323 km parcourus du 26 août au 2 septembre 2021

81 895 km parcourus depuis le départ

Jeudi 26 août 2021 :

Nous nous réveillons ce matin au milieu des vignes de Clanwilliam. Il va falloir qu’on y goûte à ce vin si réputé d’Afrique du Sud. Faîtes-nous confiance, nous avons déjà des adresses de caves pour les prochains jours !

Après la traditionnelle et studieuse matinée scolaire, et après quelques courses au Superspar, nous avons rendez-vous avec des voyageurs que nous avions rencontrés par hasard dans un camping à notre arrivée en Afrique au Kenya. Eux aussi venaient juste de récupérer leur camion au port quelques jours plus tôt à Mombasa. Mais nous n’avions pas eu l’occasion de nous retrouver depuis.

Hannari est d’origine sud-africaine et Erwan est Français. C’est dans la maison de famille dans la ferme des parents d’Hannari que nous nous retrouvons. Ils habitent à une demi-heure de piste de la ville de Clanwilliam dans la montagne. Les paysages pour y venir sont magnifiques. Nous faisons connaissance avec les parents d’Hannari et son frère qui s’occupent de cette grande ferme de 400 hectares où ils cultivent des pommes de terre, des orangers, des amandiers, des plans de Rooibos et où ils élèvent des moutons. Erwan nous emmène en 4×4 visiter l’exploitation et un joli petit coin au bord d’un ruisseau où on pensait ouvrir une bouteille pour l’apéro mais il fait trop froid.

Nous nous intéressons particulièrement au Rooibos, considéré comme une boisson nationale en Afrique du Sud. Le Rooibos bush est une plante, plus précisément un arbuste qui ne pousse qu’en Afrique du Sud dans la région du Cederberg, à 200 km au nord de la ville du Cap. Le Rooibos est consommé depuis plus de 300 ans par la population locale mais son essor mondial se fait dans les années 90. Cette boisson saine, riche en antioxydants, aux multiples vertus, surnommée en France « thé rouge » par abus de langage, du fait de sa couleur caractéristique lorsqu’il est infusé, est toutefois totalement distinct du théier. A la différence du thé, le Rooibos est quasiment dépourvu de tanin et dénué de théine. L’aspect de la plante rappelle celui d’un buisson d’environ 1,5 mètre de haut. Pas de feuille comme pour le thé mais une ramification d’une multitude de fines branches, recouvertes de longues aiguilles. La densité des pieds sur la parcelle agricole n’a rien à voir avec celle de théiers qu’on a pu voir au Kenya ou bien en Asie (Chine, Laos, Vietnam).

Il existe deux variétés de Rooibos : le rouge et le vert. Les parents d’Hannari cultivent le rouge dans un sol sablonneux. Cette plante ne pousse pas en dessous de 450 mètres d’altitude et jusqu’à une altitude d’environ 900 mètres. Les plants sont coupés à la faucille à environ 30 cm du sol les trois premiers mois de l’année, qui correspondent à la saison estivale. Feuilles et tiges sont hachées, broyées par des rouleaux mécaniques afin de libérer les enzymes responsables de la future oxydation. Le Rooibos est ensuite disposé en petits tas sur de grandes plateformes en béton dans une cour extérieure puis humidifié : la réaction d’oxydation débute alors et donne à la plante son goût et sa couleur brun rougeâtre caractéristique. On étale ensuite les feuilles sur le sol pour les laisser sécher au soleil. Elles sont finalement passées au tamis, afin de retirer la terre et les morceaux de tige, puis étuvées à la vapeur. Bon, et bien on se couchera moins bête ce soir.

Nous passons un très agréable moment avec Hannari et Erwan, autour d’un agréable et indispensable feu de cheminée, pour réchauffer la maison. Ici, les maisons sont dépourvues de chauffage central et ne sont pas isolées, car les périodes de froid comme en ce moment sont rares.

Le temps est exécrable ce soir. Bourrasques de vents, températures glaciales, pluie… Il y a des mois et des mois qu’on n’avait pas eu un climat hivernal comme ça. Il faut remonter à plus de 9 mois en Albanie… autant vous dire qu’on apprécie de pouvoir raccorder la Tiny à l’électricité de la maison pour pouvoir brancher notre radiateur électrique pour la nuit. Car oui, notre chauffage au gaz est toujours en panne et n’est pas réparable. Et nous n’avons pas remis en route le poêle à bois. De toute façon, on ne le fait jamais fonctionner la nuit par mesure de sécurité.

Vendredi 27 août 2021 :

La fin du mois est proche et le moment est parfait pour réaliser notre défi mensuel consistant à « inviter des villageois et leur préparer un repas typiquement charentais ». Bon, on peut considérer qu’Hannari est villageoise car elle a grandi ici dans cette ferme avant de regagner la France à l’âge adulte. Bon, on peut aussi considérer que même si on est invité chez elle, on peut les inviter quand-même chez eux… Quel luxe d’avoir une cuisine et surtout un four pour leur préparer ce repas traditionnel de la région où on vit, la Charente Maritime. On se met donc aux fourneaux pour leur préparer des mogettes qui sont des gros haricots blancs secs cuisinés avec des lardons, de la tomate, des oignons et des plantes aromatiques, le tout accompagné de morceaux de porcs. Bien entendu, un bon petit morceau de fromage frais de chèvre. En dessert, évidemment une galette charentaise avec la bonne recette du broyé du Poitou de papi Daniel. Bon, on n’avait pas de Cognac pour le digestif, dommage mais les stocks sont épuisés depuis bien longtemps. On en trouve pourtant dans les magasins mais à des prix exorbitants. Et au fait, pour l’apéro, on a même trouvé du préfou au magasin, ce pain à l’ail et au beurre, typique de Vendée mais qu’on apprécie aussi en Charente Maritime… Voilà encore un défi de réalisé haut la main !!

Nous quittons nos amis en milieu d’après-midi en espérant pouvoir les revoir dans quelques temps autour du Cap avant qu’ils ne rentrent très prochainement en France. Nous repartons de la ferme les bras chargés de dizaines de kilos d’oranges, d’oignons, de patates et de Rooibos. Merci les amis pour ce bon moment partagé ensemble.

Le temps est toujours très moyen mais la pluie s’est arrêté de tomber. Les cimes des montagnes du Cederberg sont enneigées. Les températures annoncées pour la nuit prochaine sont encore proches de 0°C. Nous roulons donc pour perdre quelques centaines de mètres d’altitude, environ 400 mètres. Les températures seront donc meilleures pour la nuit à venir. Le bivouac n’est pas top ce soir, car juste en contrebas de la Nationale 7, mais nous avons besoin de réseau Internet, qui est assez capricieux dans le secteur. Il ne faut donc pas être difficile pour ce soir.

Samedi 28 août 2021 :

Après l’école, Anaïs et Victor jouent avec d’autres enfants venus à leur rencontre. Le groupe de petits gars est adorable et ils passent tous ensemble un chouette moment.

En début d’après-midi, nous prenons la route vers le massif du Cederberg. Une piste nous y mène et nous fait prendre plus de 800 mètres d’altitude en peu de kilomètres.

Nous hésitons mais nous franchissons un long gué de plus de 100 mètres de longueur et profond d’environ 40 cm mais ça passe. Le pot d’échappement est dans l’eau mais pas la prise d’air du filtre à air, donc tant qu’on n’éteint pas le moteur, normalement, ça ne pose pas de problème. Bien que je ne roule évidemment pas vite, une belle vague se crée devant le pare choc qui se retrouve dans l’eau. Effectivement, ça passe et nous franchissons l’Olifants river en crue, ce qui nous évite un très grand détour de 45 kilomètres.

La piste un peu boueuse par moment s’élève, serpente à travers les montagnes et franchit le col Nieuwoudt. Nous nous arrêtons à Algéria prendre quelques informations sur le parc national avant de poursuivre pendant encore quelques dizaines de kilomètres. Puis, c’est l’ascension du Col Utitkyk. Un peu de neige est présente dans les fossés. Nous arrivons à 1000 mètres d’altitude. Les paysages sont fabuleux avec des spectaculaires formations rocheuses.

L’aire du Cederberg fait partie de l’ensemble des 8 Aires protégées de la Région florale du Cap classée par l’UNESCO au Patrimoine mondial. L’ensemble de 5530 km² est l’une des régions du monde les plus fleuries. Mais nous sommes certainement trop en altitude pour apercevoir les fleurs. Étonnement, nous voyons une végétation dite de type méditerranéenne avec des oliviers, des vignes, du mimosa et des magnolias en fleurs. C’est surprenant de voir des vignobles à plus de 1000 mètres d’altitude. Ce sont les plus élevés d’Afrique du Sud.

A la ferme de Dwarsrivier, nous nous acquittons des frais du camping obligatoire de Sanddrif pour passer la nuit dans cette réserve naturelle. L’entrée du parc est quant à elle incluse dans la Wild Card. Nous nous y installons dans un cadre agréable, cerné de montagnes à la cime enneigée le long de la rivière limpide répondant au nom de Matjies. Ce soir encore, le branchement électrique va nous apporter un peu de confort en nous permettant de brancher notre radiateur.

Dimanche 29 août 2021 :

Au fait, vous avez remarqué que je ne vous parle plus de notre santé. Et bien tout semble aller bien depuis quelques jours. Les migraines et nausées laissent enfin tranquille Audrey. Les autres petits maux liés au Covid-19 semblent enfin disparus pour tous les Mollalpagas. L’odorat est revenu. La fatigue s’atténue. C’est donc parti pour une randonnée aujourd’hui. Une grande randonnée à travers les Wolfberg Cracks (les fissures de Wolfberg) qui va être un bon test pour voir si on est bien remis. On avait tant souffert durant les trois dernières. Sept kilomètres en peinant avaient été le maximum et nous avions même dû renoncer à la dernière au bout d’à peine trois kilomètres. On se fixe donc comme objectif aujourd’hui de rejoindre la Wolfberg Arch située à 7 km.

Le sentier qui part du camping nous fait passer au milieu de formations géologiques de grès érodés par la pluie et le vent prenant le nom de Red Gods. Le nom peut effectivement prêter à confusion selon la traduction qu’on porte au nom de cette vallée.

Puis, c’est parti pour deux kilomètres de montée, de montée très raide et très escarpée où on s’élève de 550 mètres d’altitude. La progression à la fin est d’autant plus exigeante et compliquée que nous sommes dans la neige et qu’on ne voit pas où on met les pieds. On glisse sur de la glace. On s’agrippe avec les mains sur des rochers gelés et enneigés. De l’escalade par moment, mais sans corde. Mais nous sommes gâtés par des paysages incroyables. Le chemin se faufile dans les entrailles du Wolfberg dans une faille gigantesque et étroite atteignant 30 mètres de hauteur. Mais que c’est beau ! La vue sur le Sneeuberg, le point culminant de Cederberg à 2027 mètres est aussi sublime. Les enfants s’amusent à faire fondre dans leurs bouches des stalactites. Des Sud-Africains que nous avons rencontrés soulignent la chance que nous avons d’être ici à la fois au moment où le désert fleurit et où la neige, si rare, sublime ces paysages montagneux.

Nous arrivons quasiment au sommet de la randonnée sur un immense plateau assez venteux où de très jolis rochers érodés créent un décor merveilleux.

Il fait froid. Le Soleil peine à nous réchauffer et nous supportons largement nos polaires. Une de plus aurait été supportable car le petit vent nous glace. Mais on ne s’arrête pas et on doit rester en mouvement pour ne pas se refroidir. Nous sommes encore à trois kilomètres mais déjà nous apercevons la Wolfberg Arch vers laquelle nous nous dirigeons. Au fur et à mesure où nous nous en rapprochons, elle nous paraît de plus en plus gigantesque.

Puis nous arrivons sous cette incroyable formation géologique juste à l’heure de sortir le pique-nique du sac. Mais l’arrêt est de courte durée car il fait vraiment froid à 1551 mètres d’altitude.

Pas question de revenir sur nos pas par le chemin le plus court car la descente par la faille enneigée où nous sommes montés en escaladant sera trop périlleuse dans le sens de la descente. Nous poursuivons donc le chemin pour contourner cet obstacle périlleux à cause de la glace, mais la randonnée, au lieu de faire 14 km va en faire 19 ! Mais nous sommes tous en pleine forme. Quel bonheur de ne pas souffrir à chaque pas. Nous avons tous les quatre retrouvé la patate ! Mais que c’est bon ! Les paysages continuent de nous émerveiller. La dernière petite difficulté consiste à descendre le Col Gabriëls mais il est loin d’être compliqué comme la montée de ce matin.

Nous n’observons pas de faune aujourd’hui, même pas de léopards qui vivent dans cette réserve naturelle.

Les derniers 8 km se font par une piste de 4×4 défoncée et toute ravinée par de derniers violents orages. La progression est donc moins facile qu’on pensait, d’autant plus que la fatigue se fait sentir dans les jambes. Mais fièrement, nous arrivons au bout de notre randonnée de 19 km avec plus de 700 mètres de dénivelé positif ! On a bien mérité un bon apéro… C’est confirmé, nous avons vaincu le Covid-19.

Nous sommes accueillis par un brownie au chocolat que nous ont préparé nos voisins sud-africains de camping, les parents de Cisca, Anié et Iza avec qui Anaïs et Victor ont joué hier.

Nous n’étions pas très rassurés ce matin en quittant notre Tiny mais les babouins du camping ne l’ont pas touchée. On a aussi veillé, contrairement à la dernière fois, à ne pas laisser de fruits et légumes en apparence dans la Tiny, et à bien les cacher.

Lundi 30 août 2021 :

Matinée école pour les enfants, programmation des cours d’Anaïs et cuisine pour Audrey, lessive et blog pour moi. Audrey se remet à fond dans la physique et la SVT pour aider Anaïs. Et moi, dans les mathématiques. Tous bien occupés. On apprécie d’avoir accès à Internet pour chercher des infos quand on a un doute sur les atomes ou sur les fonctions…

Une mangouste grise passe devant nous alors que nous prenons notre petit café à l’extérieur.

Nous observons les équipements de camping démesurés des Sud-Africains. Ils pratiquent beaucoup le camping, avec des camping-cars comme on peut voir en Europe mais aussi beaucoup avec des 4×4 équipés de tentes de toit escamotables ou bien encore de petites caravanes 4×4 qui se déplient de partout quand ils arrivent dans un camping. Évidemment, la première chose qu’ils font quand ils arrivent sur place, c’est allumer le barbecue. Nous observons un couple d’anciens à côté de nous. Toute la journée semble rythmée par le feu qui les réchauffe et qui cuit leurs trois repas quotidiens.

Nous roulons pendant quelques petits kilomètres, toujours dans le secteur du Cederberg et plus particulièrement dans la Réserve Naturelle de Matjies Rivier. Nous y visitons une grotte où nous voyons des peintures rupestres San datées d’environ un millénaire. Dommage mais ces éléphants nous paraissent un peu trop bien restaurés.

Puis, un peu plus loin, nous nous promenons pendant une bonne heure au sein des paysages invraisemblables de Stadsaal Cave dignes d’un parfait décor de cinéma. Plein de grottes et de sculptures créées par l’érosion. Le ciel bleu, la dentelle de roches rouges, les fleurs jaunes. Tout est vraiment intense. Un immense terrain de jeu.

La journée culturelle se poursuit par une dégustation à la Cederberg Winery, réputée pour la qualité de ses vins. Parfait, il y a du wifi sur le parking pour occuper les enfants. Pendant ce temps, nous faisons notre première dégustation de vins sud-africains. 55 hectares de vignes sont cultivés sur les hauteurs du Cederberg. Mais cette cave fait aussi des assemblages avec des vins d’autres parties d’Afrique du Sud et également du Chili. Bordée par le semi-désert du Karoo occidental, la famille Nieuwoudt met à profit depuis cinq générations les sols argileux tout désignés pour la culture de cépages rouges, alors que les raisins blancs trouvent leur pleine expression sur les sols de grès qui abondent tout autant autour de la ferme familiale Dwarsrivier. A l’heure du goûter, pour moins de trois euros chacun, nous avons le droit à tester 8 verres de vins : Cederberg Sauvignon blanc, Cederberg Chenin blanc, Ghost Corner Sauvignon blanc, Ghost Corner Longaví Sauvignon blanc, Five generations Chenin blanc, Ghost Corner Pinot noir, Cederberg Merlot-Shiraz puis Cederberg Cabernet Sauvignon rouge. Wouahou, ça décoiffe… ça, c’est de la dégustation, d’autant plus qu’ils ne sont pas radins sur les doses… Surtout quand la gentille jeune femme qui s’occupe de nous apprend que nous sommes Français. Nous avons donc droit à un neuvième verre, du Ghost Corner Wild Ferment Sauvignon. Tous les vins ne sont pas à notre goût mais nous repartons avec de quoi remplir la cave de la Tiny de quelques excellentes bouteilles qu’on a sélectionnées.

Nous parvenons à retrouver le chemin de la Tiny qui en fait était garée à côté de la cave. Bon j’exagère mais heureusement qu’il n’y a pas beaucoup de route jusqu’à la prochaine étape ! Juste 6 kilomètres mais sur une piste sablonneuse bien chaotique m’obligeant à passer plusieurs difficultés en première vitesse, en redoutant à chaque centaine de mètres de ne pas passer la suivante. Heureusement, personne ne vient en face sur ce chemin très étroit. Bivouac au bout du chemin au départ d’une randonnée pour demain où malgré l’interdiction de dormir dans la réserve naturelle en dehors des campings, nous tentons quand-même de dormir ici. Peu de chance qu’on vienne nous déloger. La nuit risque d’être un peu fraîche à 1000 mètres d’altitude avec 5°C prévus. Pas de radiateur ce soir, donc on ressort les grosses couvertures polaires en plus de nos couettes.

Le réservoir de gasoil fuit depuis hier soir à grosses gouttes. Il va falloir regarder à cela de plus près. De plus, la Tiny fait un bruit de casserole depuis quelques jours car une patte de fixation du silencieux d’échappement sur la boite de vitesse s’est cassée. Cela va nécessiter de la ressouder si possible ou d’en refaire fabriquer une. On verra cela à la prochaine ville.

Mardi 31 août 2021 :

La Tiny a bougé toute la nuit (à cause du vent bien entendu) donc la nuit a été hachée mais pas trop froide. Il fait quand-même 15°C dans la Tiny au réveil, ce qui est confortable. La rando envisagée est incertaine car le vent est toujours violent, il pleut et les nuages bouchent tous les jolis paysages qui nous entourent.

Après l’école et le repas, c’est finalement parti pour la rando car le temps s’est amélioré. Nous marchons sur le sentier montagneux Bokveldskloof en direction de la Maltese Cross à seulement 3,2 kilomètres. Nous partons plus couvert que lors de notre rando d’avant-hier car de nouveau, nous allons monter de plus de 420 mètres d’altitude. Nous ressortons même les bonnets. La montée se fait le long et parfois dans le cours d’eau du ruisseau Dwars alimenté par les fontes de neige du Pup (1728 mètres d’altitude) et du Sneeuberg (2027 mètres). La végétation est composée de fynbos (des petits buissons) caractéristique du sud de l’Afrique du Sud, limité à une mince zone côtière et montagneuse au climat méditerranéen.

En gagnant de l’altitude, nous avons une vue sur les vignobles et les bâtiments de Dwarsrivier, avec le paysage rocheux orange brûlé toujours impressionnant. Mais aussi sur l’arche de Wolfberg où nous avons randonné il y a quelques jours. Le chemin escarpé longe une belle paroi rocheuse au-dessus d’un ravin peu profond. Il continue de serpenter et de traverser régulièrement le ruisseau limpide.

Nous arrivons sur un plateau à 1424 mètres d’altitude, où soudainement nous découvrons dans toute sa splendeur la Croix de Malte, une étonnante formation rocheuse. Mais comment est-elle arrivée là ! En réalité, la terre et la roche qui l’entouraient se sont érodées, laissant ce monolithe dressé de manière impressionnante avec une hauteur d’environ 30 mètres. Nous nous en approchons et nous en faisons le tour parmi les débris de roches entourant cette formation pour apprécier les différentes perspectives sur la Maltese cross.

Nous observons pour la première fois deux oréotragues, une espèce de petite antilope. Mais aussi un daman des rochers, plus commun depuis notre arrivée en Afrique Australe.

Retour par le même chemin jusqu’à la Tiny. Puis nous quittons cette Réserve naturelle du Cederberg qui mériterait à elle seule qu’on y consacre encore plusieurs jours, tellement elle possède de chemins de randonnées. Une soixantaine de kilomètres de piste nous permettent de sortir de ce parc.

Nous rejoignons la ville de Clanwilliam. Comme à l’entrée de chaque ville où nous sommes passés en Afrique du sud et aussi quelques fois en Namibie, nous voyons les townships en périphérie des centres-villes. Sans être des bidonvilles, ce sont des quartiers pauvres réservés aux non-Blancs. Ces zones urbaines, généralement construites de la fin du 19ème siècle jusqu’à la fin de l’Apartheid, sont principalement occupées par des populations noires ou métisses, mais aussi par des travailleurs indiens déplacés de force au nom des lois sur l’Apartheid, du fait de l’expulsion des habitants non-Blancs des centres-villes. J’aurai l’occasion dans les prochains articles de revenir sur ces relations Noirs-Blancs, toujours nettement visibles en Afrique du Sud. Les townships sont découpés en parcelles résidentielles égales où s’implantent des petites maisons en forme de « boite d’allumettes » en ciment produites en série à bas coût. Mais l’ensemble populaire, bien que pauvre, est bien entretenu. Des écoles et des infrastructures médicales sont construites et une économie locale voit le jour dans les townships. Cependant, pour la première fois en Afrique du Sud, nous sommes confrontés à la misère, car juste à côté de ce township de Clanwilliam, nous voyons un grand bidonville aux abords jonchés de détritus. De l’autre côté de la piste, le contraste est encore plus saisissant avec la présence à quelques dizaines de mètres de nombreuses maisons luxueuses, entourées de hautes clôtures sécurisées. Incroyable les écarts de richesses et de conditions de vie au même endroit selon qu’on habite du côté droit ou du côté gauche de la rue. Ceux habitant du « bon » côté ont une vue panoramique sur l’immense réservoir d’eau d’irrigation retenu par un immense barrage vieux de 85 ans.

Pause à Clanwilliam où nous arrivons sur la réserve de nos capacités en gasoil. Je resserre les raccords au niveau du réservoir de carburant mais la fuite est toujours là. Je n’arrive pas à la localiser. Puis bien que la journée soit bien avancée, nous roulons vers le littoral atlantique à seulement une bonne heure de route asphaltée. Nous traversons des parcelles cultivées entre autres de plants de Rooibos, coupés à une trentaine de centimètres du sol.

Puis nous arrivons au bord de l’océan après l’avoir quitté en Namibie, à Lüderitz, il y a tout juste un mois. Lamberts Bay est un port de pêche qui exporte ses anchois, ses snoeks et surtout ses langoustes dans le monde entier. Que c’est bon de sentir l’air de l’océan et les senteurs marines sur ce joli bivouac où nous arrivons deux minutes avant que le Soleil ne disparaisse à l’horizon, à 19h30. Nous apprécions les jours qui rallongent. A la différence de l’hémisphère nord, la belle saison arrive pour nous. Le printemps pointe le bout de son nez. On gagne chaque jour de précieuses minutes de Soleil.

Mercredi 1er septembre 2021 :

Nous ouvrons notre dernier défi mensuel, celui de nos amis Sonia et Mathieu qui nous mettent au défi de « se faire prendre en photo avec un alpaga » ! Ce n’est pas gagné en Afrique du Sud…

Joli réveil après une douce nuit bercée par les rouleaux de l’Atlantique. Nous tirons les rideaux et avons encore une fois une belle vue depuis notre lit.

On frappe à la porte. Tiens, encore un Sud-Africain qui vient nous souhaiter la bienvenue et nous inviter chez lui ? Non, c’est la police qui vient nous dire avec le sourire qu’on n’a pas le droit de dormir ici et qu’on ne pourra pas y passer une deuxième nuit.

Pendant le petit-déjeuner, nous observons par la fenêtre des gerbes d’eau dans l’océan créées par les plongeons des baleines. Ce sont soit des baleines franches australes comme on en avait si bien observées de l’autre côté de l’Océan Atlantique Sud en Argentine, soit des baleines à bosses qui se plaisent aussi en Afrique du Sud en cette saison.

Ce matin encore, des habitants du quartier viennent nous saluer. Marylin vient nous parler longuement. Elle rêve de vivre en tiny house.

Nous allons visiter cet après-midi la Réserve naturelle de Lamberts Bay Bird Island à quelques mètres du port de pêche et des conserveries de la ville. Elle abrite l’une des six colonies au monde des fous du Cap, toutes réparties sur des îles au large des côtes sud-africaines. Ces grands oiseaux marins appartiennent à la même espèce mais sont légèrement différents des fous de Bassans qu’on a pu observer au large des côtes bretonnes ou bien des fous à pieds bleus qu’on avait observés sur l’archipel des Galápagos. Nous avons la chance d’être à la période où ces oiseaux aux pattes palmées reviennent juste sur leur site de reproduction. Ils sont en ce moment environ 17 000 mais ce petit îlot a la capacité d’en accueillir 28 000.

Les mâles et femelles sont assez similaires et ne sont pas différenciables par leur plumage noir et blanc. Ils sont profilés pour parcourir à grande vitesse de grandes distances en vol au-dessus des étendues océaniques, profitant des vents et des vagues pour optimiser leur vol. Les fous capturent leurs proies en mer en plongeant, seuls ou en groupe d’une hauteur de 40 mètres en pénétrant dans l’eau à une profondeur de 10 à 15 mètres, parfois bien plus. Au moment de l’impact avec l’eau, les ailes sont complètement rabattues et tendues vers l’arrière dans l’axe du corps pour faciliter la pénétration en minimisant le choc. Les proies sont placées dans la poche gulaire puis consommées lors de la remontée ou en surface.

Chaque fois qu’un fou du Cap, mâle ou femelle, rentre au nid, il exécute une danse nuptiale complexe. Il s’agit en fait d’un système de communication. C’est vraiment drôle à observer. Les chercheurs ont constaté qu’au cours de leur danse, les fous du Cap n’utilisent pas moins de quatorze figures différentes pour se faire comprendre de leur partenaire. En redressant leur cou, en battant des ailes, ou encore en pointant leur bec vers le ciel, ils fournissent de précieuses informations sur la zone de pêche qu’ils ont privilégiée lors de leur périple. Par exemple, la danse est d’autant plus courte que l’expédition a été longue et que la source principale de nourriture est éloignée du site de reproduction. Plus remarquable, les chercheurs ont montré que la parade informe également sur la direction de la zone de pêche. Mais l’information communiquée par cette danse destinée au partenaire resté au nid profiterait également aux oiseaux à proximité.

Les oiseaux au plumage plus brun, qu’on pensait être des juvéniles, ne sont en fait que des adultes recouverts de boue.

Nous roulons vers le sud au milieu du Sandveld couvert de fleurs. Ces prairies de sable sont cultivées de blé et beaucoup de pommes de terre (40% de la production d’Afrique du Sud) sont récoltées ici.

Nous trouvons un charmant bivouac les pieds dans le sable à Elandsbaai.

Jeudi 2 septembre 2021 :

A l’heure de la rentrée des classes en France, ma chérie pense inévitablement avec une pointe d’émotion à toutes ces rentrées qu’elle a effectuées durant une quinzaine d’années devant tant d’élèves, de la petite section au CM2, à ces journées effervescentes et enthousiastes, qui annoncent de nouvelles rencontres, de nouveaux projets. Aujourd’hui, c’est bien plus calme. Anaïs et Victor commencent leur journée d’école en rédigeant leur carnet de voyage. Quant à elle, elle travaille sur les cours de sciences d’Anaïs et se plonge dans la structure des atomes afin d’aider au mieux notre grande lycéenne. Par la fenêtre de la Tiny-classe, elle jette de temps en temps un œil sur l’horizon. Au loin, des baleines sautent, provoquant d’immenses gerbes d’eau. Pas facile de rester concentrée sur la répartition des électrons ! Comme dans toutes les salles des maîtres où elle est passée à Soulignonne, à Saintes, à Pont l’Abbé d’Arnoult, à Saint Savinien sur Charente, à Saint Porchaire, l’odeur du café ne tarde pas à flotter dans l’air.

Au moment de quitter ce charmant bivouac, on se dit que c’est dommage car on s’y sent vraiment bien. Le temps change au cours de la matinée et la pluie est annoncée pour demain. Aussi, l’océan se couvre de petites vagues rendant plus difficile l’observation des baleines. Cependant, on continue à observer quelques gerbes d’eau de ces immenses mammifères dont le poids peut atteindre 80 tonnes.

C’est décidé, on reste donc ici pour l’après-midi. Surf sur Internet, lecture, bricolage, carnet de voyage, cafés, mise en ligne du blog, démarches administratives, préparation de l’année de SVT d’Anaïs, appels WhatsApp… On va tenter de passer une deuxième nuit au même endroit. Personne n’est venu à notre rencontre bien qu’on soit entre la plage et de jolies villas. La police est passée vers 1h30 du matin la nuit dernière mais ne nous a pas dérangés. Je bricole sur la Tiny et en particulier sur son échappement. Réparation de fortune mais qui devrait tenir quelques temps.

On discute aussi toujours de la suite à donner à notre voyage après l’Afrique du Sud. Je vous avais parlé de la possibilité d’envoyer la Tiny par bateau en Arabie Saoudite pour aller faire un petit tour au Proche-Orient en passant par l’Égypte, Israël, la Jordanie… Mais nous venons d’avoir une nouvelle proposition pour rejoindre toujours par bateau, l’Afrique de l’Ouest. A savoir le Ghana, la Côte d’Ivoire ou même le Sénégal. Ce qui nous permettrait ensuite de rentrer à la maison directement par la route en traversant la Mauritanie puis le Maroc, à condition que ce dernier rouvre ses frontières terrestres d’ici là… Vous voyez donc qu’on est bien occupés à étudier toutes ces possibilités, et d’autres encore… oh, et puis si on faisait prolonger notre visa sud-africain de 6 mois ? Oh, ben non, on pourrait aussi aller passer novembre et décembre au Zimbabwe et au Mozambique, puis revenir en Afrique du Sud et au Lesotho en début d’année prochaine ? Oh bon écoute, on prend l’apéro et on en discute ? Viens, Audrey, rejoins-moi sur la plage avec ton verre de Cabernet Sauvignon et on va refaire le monde ! oh, mais tu as raison, on pourrait aussi aller passer un mois à l’Île de la Réunion !