629 km parcourus du dimanche 3 au 11 octobre 2021

83 742 km parcourus depuis le départ

Dimanche 3 octobre 2021 :

Nous venons de passer une nuit bien paisible dans ce petit village de pêcheurs de Kassiesbaai à Arniston, aux maisons immaculées et couvertes de chaume. Petit café partagé avec Duncan et Eli qui ont accepté qu’on dorme devant chez eux.

Comme ils doivent rendre leur location ce matin, nous nous déplaçons sur un parking près du port pour faire l’école dans un joli cadre face à l’Océan Indien que nous avons retrouvé hier après avoir laissé derrière nous l’Océan Atlantique. Nous ne le reverrons au mieux que début mars 2022 au Sénégal ou bien en Charente Maritime 3 mois plus tard.

Mais le temps est encore maussade aujourd’hui, bien gris, bien couvert. Des giboulées de printemps car oui, les saisons sont inversées par rapport à l’hémisphère Nord. Un grand ciel bleu puis 5 minutes après, il pleut… Mais bon, on tient le bon bout car la belle saison arrive. Déjà, on apprécie les journées qui rallongent nettement. Le Soleil se lève à 6 heures pour se coucher à 18h30. La météo annoncée pour la semaine est bonne, avec du beau temps et des températures qui vont remonter autour de 20°C. Parfait pour profiter à fond des paysages de la très réputée Garden Route prise en sandwich entre les montagnes et l’Océan Indien et que nous allons longer cette semaine.

Nous avons décidé d’accélérer un peu le rythme de notre cavale car on a vraiment pris (beaucoup) le temps de profiter de la région du Cap et de ses incroyables et si généreux habitants mais on a passé 32 jours dans un rayon de 150 km autour du Cap et on n’a roulé que 1122 km, ce qui en fait l’une de plus petites moyennes mensuelles de notre cavale. On a aussi réservé dans 4 semaines, pour être certain d’avoir des places dans les campings, notre semaine dans le Parc National du Kruger à l’autre extrémité du pays à plus de 1600 km à vol d’oiseau, mais quasiment 1000 km de plus par la route côtière que nous allons prendre. Nous voici donc « obligés » de planifier un peu plus précisément notre programme des 6 semaines qui nous restent avant l’expiration de notre visa sud-africain, car il nous reste tant de choses à découvrir dans cet immense pays ! Tant pis, nous ne visiterons pas les innombrables points qu’on avait repérés sur notre route. Avec toutes les rencontres qu’on a faites, chacun y est allé de son coup de cœur en nous disant « si vous passez par-là, ne manquez pas tel endroit ! »… Mais il faut choisir ! et ça nous fera une bonne occasion pour revenir en Afrique du Sud dans quelques années !

Mais aucun regret d’avoir trainé dans cette belle région du Cap et surtout d’avoir pris le temps de savourer ces innombrables rencontres si agréables.

C’est donc décidé, aujourd’hui, on roule. Au programme, 268 km. Il y a bien longtemps que cela ne nous est pas arrivé. Ce temps de route, sans les enfants à côté, nous permet aussi de parler de la suite du voyage et de savoir comment envisager les 7 mois environ qu’il nous reste à cavaler dans le monde. De plus en plus, nous sommes donc séduits par l’idée de mettre la Tiny sur un bateau jusqu’au Sénégal début février, puis de rentrer ensuite par la route en traversant la Mauritanie, le Maroc et l’Espagne. L’idée de terminer la boucle par le Maroc par lequel nous avions commencé notre cavale nous plait bien. Le fait aussi de rentrer à la maison en Tiny et non pas en avion et en TGV nous fait envie et le retour serait moins brutal. On verra d’ici là car on a encore le temps de changer d’avis, mais on ne pense pas car on a abandonné l’idée de prendre un bateau jusqu’à l’Arabie saoudite par manque de temps pour rentrer ensuite par la route. Et nous venons surtout d’apprendre cette semaine que ce n’est surtout plus possible de remonter en roro d’Afrique du Sud vers le Proche-Orient et que les devis que nous avions fait sont désormais caduques.

Sous le crachin puis sous le Soleil, puis sous le crachin, puis sous le Soleil, nous roulons à une très bonne moyenne kilométrique sur la belle route N2 en direction de l’Est. Les paysages ressemblent beaucoup à nos campagnes françaises, cultivées de grandes parcelles de céréales dont beaucoup de blé. Malheureusement, les clôtures et les haies disparaissent là aussi. Les forêts aussi ne laissant place qu’à quelques parcelles d’eucalyptus. Nous longeons la chaîne de montagnes de Langeberg.

Nous ne nous arrêtons pas car nous ne traversons aucune ville ni carrefour. C’est seulement presque arrivés à notre destination finale à Mossel Bay que je dois ralentir à un feu rouge. Et là, un bruit suspect, nous fait faire à Audrey et moi, une grimace, une vilaine grimace. Un bruit de tremblement métallique à faible régime, quand le moteur tourne à moins de 1000 tours par minute. Que se passe-t-il ? Nous poursuivons pour les trois derniers kilomètres jusqu’au bivouac. L’inquiétude monte. Une fois arrivés, anxieux, j’ouvre le capot et le bruit semble bien provenir de l’intérieur du moteur. Aussitôt, j’appelle mon sauveur que vous commencez à bien connaître. Comme d’habitude, Joaquim est aussitôt disponible. Je lui fais écouter le bruit du moteur, et malgré les 9197 km qui nous séparent à vol d’oiseau, il ne semble pas du tout rassuré par ce qu’il entend, ce qui ne nous réconforte pas et ne calme pas notre désarroi. Un tel tremblement dans le moteur lui fait penser au tendeur de chaine de distribution ou bien à un problème de culbuteur. Rien de bon. Je cherche sur Internet la présence de garage non loin de là où nous sommes mais il n’y a rien de très près. Et Joaquim me déconseille de rouler ainsi, au risque évidemment d’accentuer les dégâts… Nous commençons à transpirer et le rythme cardiaque s’accélère malgré la très grande expérience (lol) que nous avons en gestion de crise lors des recherches de panne mécanique…

Nous ouvrons le capot de protection du moteur dans la cabine de façon à avoir un aperçu visuel plus facile sur la mécanique. Et là, immédiatement, Audrey s’aperçoit que la pompe à injection est desserrée et que c’est elle qui tremble. Ouf ! panne trouvée. Plus de peur que de mal ! Je sors un écrou frein de 8 et une rondelle contact de ma boîte à boulons pour remettre sur l’une des trois fixations cassée du corps de pompe et quelques tours de clé de 13 plus tard, le moteur ronronne parfaitement, comme s’il voulait, comme nous, que notre cavale ne s’arrête jamais. A distance, Joaquim prend une bière Superbock évidemment bien méritée et nous prenons un bon et grand verre de Sauvignon blanc… On a frôlé la catastrophe.

Joli bivouac en plein ville, conseillé par Gina et Geoff qu’on avait rencontrés près de Cape Town, sur un parking résidentiel non loin du Cap Saint Blaize, face à l’Océan Indien. Encore une douce nuit bercée par le bruit des vagues.

Lundi 4 octobre 2021 :

Nous sommes garés au bord d’un sentier aménagé le long du front de mer et beaucoup de personnes curieuses viennent à notre rencontre nous interroger sur notre aventure, prendre en photo la Tiny. Toujours un bel accueil des Sud-Africains.

Nous partons visiter le Musée maritime Dias Museum Complex. Un joli bâtiment, érigé en 1901 à l’origine pour servir de moulin à grains, a été transformé pour accueillir une réplique grandeur nature de la caravelle de Bartolomeu Dias, le célèbre et premier explorateur portugais à atteindre le Cap des Tempêtes (Cap de Bonne Espérance) et à poser le pied sur le sol sud-africain ici à Mossel Bay le 3 février 1488.

Ce navire a été reconstruit au Portugal et a pris la mer pour arriver à Mossel Bay en 1988 après trois mois de navigation soit deux fois plus rapidement que 500 ans plus tôt.

Le musée expose les aspects de l’histoire maritime des premiers navigateurs portugais, néerlandais et anglais, dont le célèbre Vasco de Gama, l’un des explorateurs portugais les plus connus, car ce fut le premier à atteindre les Indes, quelques années après que Dias soit arrivé au point le plus au Sud de l’Afrique. Nous apprécions de voir les instruments de navigation, comme de beaux astrolabes en cuivre et aussi l’évolution des cartes maritimes des premiers cartographes au fur et à mesure du 15ème et du 16ème siècles, ainsi que quelques belles maquettes.

Plusieurs siècles avant que les Portugais n’ouvrent la route maritime vers l’Inde, une route terrestre/maritime de l’Inde à la Méditerranée existait. De Malacca en Malaisie, de petits navires transportaient les marchandises jusqu’en Inde par voie maritime, puis jusqu’à Ormuz à l’entrée du golfe Persique où elles étaient acheminées via Alep et Alexandrette. Une route alternative en provenance de l’Inde partait de la Mer Rouge via Suez, Le Caire et Alexandrie. Les péages perçus par les dirigeants des pays traversés par la route terrestre ont contribué de manière significative au coût élevé des marchandises commerciales atteignant l’Europe. Les motifs qui ont inspiré les tentatives de découverte d’une route maritime vers l’Inde étaient d’abord et avant tout la recherche d’épices, deuxièmement le désir d’or de Guinée, troisièmement leur zèle de croisade chrétienne et enfin la quête du légendaire roi chrétien prêtre Jean. L’arrivée de Vasco de Gama à Calicut, en Inde, en 1497, a marqué le début du commerce maritime entre l’Europe et l’Extrême-Orient. Les Portugais y ont d’abord établi leurs stations sur la côte Ouest et en 1511, ils ont pris Malacca, étendant ainsi leur influence à la Malaisie, la Chine et le Japon. Ils ont joui d’un quasi-monopole du commerce pendant tout le 16ème siècle.

Dans les jardins, nous découvrons le célèbre Milkwood, un arbre postal vieux de plus de 500 ans, oui un véritable arbre postal sous lequel les marins laissaient des messages aux bateaux suivants ! En 1500, le navigateur portugais Pêro de Ataíde a cherché refuge dans la Baie de Mossel après avoir perdu une grande partie de sa flotte dans une tempête. Il a laissé un récit du désastre caché dans une vieille chaussure qu’il a accroché à cet arbre, près de la source où l’explorateur Bartolomeu Dias avait puisé de l’eau. Le rapport a été trouvé en 1501 par l’explorateur à qui il était adressé, João da Nova, et l’arbre a servi de sorte de bureau de poste pendant des décennies par la suite. Le grand arbre a été déclaré monument national. Plus récemment, une boîte aux lettres en forme de botte a été érigée sous le désormais célèbre arbre, et les lettres qui y sont postées sont affranchies d’un timbre commémoratif.

Le même ticket d’entrée nous permet de visiter le Musée des coquillages. Belle exposition de mollusques également et de petits animaux marins dans des aquariums.

Dans le jardin, nous apprécions les superbes cottages vieux de 200 ans.

Nous nous dirigeons vers la grotte The big cave qu’on nous a conseillée. Mais en route, alors que je sollicite de la puissance au moteur pour gravir la toute petite colline en plein ville, je m’aperçois que le moteur n’a aucune puissance. Nous voici de nouveau en mode dégradé… Grrr… Bon on a l’habitude car on a fait déjà des milliers de kilomètres comme ça, mais quand-même… Évidemment, nous faisons immédiatement le rapport avec la panne d’hier. Comme la pompe à injection a tremblé, on se dit qu’elle a dû endommager la pompe à vide qu’elle entraine, qui a pour fonction d’alimenter entre autre le turbo, mais aussi l’assistance au freinage. C’est déjà cette panne qu’on avait eue en Turquie suite à un mauvais remontage de la pompe à injection en Grèce, ce qui avait eu des conséquences dramatiques par la suite… Tant pis évidemment pour la grotte. Pendant que je roule, je cherche sur Google un garage Mercedes. Heureusement, il y en a un dans la prochaine ville à 40 km. Sans éteindre le moteur de crainte de ne pouvoir démarrer, nous nous dirigeons vers la ville de George, en espérant pouvoir y arriver. En même temps, Joaquim nous assiste et nous rassure au téléphone en nous disant que cela ne doit pas être grave, car les freins fonctionnent donc la pompe à vide doit fonctionner aussi. Il me donne quelques pistes pour vérifier la bonne alimentation en air du turbo et de vérifier les connections de deux électrovannes commandant des dépressions d’air. Péniblement, poussivement, à moins de 30 km en haut des côtes sur l’autoroute N2, nous arrivons à George, sur le parking de Mercedes, où tous les deux, avant de faire appel aux mécanos, nous nous lançons dans un check du moteur. Le turbo est bien branché. Je remplace les deux électrovannes. Essai sur route. Tout fonctionne bien !!! Nous repartons. Ouf, encore une panne de réglée. Le personnel de chez Mercedes n’a rien dû comprendre…

Nous nous dirigeons vers le Musée ferroviaire Outeniqua mais il est trop tard pour en faire la visite. Le personnel accepte qu’on dorme sur le parking. Chouette bivouac industriel entre de superbes anciennes locomotives à vapeur.

Audrey m’aide à vidanger le moteur de la Tiny. L’huile noire d’avoir roulé presque 10 000 kilomètres depuis Etosha en Namibie, ravit le mécano du site qui traitera avec les traverses des anciennes voies de chemin de fer. Pas très écologique mais bon, c’est un moyen de la retraiter.

Mardi 5 octobre 2021 :

Nous voulions ce matin faire une balade en train pour monter en haut du Col Montagu mais nous ne savions pas qu’il fallait réserver plusieurs jours à l’avance. Par chance, 5 minutes avant le départ du train, suite à un désistement, nous avons la possibilité de monter à bord. Juste une vingtaine de passagers à bord de ses deux voitures vieilles de plus de 40 ans. Nous traversons la ville de George puis nous prenons environ 700 mètres d’altitude sur environ 25 km de distance. Le petit train grimpe à l’assaut des monts Outeniqua, de George en direction de Oudtshoorn. Jusqu’à 2 500 personnes furent affectées à la construction de la voie ferrée de 1908 à 1913. Le tracé emprunte un chemin tracé dans le roc, où sept tunnels furent construits dont ceux qui passent sous Cradock Peak (1579 m) et George Peak (1327 m), les points les plus élevés de l’Outeniqua. Ce tracé raccourcissait la route de Port Elizabeth à Cape Town de 267 km.

Le train marque quelques arrêts pour franchir des passages à niveau sans barrières, pour changer d’aiguillage, pour profiter de la végétation assez abondante (des forêts, du fynbos), pour couper quelques branches sur le passage, pour voir des cascades et des torrents aux eaux rouges ou noires.

Depuis une petite aire de pique-nique, nous profitons de la vue panoramique sur la ville de George, et sur l’océan.

De retour de notre bucolique promenade de 2h30, nous visitons le musée ferroviaire, fort passionnant avec de superbes locomotives à vapeur et voitures anciennes. Dommage que l’ensemble manque d’éclairage adapté à la mise en valeur de cette magnifique collection.

Il y a aussi un joli musée de voitures automobiles et de camions de collection avec des modèles que je ne connaissais pas et que nous n’avons pas l’habitude de voir en Europe.

Nous quittons le parking du musée. Zut, la batterie est à plat. Heureusement, j’ai un petit booster qui me permet de démarrer facilement. L’alternateur charge bien. Peut-être qu’elle commence à être fatiguée. Elle a plus de 80 000 km et plus de 4 ans. Décidément, la mécanique nous joue des tours cette semaine…

Petit plein de courses où nous profitons de la proximité de la ville de Oudtshoorn qui est la capitale mondiale de l’élevage d’autruches, pour acheter quelques bons steaks de cet oiseau à la chaire rouge si tendre. Plus de 200 000 oiseaux y sont élevés sur plus de 500 fermes.

Nous roulons vers Victoria Bay où un parking désert fera un bivouac tranquille pour ce soir. Audrey et moi allons un peu marcher dans cette petite baie.

Mercredi 6 octobre 2021 :

C’est aujourd’hui mon anniversaire, 32 ans et 120 mois… Donc pas d’école comme d’habitude pour les anniversaires. Matinée à prendre le temps pour le petit déjeuner, jeux de société. Puis, nous roulons vers la Réserve naturelle de Wilderness pas très loin de la ville de George pour aller y randonner.

La route principale N2 nous y mène. Le dernier kilomètre se fait sur une piste ondulée. Et là… avec les secousses certainement, mon voyant EDC s’allume en rouge sur le tableau de bord. Il indique un dysfonctionnement du système d’injection. Angoisse… la pompe à injection qui tremblait il y a quelques jours a donc dû faire plus de mal qu’on ne pensait. Je reconnais le bruit du moteur anormal comme on a déjà eu pendant les quelques 5000 km qu’on a déjà faits en mode dégradé en Asie. Rapidement, je soupçonne qu’elle ait bougé un peu et que son avance se soit déréglée. Ce qui, avec un bon mécano Mercedes équipé de la valise, n’est pas compliqué à régler. Pour une fois, nous avons de la chance et nous ne sommes qu’à une bonne trentaine de kilomètres d’une concession à la marque à l’étoile. Mais que c’est long en mode dégradé car le moteur s’est mis en sécurité et le turbo ne fonctionne donc plus. Je ne fais pas le malin sur l’autoroute surtout en haut des longues côtes que je monte sur la bande d’arrêt d’urgence. Je crains à tout moment que le moteur s’arrête pour de bon.

Heureusement, nous arrivons poussivement chez Mercedes. Rapidement, nous sommes pris en charge mais le mécano ne cherche pas longtemps sur sa valise qu’il essaye de connecter à l’interface OBD de la Tiny pour voir les défauts enregistrés. C’est moi qui lui montre comment se servir d’un logiciel plus ancien. A force, j’ai l’habitude… Mais pas moyen pour autant d’avoir les codes défauts. Encore une fois, le service Mercedes à l’étranger avec un véhicule vieux de presque 25 ans est minable. Certains garages de la marque ont réussi à nous dépanner dans différents pays mais de nombreux ont tout simplement refuser de nous prendre en charge… Celui-ci n’échappe pas à la règle. Du moment qu’il n’arrive pas à lire les défauts, il ne cherche même pas à faire les contrôles visuels de base. Le capot se referme.

Le mécano nous envoie chez un spécialiste diéséliste dans la même ville. Il est effectivement spécialiste en injection et en turbo. Aussitôt, il branche une valise générique et il arrive en quelques dizaines de secondes à lire les défauts du moteur qui confirment bien un déréglage de l’avance de la pompe à injection.

Il travaille en collaboration avec un autre garagiste voisin qui après avoir attendu le temps de la pause déjeuner se met au travail. Mais il lui est impossible de soi-disant régler la pompe sans la déposer. Mouais… Compte tenu des derniers soucis qu’on a eus avec la pompe qui s’était dévissée et qu’on lui explique, il la soupçonne d’avoir un autre défaut plus important qu’un simple déréglage. Ça traine un peu, les heures passent, il va, il vient, il bade comme on dirait à Romegoux… Puis à 15h30, il nous annonce qu’il termine sa journée dans une heure et qu’il est trop tard pour se mettre au travail.

Une nouvelle fois, nous avons la chance de pouvoir continuer à vivre dans notre Tiny le temps des réparations. On a eu des bivouacs avec une plus jolie vue mais c’est un luxe de ne pas devoir chercher un hôtel et de continuer à rester sur place pour voir ce que font les mécanos. Bon, j’aurais préféré une journée d’anniversaire un peu différente. Audrey a déjà passé deux de ses anniversaires autour du monde dans des garages, au Chili et en Turquie. Il n’y avait pas de raison que je n’en passe pas un…

La journée est triste mais égayée en soirée par un apéro amélioré et l’ouverture des cadeaux fabriqués par mes enfants adorés.

Encore un bivouac avec un superbe coucher de soleil. Lol…

Jeudi 7 octobre 2021 :

Une journée comme je ne les aime pas commence. Une journée de recherche de panne. Une journée à assister et à regarder chacun des gestes des mécanos. Notre anglais n’est pas parfait mais en plus, quand il s’agit de trouver les termes mécaniques en anglais, c’est encore plus compliqué. Les mécaniciens se mettent rapidement au travail. Très vite, ils m’annoncent que la pompe à injection est à remplacer, d’autant plus qu’elle a un œillet de fixation qui s’est cassé pendant le tremblement.

Mon porte-monnaie commence à pleurer aussi. Pas le choix selon eux. Par chance, le diéséliste a en stock le bon modèle de pompe à injection qui provient d’un Sprinter. Il me propose un échange standard avec cette nouvelle pompe révisée et éprouvée sur le banc d’essai. Pas trop le choix… Pas de devis… On verra la douloureuse plus tard.

Remontage de la pompe quelques heures plus tard. Contact. Préchauffage. Démarrage. Au quart de tour, la Tiny ronronne mais ronronne toujours aussi mal, signe que l’avance est déréglée, et le voyant EDC est toujours allumé… Angoisse. Transpiration. Le mécano est certain du parfait calage de la nouvelle pompe et que l’avance est donc bonne. Ce n’était donc pas la pompe et on l’a remplacée pour rien… Y’en a marre, on a déjà remplacé dernièrement en Namibie les 5 injecteurs pour rien…

Notre ami Joaquim, mécanicien chez Mercedes en France, comme depuis le début de notre cavale, est toujours fidèle à lui-même et nous échangeons en continu par téléphone sur l’avancée des opérations mécaniques. Il connaît à merveille notre Mercedes Vario 512. Les mécanos soupçonnent, à juste titre, l’électrovanne d’avance de la pompe à injection défectueuse. En effet, on a repris celle de la vieille pompe pour mettre sur la nouvelle car cette pièce remplacée en Mongolie est assez récente. Mais bon, elle peut quand-même être défectueuse. Par chance, ils en ont aussi une en stock, d’occasion, mais ce sera parfait pour tester. Le remplacement est long car elle est difficile d’accès. Contact. Démarrage. Voyant toujours allumé. On va faire un test sur la route mais le moteur est toujours en mode dégradé. Grrrr… Nous n’avons plus beaucoup de pistes à explorer.

Je me couche sous le camion et je vois que le faisceau électrique a un peu bougé le long du longeron du châssis. J’oriente les mécanos dessus et effectivement, ils trouvent un fil commandant justement l’électrovanne de la pompe à injection qui aurait pu se mettre à la masse lors des secousses sur la piste hier. Ils réparent le fil. Le patron teste un à un tous les fusibles. Ils sont tous bons. La continuité des fils aussi. Mais ça ne fonctionne toujours pas…

Daniel, le patron, s’oriente alors vers un dysfonctionnement de l’ECU, l’unité de commande électronique qui gère entre autre l’injection. Je ne le sens pas trop de se lancer dans le démontage de ce calculateur embarqué. Mais bon, je n’ai pas d’autres choix que de lui faire confiance. Le voici à checker la carte électronique sur son bureau mais il ne trouve pas de composants qui aurait pu cramer. Il prend rendez-vous pour demain matin avec un électronicien qui viendra tester cette partie.

La journée se termine. On n’a pas avancé. Les heures de main d’œuvre s’additionnent. La pompe a certainement été remplacée pour rien. Le moral est dans les chaussettes. Nous voyons le week-end approcher à grands pas. Nous envisageons autour d’un Jack Daniel’s, dans un désespoir total de démonter la Tiny de son châssis et de la poser ici et de terminer nos jours en Afrique du Sud… après tout, on ne serait pas si mal ici non plus, bon pas forcément dans la cour du garage mais dans une petite crique face à l’océan… Puis, après un deuxième verre, on se raccroche à notre solide expérience de panne aux quatre coins du monde et on se dit que même dans les pires situations angoissantes où notre Tiny agonisait, au Chili, au Pérou, en Grèce, en Turquie, au Kazakhstan, en Mongolie, on a toujours fini par repartir. Parfois au bout de trois semaines, parfois rapidement, parfois en laissant des gros billets, parfois gratuitement, mais on a toujours fini par repartir.

Encore une fois, je passe longtemps avec Joaquim au téléphone pour faire le point sur la panne. Il m’explique comment tester si la fameuse électrovanne est bonne, bien qu’on ait essayé aujourd’hui déjà deux modèles différents. Il fait nuit, Audrey m’éclaire avec la torche de son téléphone mais l’électrovanne a bien une résistance de 15 ohms donc elle est opérationnelle.

Puis, soudain, Audrey a une idée lumineuse : « Mais tu te souviens Sylvain, quand on a remplacé cette même électrovanne d’avance de la pompe à injection à Oulan Bator en Mongolie il y a deux ans, ça ne fonctionnait toujours pas et c’était un fusible de grillé… ». Très bonne remarque et une bonne piste à explorer mais le patron a cet après-midi testé un à un tous les fusibles. Nous sortons de la Tiny pour recontrôler et directement, je me souviens où est placé ce fusible numéro 23, je le teste et… il est bien grillé… C’est sûr, c’est la panne. Bien joué Audrey ! Mais pas moyen de tester le démarrage car le calculateur est sur le bureau du mécano et sa journée de travail est terminée.

Deuxième bivouac de rêve enfermés dans la cour du garage mais on s’endort très sereins, certains à 99% que la panne a été trouvée.

Vendredi 8 octobre 2021 :

7h30, je cours vers le mécano qui embauche juste en lui disant : « c’est bon, ma femme a trouvé la panne ! ». Légèrement macho sur les bords, je ne vous dis pas la tête qu’il fait… On accourt vers la Tiny, on remplace le fusible, on rebranche le calculateur. Contact. Préchauffage. Démarrage au quart de tour. Voyant éteint !!!! Test sur route, le moteur a retrouvé sa pleine puissance et ronronne parfaitement. Plus de mode dégradé. Nous sommes réparés, grâce à Audrey !

J’appelle aussitôt notre ami Joaquim pour le prévenir. Il me dit avoir travaillé jusqu’à 22 heures hier soir sur notre problème pour nous aiguiller et chercher à distance la panne, et qu’il avait de nouvelles pistes à explorer ce matin. MERCI Joaquim encore une fois pour ta présence sans faille, ton incroyable expérience en mécanique, ton aide durant ces deux infernales journées où je t’ai eu 20 fois au téléphone !

Encore une galère de résolue. Il ne reste plus qu’à passer à la caisse. Je me dirige vers le diéséliste qui a fourni et révisé la nouvelle pompe, sachant que je m’attends à plusieurs centaines d’euros. Environ 1000€ en France pour un échange standard. Et là, le gars gêné, m’annonce qu’il ne me facture rien. Car effectivement, la pompe n’avait certainement rien et ne nécessitait pas d’être remplacée car l’origine de la panne devait bien être ce fil dénudé qui a touché le châssis et qui a grillé le fusible qui protège l’électrovanne d’avance de la pompe à injection… (donc sans aucun rapport avec le précédent dévissage de la pompe en roulant). J’insiste, gêné aussi, mais sans trop insister quand-même… Il me répond qu’il m’offre cette nouvelle pompe révisée et que je n’ai qu’à aller payer la main d’œuvre à son collègue. Je me dirige vers Daniel, en lui disant que je n’ai pas eu à payer la pompe, et en lui reglissant que c’est ma femme qui a trouvé que c’était un fusible de grillé… « Bon, ben, je ne te facture pas la main d’œuvre non plus alors », me répond-il… J’insiste, sans trop insister… Non, non c’est gratuit malgré une quinzaine d’heures cumulées de mécanique… Je laisse à chacun d’eux une enveloppe en liquide pour les remercier de leur travail et de leur générosité.

Encore une fois, on s’en sort bien financièrement. On a bien dépensé quelques milliers d’euros de réparation et en pièces mécaniques depuis le début de notre cavale, mais si on avait dû payer à chaque fois le nombre réel d’heures passées, on aurait dû abréger précocement et depuis fort longtemps notre voyage. On avait même réussi à se faire rembourser par l’assurance mon billet d’avion aller et retour de Turquie pour aller chercher des pièces en France ! En Amérique du Sud déjà, lors de notre plus grosse galère au Chili, immobilisés en plein Désert d’Atacama, nous n’avions rien eu à payer de 3 semaines passées dans un garage… Et encore une fois, sans la présence de Joaquim, on ne serait évidemment pas rendu si loin, et notre tour du monde aurait pris fin en Turquie ou en Mongolie.

La cavale reprend après deux journées immobilisés. Une belle journée d’ailleurs car aujourd’hui, nous fêtons notre troisième anniversaire de voyage ! Déjà 3 ans que nous sommes partis un lundi 8 octobre 2018 ! Que de kilomètres parcourus, que d’aventures, que de joies, que de rencontres, que d’émerveillements, mais aussi que de galères, que de stress, que de doutes, que d’embuches mécaniques et de soucis créés à cause de ce satané Covid-19 qui nous a fait sans cesse revoir nos plans et nos envies. Mais bon, on s’accroche et on tient bon. On est vraiment très unis, encore plus dans les galères. On ne retient que le positif de chaque situation. On continue à croire en notre bonne étoile qui nous protège. On puise nos forces dans toutes les relations que nous avons à distance avec les gens qu’on aime et qui nous soutiennent moralement. On a envie de vivre notre rêve jusqu’au bout. On trouve aussi des ressources et de l’énergie dans les innombrables messages d’amitié et de soutien que nous recevons, y compris de tant de personnes que nous ne connaissons pas physiquement.

Aujourd’hui est aussi le jour où nous pouvons enfin nous faire vacciner contre le Covid-19. On n’avait pas pu le faire auparavant, ni lors de notre passage en France l’an dernier où la vaccination était encore réservée aux personnes âgées, ni dans aucun pays d’Afrique que nous avons traversés. Là où 35% des habitants sur Terre sont vaccinés, et là où plus de 66% des Français le sont, seulement 1,8% le sont au Kenya, 0,9% en Tanzanie, 1,6% en Zambie, 7,7% en Namibie. L’Afrique du Sud est le premier pays que nous traversons où nous pouvons facilement nous faire vacciner, sans « piquer » des doses aux locaux. On ne se voyait pas effectivement, même si on avait pu, aller se faire vacciner dans des pays plus pauvres où les doses de vaccins manquent considérablement et cruellement aux populations locales. Ici, les vaccins sont faciles à obtenir pour les Sud-Africains qui le veulent mais seulement 16% de la population est vaccinée, bien qu’il y ait des centres de vaccination partout dans le pays. On aurait d’ailleurs aimé le faire plus tôt dans ce pays mais il nous fallait attendre un minimum de deux mois après notre récente contamination au Covid-19 en Namibie. Mais il nous faut aussi, comme on a choisi le vaccin à une seule dose du laboratoire Janssen, attendre un mois pour être considérés comme totalement vaccinés. Et c’est précisément dans un mois que nous aurons besoin d’une preuve de vaccination pour notre prochain pays qui l’exigera pour éviter une quarantaine. Anaïs et Victor devront attendre la fin de l’année pour se faire vacciner dans notre prochain pays car on ne peut vacciner en Johnson & Johnson les moins de 18 ans. De plus, même si on a eu le Covid, on ne rentre pas dans le cadre d’une seule injection de vaccin d’autres laboratoires car on n’a pas de preuve (test PCR) justifiant qu’on a eu le Covid tous les 4. De même, le fait d’être protégés par une seule dose si on a déjà eu le Covid, n’est pas une mesure reconnue à l’étranger. Et beaucoup de pays ou de sites touristiques commencent à demander une vaccination intégrale. Bref, nous voilà donc enfin protégés par un vaccin, bien qu’on avait sans doute une certaine immunité en raison de notre contamination récente mais nous avons le précieux sésame pour voyager plus sereinement d’ici à la fin de notre cavale. Nous serons ainsi protégés et nous protègerons toutes les personnes que nous croiserons dans notre cavale. C’est très facilement, sans rendez-vous et sans payer que nous pouvons tous les deux nous faire piquer dans une pharmacie. Cette vaccination à l’étranger ne sera pas reconnue en France, bien que le vaccin Janssen y soit homologué, et nous ne pourrons pas avoir de passe sanitaire français, car nous n’avons pas d’adresse de résidence en Afrique du Sud à justifier. Mais on espère bien que d’ici à notre retour au printemps prochain, celui-ci aura disparu de la vie des Français. Quoiqu’il en soit, il nous faudra toujours un rappel.

Nous roulons vers la Réserve naturelle de Wilderness, là où nous sommes tombés en panne il y a quelques jours. La Tiny fonctionne à merveille et la pompe est même mieux calée qu’avant notre panne et le moteur cliquette moins. Cool !

Nous sommes sur la réputée Garden route, la pittoresque et mythique route N2 longeant le littoral Sud de l’Afrique du Sud serpentant sur près de 750 km entre la ville du Cap et Port Elizabeth, mais plus précisément entre la ville d’Heidelberg et la Storms river. Le nom vient de la végétation verdoyante et de la diversité écologique rencontrées ici ainsi que des nombreuses lagunes et lacs qui parsèment la côte. La région est très prisée des Sud-Africains et des touristes qui affectionnent particulièrement sa verdure, ses forêts, ses lagunes. La côte jouit aussi d’un climat océanique avec des étés chauds et des hivers doux à frais. C’est le climat le plus doux en Afrique du Sud et serait même le deuxième plus doux dans le monde d’après le Guinness des Records. Les températures descendent rarement en dessous de 10°C en hiver et montent rarement au-delà de 28°C en été. Certes, ça ressemble à beaucoup de jolies régions qu’on a pu traverser dans le monde, mais après tous les paysages désertiques de la Namibie et toute la végétation assez basse (le fynbos) de la région du Cap, ça fait quand-même du bien de voir des arbres.

Cette réserve naturelle propose un très beau sentier de randonnée bien aménagé, le Half collared king fisher trail. C’est donc parmi une végétation très dense que nous marchons pendant environ 10 km en faisant une boucle le long de la rivière Wolw.

A la moitié du parcours, nous arrivons devant une jolie cascade où les eaux ont pris une étonnante couleur tourbe-orangée, en raison du tanin diffusé par la décomposition du fynbos dans le sous-sol.

Retour à la Tiny en prenant garde comme à l’aller à ne pas marcher sur les centaines d’énormes sauterelles en plein cycle de reproduction.

Nous traversons la rivière à la force de nos bras sur un petit bac qu’on déplace en tirant sur des cordes. Tant pis, on aura des ampoules.

Nous profitons de traverser le terrain de camping du parc national pour prendre et savourer des douches dans des vrais sanitaires avant de prendre la route. Un petit luxe pour des voyageurs en cavale. Nous sommes un peu fatigués de notre journée après la rando, après les fortes émotions des deux derniers jours, avec la vaccination de ce matin, mais avec les deux journées de perdues avant-hier et hier, il nous faut quand-même un peu avancer le long de la côte et nous diriger un peu vers l’Est du pays. Dans moins de trois semaines, il nous faut être au Kruger encore à plus de 2000 km devant nous. Nous roulons donc une bonne heure, ce qui nous permet aussi de nous rassurer pleinement sur le fonctionnement du moteur de la Tiny qui monte très bien les côtes sur la bonne route N2.

Joli bivouac sur l’île de Thesen au milieu de la lagune de Knsysna où la rivière éponyme rejoint l’Océan Indien. Nous sommes sur les quais où quelques pêcheurs à la ligne continuent de taquiner le poisson malgré la nuit tombée. Apéro amélioré où on sort le champagne que nous a offert dernièrement Toni pour fêter la réparation, la vaccination et nos 3 ans de voyage… Que d’évènements aujourd’hui !

Samedi 9 octobre 2021 :

Nous partons marcher sur le petit port de Thesen. L’ambiance est conviviale car ce sont les petites vacances scolaires en ce moment en Afrique du Sud. Les terrasses de café et de restaurants du Waterfront sont pleines, les aires de jeux résonnent de cris d’enfants… Jolis petits canaux et beaux immeubles résidentiels.

Très petite forme, contre coup du vaccin d’hier. Après une mauvaise nuit pour Audrey qui a eu des bons pics de fièvre, c’est moi qui suis vraiment à plat aujourd’hui. La rando qu’on avait prévue n’est pas envisageable.

Péniblement, je conduis vers notre prochaine étape toujours sur cette Garden Route où sont plantés beaucoup de pins et d’eucalyptus. Quelques townships toujours autour des rares villes traversées.

Nous arrivons à Plettenberg Bay, une autre étape de la Garden Route, et trouvons un parking au bord de l’estuaire de la Piesangrivier. Fin d’après-midi au lit pendant qu’Audrey puise quelques forces pour aller se promener.

Dimanche 10 octobre 2021 :

Ce week-end, c’est le 10ème Festival des aventuriers à Tonnay-Charente. Notre famille, nos amis y sont réunis pour assister à un week-end de projections de différents voyageurs autour du monde. Je vous en avais déjà parlé mais c’est grâce à ses organisateurs, nos amis Annie et Stéphane, que nous en sommes là aujourd’hui. C’est suite à la lecture de leur livre « Trois enfants autour du monde » qu’Audrey m’a dit il y a une douzaine d’années : « Sylvain, c’est ça que j’ai envie de vivre » et que je lui ai répondu « d’accord »… Depuis, nous avons seulement manqué les éditions de ce festival quand nous étions en voyage. Chaque année, nous avons vu tant d’aventuriers qui nous ont confortés dans notre choix de vivre le rêve que nous vivons actuellement. Nous y avons fait beaucoup de rencontres de voyageurs qui sont depuis devenus de sincères amis. Chaque jour qui a passé, nous avons fait ce qu’il fallait pour vivre notre rêve. C’est aussi parce que nous apportons beaucoup de sympathie pour ce festival que nous en avions fait le point de départ symbolique de notre cavale il y a trois ans. Encore merci Annie et Stéphane de nous avoir contaminés avec cette fièvre voyageuse ! Nous faisons un petit Skype vidéo avec le festival en direct ce matin devant les 200 spectateurs… Chouette moment. Surprise pour mon papa qui est dans la salle, de même que pour ma nièce qui est en train sans s’en rendre compte, de se laisser contaminer par la même fièvre, mais aussi pour nos amis les BAAM et les A notre tour avec qui nous avons eu la chance de partager un bout de notre cavale en Mongolie, en Chine, au Laos et plus récemment en Zambie et en Namibie.

Nous passons aussi une partie de la matinée à gérer des réservations de billets d’avion pour nous d’ici un bon mois et pour notre famille qui va nous rejoindre un peu plus tard. Mais chut, je ne vous en dis pas plus pour l’instant… Je vous fais juste la confidence qu’on va laisser se reposer la Tiny pendant quelques semaines… et qu’on va lui faire une petite infidélité en partant à quelques milliers de kilomètres en vacances !

Mais pour l’instant, le mode voyage continue et nous roulons vers la Réserve naturelle de Robberg située sur une péninsule à 8 km de Plettenberg Bay. Du parking de l’entrée du parc, dans lequel nous entrons aussi avec la Wild Card, nous avons déjà une magnifique vue, d’un côté sur la longue plage de 5 km menant à l’endroit où on a bivouaqué hier soir et de l’autre côté sur la péninsule de Nelson Bay. Nous nous sentons aujourd’hui en pleine forme et avons hâte d’aller marcher.

Nous partons pour une randonnée d’une dizaine de kilomètres sans savoir qu’elle sera l’une des plus belles d’Afrique du Sud pour le moment. Aussitôt, nous tombons sous le charme des paysages de ce merveilleux endroit, des criques de sable blanc, de ses dunes vertigineuses, de cette végétation unique du fynbos du Cap, de ses falaises abruptes… Le sentier longe le littoral féerique, parfois au ras de l’eau, parfois en le surplombant de 120 mètres d’altitude, offrant encore plus une vue imprenable et panoramique sur l’environnement. Il est parfaitement aménagé de belvédères, de passerelles en bois, d’escaliers, de pontons, de garde-corps en inox.

Nous entendons, nous sentons l’odeur et nous voyons des dizaines d’otaries à fourrure du Cap nager dans les eaux turquoises de l’océan et paresser sur les rochers.

Au milieu de la péninsule, nous distinguons le Cape Seal Lighthouse. À 146 mètres d’altitude, c’est le feu de navigation le plus haut de la côte sud-africaine. Son faisceau rotatif à énergie solaire a une portée d’environ 27 km. Il date de 1950.

L’arrivée tout au bout à The Point a vraiment l’air de bout du monde. Les rouleaux déchainés amusent les otaries à fourrure. Nous sommes tous les quatre fascinés par la beauté de cette nature sauvage. Le beau temps aujourd’hui ne fait que sublimer cette magnifique journée.

Les paysages changent de l’autre côté de la péninsule, plus sauvages, et nous marchons sur d’énormes rochers de grès colorés par les lichens orange, notamment autour de Strydom’s Sloop. Nous sommes aussi hypnotisés par la force des vagues s’éclatant avec fracas sur les rochers, créant des gerbes d’eau d’une dizaine de mètres de hauteur et une écume impressionnante se forme à la surface de l’océan.

Sur le chemin du retour, nous traversons l’étonnante dune de sable de Witsand et nous montons faire le tour d’une surprenante presqu’île. Elle aussi est parfaitement aménagée pour en gravir le point le plus haut et en faire le tour.

Retour à la Tiny ravis de cette magnifique et sauvage rando.

Nous revenons en ville et nous traversons des quartiers de villas luxueuses qui sont beaucoup de maisons secondaires des citadins fortunés de Johannesburg ou du Cap. Au bout du quartier et de l’autre côté du petit estuaire où nous avons dormi hier, nous tentons de bivouaquer sur le parking de plage près d’un hôtel chic. On craint de devoir quitter les lieux mais le petit vendeur du food truck du parking où nous nous garons demande au gardien de l’hôtel de veiller sur nous cette nuit. Il vient nous le présenter. Encore un bivouac au ras du sable…

Lundi 11 octobre 2021 :

La nuit a été bruyante mais heureusement, les boules Quies nous ont permis d’atténuer le vacarme des vagues. On ne va pas se plaindre, je vous rassure… Ce bivouac est au top. Réveil 5 étoiles en ce 1100ème jour de voyage autour du monde. Encore une fois ce matin, la délicieuse odeur du pain chaud préparé par Audrey embaume la Tiny.

Les sanitaires de la plage nous permettent de refaire les pleins d’eau de la Tiny, comme nous devons le faire tous les 5 jours environ. Ça peut paraître un détail mais les voyageurs et camping-caristes se reconnaitront, on aime bien avoir nos réserves pleines.

Encore un grand ciel bleu. Au milieu de la matinée, les enfants réclament une petite récréation… Bon d’accord, mais juste 5 minutes le temps qu’on prenne un café et on se remet à l’école.

Nous commandons à manger au food truck voisin des chawarmas et des chicken burgers.

Nous terminons aujourd’hui la portion de route de la Garden Route. Toujours beaucoup de verdure, de forêts, de lagunes. Toujours beaucoup de reliefs dont ceux de la chaine montagneuse du Tsitsikamma culminant à 1751 mètres d’altitude.

Petit arrêt dans un magasin d’artisanat conseillé par notre ami Carle où Audrey achète quelques bouts de tissus imprimés avec des feuilles naturelles de la région.

Premier péage en Afrique du Sud qui nous fait éviter un col (qui de toute manière est fermé) et qui nous fait à Nature’s Valley, franchir le Bloukrans Bridge, le plus grand pont d’Afrique du Sud (451 mètres de longueur avec une seule arche). C’est aussi le quatrième plus haut pont au monde d’où on peut sauter à l’élastique car il surplombe la rivière de 216 mètres ! La rivière Bloukrans marque la frontière entre les provinces du Cap-occidental et du Cap-oriental.

L’énorme feu de forêt qu’on voyait de loin ce matin et dont on s’est rapproché nous fait hésiter à bifurquer au dernier moment vers l’entrée du Parc national de Tsitsikamma. La visibilité est réduite et le ciel bleu a disparu mais les pompiers présents sur le bord de la route ne nous empêchent pas l’accès à cette route en cul-de-sac. Finalement, les vents nous sont favorables.

Ce parc couvre une bande côtière longue de 5 kilomètres sur les 70 km du Parc national de la Garden Route dont il fait partie intégrante. Arrivés au bord de l’océan, nous partons pour une courte balade à travers la forêt en direction de la Storm River. C’est très vert de par les 1400 mm de moyenne de chute de précipitations annuelles. Tsitsikamma veut d’ailleurs dire « endroit plein d’eau » en langue Khoisan (les premiers habitants du secteur).

Nous franchissons la rivière par un pont suspendu de 77 mètres de longueur. Il permet de franchir l’estuaire de la Storm River qui s’écoule dans l’océan entre de magnifiques falaises.

De l’autre côté de l’estuaire, une jolie plage de gros galets ronds fera une halte parfaite pour faire la sieste et des cairns alors qu’Audrey et Anaïs ont de l’énergie, malgré les 27°C pour gravir la montagne pendant quelques centaines de mètres supplémentaires sur le Otter Trail d’où elles ont une vue imprenable sur l’Océan Indien.

Retour à la Tiny en empruntant le même pont de 77 mètres puis deux autres ponts suspendus de 40 et de 50 mètres de longueur.

La journée est déjà bien avancée et nous envisageons d’aller dormir sur le parking de notre visite de demain, the Big Tree. Mais l’endroit fait partie du parc et les gardiens ne peuvent nous laisser entrer sur le parking qui est fermé. Demi-tour, et nous tournons un moment dans le tout petit hameau de Storms River mais impossible de trouver un bivouac convenable. C’est rare mais on tourne en rond. L’endroit repéré sur notre vue satellite ne nous inspire définitivement pas confiance juste à l’entrée d’un township. Un autre endroit repéré est un parking des bureaux des parcs nationaux mais on nous refuse aussi d’y dormir. La toute petite ville n’est qu’une enfilade d’agences de tourisme, d’hôtels devant lesquels il est difficile de s’arrêter pour dormir. Finalement, on cherche un particulier qui accepterait qu’on dorme devant chez lui. On s’engage dans un quartier plus résidentiel et on s’arrête demander au hasard à une femme. Elle accepte aussitôt qu’on se gare sur le large trottoir devant sa maison. Puis Susan revient 10 minutes plus tard en nous ouvrant le portail de son grand jardin pour qu’on s’y gare. Nous échangeons peu car elle semble timide ou très occupée. En tous cas, c’est adorable de sa part de nous accueillir chez elle.

Voilà, nous en avons fini avec la Garden Route qui aurait mérité qu’on y consacre encore plus de temps tellement il y a de possibilités de profiter de ses parcs, de ses randonnées… mais d’autres aventures nous attendent…

Sans transition, petit message à ceux qui ont l’habitude de suivre notre progression en temps réel, notre balise GPS n’émettra plus mais vous pouvez continuer à nous suivre en cliquant sur ce lien de l’application Polarsteps que nous venons de réactiver. L’historique sur le début du voyage n’est pas très précis mais il le sera plus désormais. Il existe aussi une application pour téléphone à télécharger pour ceux qui le souhaitent.