ne sont pas de retour et les mécanos ont terminé leur journée de travail. Deuxième nuit sur le parking de la concession.
Jeudi 17 juin 2021 :
Le résultat arrive pour les injecteurs et il n’est pas bon. Quatre d’entre eux seraient irrécupérables selon le spécialiste et à remplacer. Aïe… Outre le prix important pour ce remplacement, il n’y a pas de stock en Namibie mais heureusement, il y en a en Afrique du Sud. Nous passons commande et nous devrions recevoir lundi prochain 5 nouvelles têtes d’injecteur… L’attente va être longue d’autant plus que je suis persuadé que ce n’est pas l’origine de la panne. Mais bon, ça ne fera tout de même pas de mal de les remplacer. Nous en avions déjà remplacé un avant de partir ce qui explique effectivement pourquoi simplement 4 sont défectueux. La Tiny arrive à 200 000 km au compteur dont la moitié parcourue hors d’Europe avec un gasoil de piètre qualité dans certains pays qui a tendance à encrasser le système d’injection. Je tente de privilégier dans la mesure du possible les pleins de gasoil dans des grosses stations et d’ajouter à chaque plein de l’additif Chameau Plus mais peut-être que ça ne suffit pas.
Le personnel de la concession est très gentil avec nous. L’un d’eux vient nous proposer de nous prêter sa voiture de service pour qu’on aille se promener la journée. Nous profitons de l’occasion pour aller dans Swakopmund pour y faire quelques courses. Mais le temps est froid et humide. Et mon moral est plus que moyen. Nous emmenons enfin Victor chez le coiffeur qui pour 4€ lui raccourcit ses cheveux de plus de 10 cm et lui fait une jolie coupe de grand garçon. Cette ancienne ville coloniale allemande semble agréable mais mérite un rayon de Soleil pour mieux en profiter.
Nous passons aussi boire un coup avec nos amis belges qui séjournent dans le centre-ville.
Retour à la Tiny où nous nous régalons d’une raclette avec ce qu’on a pu trouver comme fromage au supermarché.
Vendredi 18 juin 2021 :
Ce matin était très attendue pour notre grande fille qui est dans un tel état d’excitation depuis qu’elle a réservé avec ses propres sous une activité pour elle seule ! Elle part faire toute la matinée du Sand board avec une agence qui passe la récupérer à 9h30 chez Mercedes. Elle a tout géré toute seule comme une grande.
Et qui retrouve-t-elle dans le minibus qui fait le tour de la ville pour récupérer les différents clients ? Et bien nos amis les Belges qui ont eu la même idée de réserver par la même agence, la même activité, le même jour… Décidément, le hasard nous suit depuis plusieurs jours avec cette sympathique famille qu’on avait rencontrée à Etosha. On se retrouve tous les deux ou trois jours alors qu’on n’était pas censés être au même endroit !
Je laisse à présent le clavier à Anaïs qui est revenue en début d’après-midi :
« Il me semble qu’hier soir, j’ai répété une dizaine de fois que j’avais trop hâte d’être ce matin. Je vous laisse donc imaginer que dès mon réveil, j’étais carrément ultra contente. Beth, une Américaine super sympa qui est venue s’installer à Swakopmund il y a 26 ans et qui a fondé l’agence à peu près en même temps, est venue me chercher, et on a pris la route vers les dunes, qui sont situées à moins de dix kilomètres de la ville. Dans le minibus, il n’y avait que les Belges (Peter, An, Eleonoor, Robbert), Beth et moi. Au pied des dunes, on a fait la connaissance de Steven, qui allait être notre photographe, et d’un autre namibien qui fait aussi partie de l’agence mais dont je ne me souviens plus du nom et qui est surtout resté avec les Belges qui ont pris l’option allongée. J’ai chaussé mes bottes de sandboardeuse (j’avais plus l’impression d’être une astronaute), j’ai choisi ma planche, puis on a commencé à grimper la dune.
Comme le sable était encore légèrement humide, c’était relativement facile. Ça s’est compliqué au fur et à mesure de la matinée quand le sable a séché et est devenu plus mou. D’en haut des dunes, la vue était jolie. D’un côté, le sable élégamment rassemblé en collines aux crêtes acérées s’étendait à perte de vue, et de l’autre, on voyait la ville, au-dessus de laquelle flottait un nuage de brouillard. On apercevait aussi l’océan.
J’ai écouté les conseils que Beth donnait aux Belges pour pouvoir plus tard moi aussi essayer la sorte de luge, puis je suis retournée du côté de la dune réservée aux stand-up sandboards. Beth m’a rejointe, et elle m’a expliqué comment cirer ma planche pour faciliter la glisse, puis comment y attacher mes bottes, et enfin comment me lever une fois que mes pieds sont attachés. Après ça, j’ai appris théoriquement à démarrer, accélérer, ralentir, dévier légèrement ma trajectoire et m’arrêter, avant de mettre tout ça en pratique. Lors de la première descente, qui n’était pas très très brillante avant même de tomber, j’ai fait ce que Beth et Steven ont appelé double back flip, mais qui était selon moi bien moins gracieux. Après ça, j’avais du sable partout, dans mes cheveux, dans mes bottes, dans mes oreilles, dans mon casque, dans mon tee-shirt, sur mon visage, bref partout, mais je ne m’étais pas fait mal, et pour une raison plus ou moins connue, je souriais toujours.
Comme je n’allais pas m’arrêter là, j’ai fini ma descente un peu plus doucement, je suis remontée, et après une petite pause je suis redescendue. Au troisième essai, j’avais compris la technique, et même si je continuais à m’arrêter quelques fois sur la descente, j’étais plutôt contente de moi.
Je suis allée essayer la sorte de luge. En fait, c’est une planche d’aggloméré simple, juste un peu souple et cirée d’un côté, sur laquelle on s’allonge avec la tête orientée vers le bas de la dune. On soulève l’avant de la planche pour ne pas manger du sable, et c’est parti. C’est bien moins technique que le stand-up, il faut juste planter les pieds dans le sable de temps en temps pour rectifier la trajectoire ou pour ralentir, mais la sensation reste vraiment cool, voir le sable défiler sous nos yeux à cette vitesse c’est juste trop bien. J’ai fait trois descentes, et à la fin de la dernière, après deux bosses qui ont failli me faire décoller de la dune, j’allais à 62 km/h ! et Robbert a presque atteint les 80 km/h ! Pour la dernière descente jusqu’aux vans, j’ai repris ma planche de stand-up, et j’ai réussi à parcourir plus de la moitié de la dune sans m’arrêter, c’était énormément trop génialissime.
En tout, j’ai descendu 4 fois la même dune avec le stand-up board, j’ai fait trois descentes avec la sorte de luge, je suis revenue aux vans avec je-ne-sais-combien de kilos de sable collé à ma peau et coincé dans mes vêtements et mes cheveux, et plus que tout, j’ai passé 3 heures à kiffer à 200%. Aux vans, on a déjeuné (des sandwichs qu’on se préparait nous-mêmes avec les ingrédients mis à disposition), puis on a pris la route du retour. Quand elle m’a déposée au garage, Beth m’a proposé de revenir gratuitement lors de la prochaine séance ! »
Merci Anaïs pour ce petit mot et va vite prendre une douche, tu es en train de mettre du sable partout dans la Tiny !
L’après-midi, Audrey et les enfants partent se promener en ville. Nous avons de la chance que le vieux centre ne soit qu’à 3,5 km, donc accessible à pied. Ils y découvrent de jolis bâtiments coloniaux, quelques boutiques d’artisanat, des brocanteurs. Ils traînent avec bonheur dans une grande librairie. Ils vont marcher sur le front de mer, respirant à plein poumons les embruns marins, courant sur le sable, avant de passer un nouveau moment avec les Belges.
De mon côté, je n’ai pas trop la pêche et je préfère rester au camion où je regarde un documentaire animalier sur les lions du désert de Namibie et où je prépare des gnocchis maison pour mes amours ce soir.
Les mécanos n’ont rien fait aujourd’hui car ils préfèrent attendre les nouveaux injecteurs avant de chercher autre chose. Ils devraient arriver lundi mais un mécano vient de me dire lundi ou mardi… Le temps est un peu long, d’autant plus que le week-end arrive et qu’il n’y aura aucune activité sur la concession durant les deux prochains jours.
Mauvaise nouvelle dans la soirée car nous recevons un message d’alerte du Ministère des affaires étrangères français comme quoi à partir de demain, les vols au départ de la Namibie vers la France via l’Allemagne sont désormais interdits en raison de la recrudescence des cas de Covid-19 ici… Or, c’est précisément le vol retour qu’a réservé notre famille pour leur voyage en Namibie le mois prochain. Décidément, ce n’est pas une bonne semaine pour nous. On espère qu’ils puissent changer leur vol.
Samedi 19 juin 2021 :
Ce matin, il n’y a pas le bruit des ouvriers qui embauchent pour nous réveiller. Quoique deux arrivent quand-même pour remonter une boite de vitesse sur un poids-lourds. Ils peinent un peu à la descendre du 4×4. Aussi, je leur file un coup de main pour manipuler et déplacer le gros palan pour mettre en place la boîte de vitesses en place.
Le mécano me dit que c’est certain qu’ils auront les têtes d’injecteurs demain. Ouf.
Comme les autres matins, il fait bien froid et il y a un épais brouillard bien chargé en humidité. Il faut souvent attendre la fin de matinée pour qu’il se lève. Comme tous les jours, les enfants travaillent sérieusement pour l’école. En fin de matinée, nous recevons la visite des Belges pour la dernière fois. Car eux filent vers le sud du continent pour rendre leur voiture de location en Afrique du Sud dans quelques semaines. Les enfants sont bien tristes car ils ont partagé avec eux de bons moments. Mais le monde est petit et la Belgique n’est pas si loin de la France, donc nous prendrons du plaisir à nous revoir sur notre vieux continent.
Anaïs part marcher avec sa maman dans les dunes voisines. Je vous disais qu’il y a pire comme lieu pour être immobilisés. Certes, on préférerait ne pas bivouaquer entre 4 murs de béton, éclairés pas un puissant halogène toute la nuit. Mais bon, on a quand-même ce luxe de pouvoir continuer à vivre dans notre Tiny et de ne pas avoir à payer un hôtel pendant ce temps, ce qui nous permet aussi de pouvoir suivre les réparations. A 500 mètres, il y a donc un immense bac à sable. Depuis quelques temps, Anaïs lit beaucoup de manuels de photographie. Elle demande à sa maman de se prêter au jeu et de lui servir de modèle, pour mettre en application ses lectures. Joli moment de complicité.
Victor sculpte un joli éléphant que je n’ai pas le droit de voir avant demain…
Soirée croque-monsieur et film au chaud dans la Tiny.
Je désespère de trouver une solution. J’envisage déjà le pire et un remorquage jusqu’au port voisin (30 km) de Walvis Bay pour embarquer sur un bateau en direction du Havre… Et je pense à la famille qui doit nous rejoindre dans trois semaines tout juste… Moral moyen ce soir.
Dimanche 20 juin 2021 :
Les enfants m’offrent de magnifiques cadeaux pour la fête des papas. Une nouvelle fois, comme je les adore, des cadeaux faits de leurs propres mains et imagination. Anaïs m’a tissé un très joli porte-clés et Victor m’a sculpté un superbe éléphant. Merci mes tendres amours.
Anaïs est toute heureuse de refaire une nouvelle séance de sand-board, d’autant plus que celle-ci est généreusement offerte par la souriante et dynamique gérante de l’entreprise Alter Action.
Pendant ce temps, Audrey, Victor et moi, nous partons au bac à sable voisin.
Nous visitons le petit Musée Martin Luther présentant une unique pièce mais assez étonnante. Il s’agit d’un tracteur à vapeur importé en 1896 depuis l’Allemagne pour remplacer les chariots à bœufs qui servaient au transport des marchandises entre Swakopmund et l’intérieur des terres. Débarquée au port de Walvis Bay à une trentaine de kilomètres, il fallu 3 mois pour manœuvrer le tracteur à travers les dunes de sable jusqu’à Swakopmund. Trois remorques ont été construites et utilisées pour le fret. Elles étaient attelées derrière cet énorme tracteur. Mais son inauguration fut retardée par le déclenchement de la guerre opposant les Héréros et les Namas et l’ingénieur allemand en charge du projet rentra dans son pays sans avoir révélé le secret de son fonctionnement. Un Américain réussit à faire fonctionner la machine mais elle ne fit que deux ou trois trajets car elle était trop consommatrice d’eau, une denrée rare en Namibie. Elle s’immobilisa définitivement.
Retour au garage. Pour me défouler, je m’engage dans une journée lessive. Nous profitons qu’il n’y ait personne chez Mercedes aujourd’hui pour abuser un peu de l’eau, de l’électricité et pour pouvoir accrocher le linge dans la cour. De plus, il y a dès ce matin un grand soleil et de nouveau environ 30°C. Tout y passe : les gros vêtements (polaires, pulls), les housses de tous nos coussins, housses de couette… Bref, tout ce qui demande beaucoup d’eau au rinçage et beaucoup de cycles de machines car un pull = une machine…
Anaïs revient avec un peu moins de sable qu’avant-hier dans les trous de nez et d’oreilles. Elle est tout aussi ravie et tout autant fatiguée.
Je ne suis toujours pas défoulé donc je lave avec Audrey la Tiny qui en a bien besoin après tous ces kilomètres de pistes. Elle est dégoûtante et les tâches de gasoil projetées sur le bardage quand on s’est fait remorquer sans le bouchon n’ont rien arrangé. Bon, si on a la chance de repartir, elle ne restera pas propre longtemps mais à défaut d’avoir un véhicule qui roule, ça fait au moins du bien d’avoir une maison propre.
Je bricole aussi sur différents petits problèmes électriques. Une nouvelle ampoule pour le clignotant avant. Un nouveau relais pour les feux de stop. Je tire un nouveau fil entre les deux feux de position à l’arrière du véhicule pour alimenter celui de droite qui ne l’était plus. Je remets un klaxon suite aux deux autres que j’ai perdus sur la piste. Quelques soudures à l’étain me permettent de le remettre en état. J’en avais un en stock depuis l’Iran dans ma soute. Tout fonctionne parfaitement. Le top. Pendant ce temps, Audrey frotte les murs en lambris pour nettoyer les petites tâches noires laissées par les punaises de lit.
Je suis défoulé, je prends une bière… Audrey est défoulée aussi, elle prend une bière aussi. Les nombreux messages Facebook, WhatsApp, Messenger ou mail qu’on reçoit de notre famille, d’amis ou d’inconnus nous réchauffent le cœur… La disponibilité sans faille de Joaquim nous rassure car on sait qu’il va faire son possible pour que notre cavale continue.
Lundi 21 juin 2021 :
J’ai (encore) très mal dormi cette nuit. Aussi, je m’endors tôt le matin et quand j’ouvre les yeux à 8h30, les mécanos sont déjà au boulot. Ils commencent à remonter les injecteurs. Je doute toujours de l’efficacité de cette opération mécanique longue et onéreuse. Mais bon. Au bout de deux heures, après avoir purgé chaque injecteur, c’est le moment du verdict et de tourner la clé de contact. Comme je le présentais, rien ne change et le moteur ne démarre pas. C’est la grosse déconvenue pour les mécanos.
Je leur montre alors que notre fidèle Joaquim, avec qui j’ai passé très longtemps par WhatsApp à effectuer des contrôles, a diagnostiqué que l’électrovanne de la pompe à injection n’est pas alimentée électriquement. Il devrait y avoir du 12 volts dessus quand on met le contact car c’est un petit clapet qui s’ouvre et qui laisse passer le gasoil pour permettre le démarrage du moteur et qui se ferme quand on coupe le moteur. Le gasoil ne peut donc pas passer. Ils me regardent avec des grands yeux en me demandant comment on a trouvé la panne…
Ils se mettent aussitôt à chercher l’origine de cette panne et ils ont la bonne idée de remonter tout le long du faisceau électrique pour voir si un fil n’est pas endommagé. Et en à peine une petite heure, ils trouvent non pas un mais deux fils sectionnés sous le châssis, certainement par la projection d’une pierre sur la piste.
Deux fils donc qui correspondent certainement à l’origine des deux pannes qui n’avaient pas grand-chose à voir entre elles : l’arrivée de gasoil et le problème de préchauffage. Ils réparent ces deux fils et le moment du verdict arrive. Je tourne la clé pour mettre le contact et… déjà le voyant de préchauffage s’éteint normalement au bout de quelques secondes (ce qui est déjà en soi très rassurant) et… le moteur démarre aussitôt ! Nous sommes réparés !!
Encore une fois, grâce à notre ange gardien Joaquim, toujours présent pour nous sauver des pires angoisses et des pires situations auxquelles nous avons été confrontées en Grèce, en Turquie, au Tadjikistan, en Russie et en Mongolie… Sans Joaquim, il est certain que notre voyage n’aurait pas pu se poursuivre. On aurait démonté la cabane du châssis, on aurait jeté le camion et nous nous serions certainement installés pour de bon, quelque part vers Thessalonique, vers Aksaray, sur la Pamir Highway, dans l’Altaï russe ou bien dans les steppes mongoles… Nous ne savons pas comment te remercier Joaquim pour ta présence, ton aide et ta solide expérience ! Merci, MERCI !
Bon, le moteur démarre mais il y a des fuites à deux injecteurs qu’il faut redémonter pour remplacer le joint d’étanchéité en cuivre. Nous partons avec un mécano faire un test sur la route pendant une quinzaine de kilomètres et la Tiny fonctionne à merveille.
Bon maintenant, il n’y a plus « cashier »… ou passer à la caisse. Notre portefeuille est allégé de beaucoup trop de centaines d’euros mais la Tiny reprend sa cavale avec des bougies de préchauffage neuves, des têtes d’injecteurs neuves (qui finalement n’étaient pas mortes mais bon, ça n’aura pas fait de mal), un réservoir de gasoil parfaitement propre et deux amortisseurs avant neufs… Ce genre de mésaventure fait partie de l’aventure inévitablement, avec un véhicule qui a 25 ans…
Le patron de la concession n’avait pas prévu qu’on reparte dès aujourd’hui et nous propose de repasser demain matin pour nous donner du poisson qu’il a pêché ce week-end !
Nous partons nous promener dans le centre-ville de Swakopmund, cette agréable ville d’environ 42 000 habitants. C’est la quatrième ville du pays après la capitale Windhoek, Walvis Bay et Ondangwa. Les bâtiments de l’époque coloniale sont vraiment jolis, peints de tons pastels. Les larges rues sont propres. Le tri sélectif des déchets est bien organisé. Il y a des distributeurs pour ramasser les déjections de chiens. Beaucoup de Blancs dans les rues qui se promènent. Un air de ville à l’européenne. Les enfants passent encore du temps dans une librairie et nous passons du temps dans un pub à boire une petite bière pression allemande.
Joli bivouac ce soir sur le front de mer bien aménagé. Danièle, une charmante dame namibienne vient discuter avec moi et l’échange est agréable avec cette femme rayonnante.
Mardi 22 août 2021 :
Danièle repasse me dire bonjour pendant qu’Audrey est partie faire une course à pied. Ce matin, pas de vent, pas de lion, pas de forte chaleur… Elle revient, fière d’elle, après avoir parcouru son premier 10 km sur le sol africain !!
Danièle s’en va et revient quelques instants plus tard en nous offrant 3 baguettes fraîches aussi bonnes que dans une boulangerie française ! Quel bonheur !
Puis nous retournons au garage Mercedes pour récupérer le poisson que le patron nous a promis pour ce matin. Il nous offre un sac bien rempli de cabillauds et de maquereaux qu’il a pêchés ce week-end avec son kayak de mer. Quelle gentille attention !
Puis il nous faut faire un peu d’intendance. Plein de gaz tout d’abord qu’on réalise avec une grande facilité. Je démonte la bouteille vide et par chance, j’ai le bon embout adaptateur pour que l’usine de remplissage s’y connecte. Ce sont les mêmes qu’en Amérique du Sud. En 10 minutes, c’est plié. Tellement simple pour une fois que je pense qu’on y reviendra dans un mois et demi quand on retournera dans cette ville avec notre famille.
Plein de courses au gros supermarché Spar où Audrey trouve même du camembert pour accompagner la baguette de Danièle ! Ainsi qu’une Apple strudel, cette spécialité autrichienne.
Ces petits tours de la ville suffisent à nous rassurer quant au parfait fonctionnement de la Tiny.
Bon, voilà une matinée bien remplie et efficace qu’on complète par un plein de gasoil dans une bonne station Shell en prévision de la longue piste des prochains jours… Ah oui, car on repart se perdre de nouveau dans des endroits isolés, où il n’y a pas de réseau GSM et où personne n’habite…
Nous roulons vers Walvis Bay, la deuxième ville du pays, à une trentaine de kilomètres au sud toujours sur le littoral de l’Atlantique. C’est impressionnant comme on passe soudainement de la ville de Swakop’ et de ses larges avenues au désert. Pas de banlieue et d’interminables zones industrielles ou commerciales. Aussitôt, ce sont de très jolies et hautes dunes de sable vierges de traces de pas ou de roues car elles sont protégées par le Parc national de Dorob. Elles plongent dans l’océan. Seule la route littorale coupe ce long ruban de sable.
Au large, mais pas très loin du rivage, nous voyons de nombreuses plateformes pétrolières.
A l’approche de Walvis Bay, nous voyons une alternance de lotissements aux maisons entassées, de belles villas, puis de townships qui sont des quartiers plus populaires sans être pour autant des bidonvilles.
Nous allons directement sur un point de bivouac repéré à une quinzaine de kilomètres au sud de la ville sur la lagune perdue au milieu des marais salants. Ces derniers sont exploités sur 3500 hectares de manière industrielle à grande échelle. 80 à 90% de la consommation sud-africaine vient d’ici. La couleur rose que prennent les bassins est magnifique. Les flamants roses et les flamants nains occupent les lieux. Walvis Bay abrite la plus importante colonie de flamants roses de toute l’Afrique australe.
Nous empruntons une superbe route de sel qui traverse la lagune. Joli bivouac au bout de la piste juste avant que la piste ne se transforme en passages trop sablonneux pour nous.
Après-midi blog, préparation de la suite de l’itinéraire, jeux sur la plage et dans la Tiny. Puis, à l’heure où le Soleil disparait à l’horizon, nous approchons du rivage. « On a vu au loin des baleines et on a couru avec des otaries : elles nageaient à dix mètres de la plage, et nous, on courait sur le sable. On a fait ça pendant plusieurs centaines de mètres ! Puis, on a joué à 1, 2, 3 soleil avec un chacal ! On marchait et dès qu’il nous regardait, on s’arrêtait : c’était trop cool ! » Victor a visiblement adoré ce moment !
Soirée fondue… Bon, ce n’est pas du vacherin et du gruyère comme chez nos amis suisses mais du cheddar…
Nuit paisible bercée par le roulis des vagues. Personne ne vient nous importuner. Le camping sauvage est soi-disant interdit en Namibie mais nous n’avons jamais eu de soucis jusqu’à présent. Le chacal rodant autour de la Tiny n’est pas peureux et est plutôt en quête de nourriture.
Mercredi 23 juin 2021 :
Le courant froid de Benguela qui remonte le long des côtes depuis l’Atlantique Sud maintient un anticyclone qui se traduit par des conditions désertiques à l’intérieur des terres et toujours ce brouillard sur la côte. Il ne se lève pas de la matinée.
Nous levons le camp et nous partons en direction de la Dune 7 à la sortie de Walvis Bay, dernière étape sur le littoral avant de partir faire notre boucle dans le grand sud avant l’arrivée de la famille. Mais au moment de démarrer, comme hier matin où j’avais déjà eu un petit doute, le moteur démarre bien mais pas bien comme j’aime. Il y a un léger raté au démarrage. Très court, juste une seconde, mais je soupçonne une bulle d’air mal purgée dans le circuit de gasoil. Joaquim confirme ma crainte. On ne risque pas la panne selon lui mais ce n’est pas normal et avant de nous engager de nouveau dans une région très isolée les prochains jours, je préfère retourner chez Mercedes à Swakopmund, qui n’est qu’à une trentaine de kilomètres.
Et de nouveau, le fusible qui commande les feux de stop et l’alimentation du compteur, des voyants, des compte-tours claque dès que je sollicite la pédale de frein. Je soupçonne la platine de porte-fusibles défectueuse. En ayant une de secours, je la remplace mais cela ne change rien au problème.
Puis alors que le moral est déjà moyen, une très mauvaise nouvelle au même moment nous arrive. Nous apprenons que la Namibie vient d’être classée en pays rouge (déplacement interdit depuis la France) suite au Conseil des Ministres de ce jour à Paris. Mais comment va faire notre famille pour nous rejoindre ? C’est vraiment une semaine de merde.
Nous arrivons chez Mercedes. Rapidement, ils purgent de nouveau chaque injecteur. Mais il nous faut dormir sur place pour voir comment réagira demain matin le camion à froid. Je parle du problème électrique aux mécanos mais je ne les sens vraiment pas aptes à régler ce soucis. Dès que la concession ferme, avec Audrey, nous nous couchons sous le camion pour voir si d’autres fils ne sont pas endommagés. Et eurêka, nous trouvons un fil alimentant justement les stops qui est légèrement dénudé à un endroit où il pourrait toucher par intermittence le châssis. Nous réparons et scotchons le faisceau. Nous faisons un test et le fusible de feux de stops ne crame plus. Cool.
Les enfants, tout mignons, s’occupent tranquillement dans le camion. Bon, le moral est dans les chaussettes ce soir. Nous appelons la famille qui, comme nous, cherche une solution pour pouvoir quand-même venir en Namibie, mais le voyage semble de plus en plus compromis. Nous sommes dépités mais nous ne voulons pas encore renoncer et allons tout faire pour trouver une solution.
Encore un bivouac entre 4 murs de béton… Le dernier ?
Jeudi 24 juin 2021 :
Manuel, le mécano, à peine embauché, vient tester le démarrage du camion. La Tiny démarre au quart de tour. Ouf, la purge d’hier a dû suffire. Nous quittons la concession et à la première sollicitation de la pédale de freins, le fusible claque… Grrrr… Mais également celui qui commande les feux de position. Il y a donc réellement un problème quelque part sur le faisceau mais encore une fois, je ne sens pas les mécanos à la hauteur pour faire cette difficile recherche de panne électrique. Nous retournons sur note bivouac sur le front de mer. Mais arrivés sur place, ce sont maintenant les essuie-glaces qui fonctionnent bizarrement. Je ne suis pas tranquille et je me mets en quête d’un électricien auto. Rapidement, par l’appli iOverlander, j’en trouve un à 3 km dont les commentaires laissés par de précédents voyageurs sont bons.
Nous y arrivons et rapidement, un électricien contrôle le châssis et trouve que le faisceau à l’arrière du véhicule est à la masse par cinq fils. Consciencieusement, durant plus de 5 heures, il isole et protège le faisceau, et refait de très sérieuses connexions électriques. Soudure à l’étain des fils endommagés, gaines thermo, scotch, gaine annelée fendue protégée à nouveau par du scotch, colliers rilsans…
Les tests sont concluants. Curieusement, il n’y a plus de problème au niveau des essuie-glaces. Je ne regrette pas ce passage chez ce spécialiste, de plus bien raisonnable en prix. Bon, il va falloir qu’on se calme un peu sur les réparations car on vient de dépenser en 8 jours le budget d’un mois total de voyage…
Nous rejoignons de nouveau notre bivouac au pied du phare en front de mer. Nous laissons les enfants dans la Tiny et jouer sur la plage et nous partons marcher dans cette ville balnéaire bien agréable de Swakopmund. Nous faisons une petite pause dans un pub allemand. Toujours pas de baignade car l’eau est à peine à 14°C, ce qui nous change des 30° passés qu’on avait il y trois mois dans l’Océan Indien.
Et puis, le moment tant redouté arrive, celui du coup de fil avec ma sœur et mon beau-frère avec qui nous décidons d’annuler leur voyage prévu dans 15 jours. Je ne vous cache pas notre peine. Les sanglots ne sont pas loin. Suite au classement de la Namibie hier en rouge, il leur est interdit de sortir de France. Ce n’est pas faute d’avoir cherché des heures une parade mais il n’y en a pas. Ou bien, elles nous paraissent risquées. Mon beau-frère et moi avons multiplié les appels auprès des compagnies aériennes, des ambassades. Nous avons fait beaucoup de recherches pour éventuellement transiter par un autre pays européen. Mais les Allemands, les Anglais, les Italiens n’acceptent pas non plus soit les allers soit les retours vers ou depuis la Namibie.
Décidément, c’est le troisième rendez-vous manqué depuis le début de cette pandémie en mars 2019. Notre neveu Mattéo avait lui aussi réservé ses billets d’avion pour nous rejoindre un mois au Népal en avril 2019. Notre nièce Émilie et son chéri Boris avaient eux-aussi réservé leurs billets d’avion pour nous rejoindre sur l’île de la Réunion en juillet 2019 pendant que la Tiny aurait traversé l’Océan Indien entre l’Inde et l’Afrique du Sud. Trois voyages annulés à la dernière minute à cause du Covid-19.
A chaque fois, il y a tant d’excitation et d’attente de voir des personnes qu’on aime nous rejoindre. C’est aussi tant de journées passées à préparer leur itinéraire. Encore une fois, on avait passé plusieurs dizaines d’heures à tout préparer pour qu’ils passent un moment inoubliable en Namibie. On avait préparé jour par jour l’itinéraire, on avait repéré et réservé certains hôtels et campsites, se projetant dans ces futurs moments de complicité partagée… Mais ça, ce n’est que du temps de perdu et ce n’est pas grave. Le plus terrible, c’est d’accepter avec chagrin, qu’on ne verra pas mon papa, ma marraine, ma sœur et mon beau-frère dans quelques jours. Heureusement, nous avons déjà eu l’occasion de les recevoir durant notre cavale et jamais nous n’oublierons ces moments partagés en Autriche, au Laos, en Ouzbékistan, en Grèce, au Maroc mais on aurait tant aimé ajouter la Namibie à cette liste.
C’est aussi de la colère et de l’incompréhension vis-à-vis de ces classements de pays par code de couleur. Alors oui, la situation sanitaire n’est pas bonne en Namibie depuis deux ou trois semaines et le début d’une troisième vague se profile. Mais le pays ne comptabilise « que » 1300 morts cumulés depuis le début de la pandémie, soit un chiffre atteint parfois sur une à deux journées en France au plus fort de la pandémie. Et puis, franchement, quels risques courent-ils à venir en Namibie alors qu’ils sont tous vaccinés depuis plus de 15 jours, qu’ils auraient fait un test PCR avant de partir et avant de revenir et qu’ils étaient prêts à respecter un auto-isolement de 7 jours en rentrant… Comment accepter cette décision à l’heure où en France le masque tombe, à l’heure où les discothèques rouvrent, à l’heure où les Européens peuvent de nouveau voyager même sans fournir de test PCR, et à l’heure où la vie reprend enfin un cours normal… Ce serait différent si c’était la Namibie qui fermait ses frontières pour se protéger, pour ne pas saturer son précaire système de santé. Mais on pense qu’ils ne le font pas car leur économie est au plus mal. Et ils ont au contraire besoin des étrangers. Le secteur touristique est déjà à un niveau catastrophique ici et cela ne va rien arranger si les pays européens interdisent à leurs ressortissants de venir ici, alors que nous sommes les principaux touristes après les sud-Africains.
Décidément, ce n’est vraiment pas une bonne semaine pour nous. Mais c’est ainsi, avec une grosse boule dans le ventre, il faut accepter la situation et rebondir pour reprendre de l’entrain pour les prochaines semaines. Il faut consoler les enfants eux-aussi extrêmement peinés. Il nous faut aussi revoir tout notre itinéraire pour les 6 semaines nous restant en Namibie mais ça, c’est un détail. Nous allions juste partir pour faire une grande boucle dans le sud du pays en attendant la famille. Ben du coup, on va repartir vers un peu plus au nord…
Vendredi 25 juin 2021 :
Les yeux encore endormis, le Soleil à peine levé, je m’empresse de démarrer la Tiny pour voir comment elle réagir. Et là, enfin une bonne nouvelle, elle démarre parfaitement. On peut s’estimer réparés !
L’épais brouillard ne se lève pas avant le début d’après-midi, laissant place à un magnifique ciel bleu. Nous partons pour la première fois tous les 4 ensemble nous promener dans Swakopmund, cette ville où les bâtiments sont marqués par le passé colonial. On apprécie beaucoup ces belles maisons à colombages allemandes, peintes de tons pastels et marquées de leur année de construction, souvent du tout début du 20ème siècle, mais les Allemands s’étaient installés ici en 1892. Les premiers colons s’installèrent même dans des maisons préfabriquées et importées d’Allemagne. On oublierait presque qu’on est en Afrique tellement le contraste est saisissant avec tous les petits villages de cases situés à seulement quelques centaines de kilomètres au nord. On s’imaginerait plutôt dans une des belles stations balnéaires de la Mer du Nord ou de la Mer Baltique. Bon, il y a quand même des palmiers et des dunes pas très loin.
Puis Audrey et Victor partent marcher sur le front de mer.
Bon voilà, ainsi s’achève cette semaine à Swakopmund. Une semaine triste passée en grande partie dans des cours de garages. Une semaine où notre portefeuille s’est bien allégé. Une semaine où on doit accepter et se résigner à ne pas voir notre famille dans si peu de temps… Mais aussi une semaine où on a cependant pris plaisir à déambuler dans cette jolie ville, à crapahuter dans les dunes, à boire des bières allemandes, à faire de belles rencontres, à se promener sur le front de mer, à dormir aussi sur de jolis bivouacs…
Dès demain, notre cavale reprend avec une Tiny réparée, révisée vers de nouvelles aventures… Et puis, nous allons dans quelques jours fêter notre 1000ème jour de voyage !!