909 km parcourus du 2 au 14 novembre 2021
87 836 km parcourus depuis le départ
Mardi 2 novembre 2021 :
Le réveil est bien matinal. A 3h30, le coq chante. Puis les vaches agitent leurs cloches. Si, si, avec un peu d’imagination, on se croirait en Suisse. Mais nous sommes toujours, même si ce n’est plus pour longtemps, bel et bien en Afrique du Sud dans l’extrême Nord-Est du pays, à seulement une soixantaine de kilomètres à vol d’oiseau du Zimbabwe et du Mozambique. Nous nous sommes arrêtés hier après-midi après notre sortie du Parc National du Kruger dans ce petit village de Saselamani. Le jour se lève à 4h30. A 7h00, dès que nous ouvrons les rideaux, nous recevons des bonjours chaleureux des femmes déjà assises devant leur maison.
Quand le minibus passe chercher la plus jeune des filles de Tiyi pour l’emmener à l’école, les deux jeunes femmes s’occupant de ce transport scolaire descendent tout excitées pour une séance photo avec nous ! Les enfants ont dû être un peu en retard ce matin. Puis nous nous lançons dans une grosse matinée d’école, après une semaine de vacances à observer les lions et les éléphants. A midi, après de chaleureux au revoir, Tiyi, qui a revêtu une belle robe, une perruque comme en porte la plupart des femmes noires, et un grand chapeau, monte avec nous pour quelques kilomètres, jusqu’à la ville la plus proche.
Puis une longue route commence. Quelques centaines de kilomètres à enchainer jusqu’à notre prochaine étape prévue dans le Parc National du Pilanesberg, conseillé par nos amis Ies A Notre tour ainsi que par les Un tour à cinq. Il fait très chaud aujourd’hui. Très très chaud. 42°C à l’ombre mais il n’y a pas d’ombre et au contraire le Soleil tape sur le pare-brise. Les fenêtres sont grandes ouvertes mais il rentre un air chaud même en conduisant. Le thermomètre affiche 46 à 47°C dans la cabine. Heureusement, pour Anaïs et Victor à l’arrière, il ne fait que 39°C et ils arrivent à brasser un peu d’air chaud avec des ventilateurs. Le seul objectif du jour est d’arriver au moins à la ville de Pietersburg qui a comme seul avantage de se trouver à 1300 mètres d’altitude et où il fera quelques degrés de moins. Les paysages sont assez quelconques aujourd’hui. Rien de transcendant à tel point qu’on ne pense même pas à prendre de photos.
Arrivés à Pietersburg, on tourne un peu en rond pour trouver un bivouac. Pas évident car les quartiers vers lesquels on se dirige sont d’immenses zones barricadées et protégées par des hauts murs surélevés de clôtures grillagées et électrifiées qui cachent de cossues villas collées les unes aux autres. Pas moyen d’entrer dans ces quartiers. Autour de ces derniers, ce n’est vraiment pas engageant pour s’arrêter bivouaquer sur ces terrains pollués de déchets. On tourne. Puis dans un lotissement en travaux, nous nous posons sur un terrain vague près d’une maison en construction où le gardien nous dit qu’il ne voit aucun inconvénient à ce qu’on dorme ici. Ce n’est pas beau mais ça paraît bien tranquille, ce qui nous convient parfaitement pour nous poser.
Mercredi 3 novembre 2021 :
La nuit a été reposante avec des températures bien agréables. Que c’est bon de dormir les fenêtres ouvertes et de sentir ce petit air frais pendant qu’on dort ! On adore. Le retour en France va être difficile pour ça. On a perdu l’habitude de dormir entre 4 murs. Et en changeant quasiment chaque soir de bivouac depuis plus de 1100 jours de voyage, combien de fois on ouvre les yeux le matin en se demandant « mais on est où au fait ? »…
Et bien cette fois-ci, on se réveille à Pietersburg rebaptisée en 2003 Polokwane lors du processus d’africanisation des noms de villes d’Afrique du Sud. Pas facile de se repérer d’ailleurs sur les cartes, les GPS et les panneaux qui indiquent donc tous des noms différents.
Le bivouac est certes moche mais tellement calme qu’on décide d’y rester toute la journée. L’école reprend à un bon rythme. On a aussi passé les 8 derniers jours avec un réseau Internet très aléatoire dans le Kruger où on ne pouvait au mieux que récupérer les messages sur nos différentes messageries. On a donc pas mal de choses administratives à régler. La mise en ligne du blog assez complet sur le Kruger me prend du temps mais comme d’habitude, cela reste un immense plaisir de continuer à partager notre aventure, même si parfois je peste après la lenteur du réseau. Mais maintenant, on fait en sorte de se poser dans des endroits où on a un bon réseau 4G voire 4G+ tous les 8 jours environ pour la mise en ligne du blog qui nécessite pour chaque article au moins 3 heures de travail, une fois rédigé le texte et la sélection des photos, qui me prennent environ trois bonnes heures quotidiennes.
On passe aussi la journée devant les écrans à préparer la suite de notre cavale. Notre visa sud-africain expire dans 13 jours et on n’a pas eu le courage de se lancer dans la difficile, onéreuse et incertaine procédure administrative de renouvellement de nos visas pour trois mois de plus. Il nous faut donc quitter le pays mais on ne pourra pas y revenir avant début janvier car on ne peut avoir que trois mois de visa par année civile. Et comme la région va bientôt arriver dans la saison des pluies dans les pays limitrophes où on aurait pu aller (Zimbabwe, Mozambique), on a donc fait le choix de faire un petit saut de quelques milliers de kilomètres en avion et de laisser la Tiny se reposer pendant deux mois. Nous partons donc en vacances dans 11 jours ! chouette mais chut, je vous en dirai plus sur la destination dans le prochain article… si j’arrive à garder le secret d’ici-là !
Il nous faut donc nous poser et passer des heures sur Internet pour préparer ce prochain voyage : location d’appart’, location de voiture, prise de différents rendez-vous, liste de ce qu’on mettra dans nos valises pour deux mois, choix d’un site pour faire garder notre Tiny à Johannesburg, choix d’un site pour faire les tests PCR pour prendre l’avion, etc…
Deuxième bivouac au même endroit.
Jeudi 4 novembre 2021 :
Journée route pour continuer notre avancée vers le Parc de Pilanesberg qui est encore à presque 400 km de route. Une distance impossible à faire à l’heure où nous partons en début d’après-midi. Il nous faudra faire une étape et on ne pourra donc visiter ce parc au mieux que samedi. Or, le week-end, ce parc est pris d’assaut par les gens de la capitale qui viennent changer d’air. Ce ne seront donc pas les conditions idéales pour profiter au mieux des animaux. On décide finalement de prendre notre temps.
La route est comme avant-hier assez monotone. On longe d’immenses propriétés fermées de clôtures grillagées. Ce sont pour la plupart des réserves de chasse privées où de richissimes chasseurs font des heures d’avion depuis la Russie, la Chine, les États-Unis, ou l’Europe et dépensent des fortunes, jusqu’à des milliers d’euros pour venir tuer des antilopes, des phacochères voire des dizaines de milliers d’euros pour abattre à la carabine 375 des buffles, des lions, des léopards, des éléphants, des rhinocéros. Oui, ça existe, ça peut choquer et ça fait froid dans le dos mais la loi autorise la chasse aux trophées dans une vingtaine de pays d’Afrique. Elle autorise à tuer des rhinocéros pour que des chasseurs étrangers ramènent et accrochent à leur cheminée en trophée la tête de l’animal prestigieux. Pour plus de 110 000 euros et quelques euros de plus pour la photo souvenir à côté de la dépouille, on peut tuer un rhinocéros.
Bref, on longe donc ces dizaines de kilomètres de propriétés grillagées de ces luxueux lodges privés. Du coup, il n’y a pas d’espace de bivouac pour nous poser ce soir. C’est sur le parking d’une épicerie que je demande l’hospitalité pour la nuit. La tenancière avec un grand sourire accepte.
Je pars acheter pour la remercier quelques produits. A mon retour, Audrey est en train de faire visiter la Tiny à un Sud Af’. Tristan paraît bien sympathique et semble émerveillé par notre aventure, rêvant lui même de prendre la route avec sa chérie. Il habite à quelques kilomètres de là. Je lui demande si on peut passer le voir dans sa ferme demain. Il ne sait pas car en fait, il vit avec son amie chez la mère de celle-ci mais il promet de m’envoyer un message. En soirée, le message arrive et Tristan nous dit qu’on sera les bienvenus demain !
Vendredi 5 novembre 2021 :
En milieu d’après-midi, nous nous dirigeons vers cette ferme. Mais une fois quittée la lisse route asphaltée, nous nous retrouvons pour une quinzaine de kilomètres sur une piste défoncée. Encore une sacrée tôle ondulée qui n’en finit pas. On roule entre 10 et 15 km/h, avec parfois une pointe à 17 km/h mais qui ne dure pas. Il fait 45°C dans la cabine. C’est infernal. La piste devient plus étroite, et plus sablonneuse. On se demande bien où on va. De part et d’autre de la piste, toujours d’immenses propriétés de chasses privées et aussi quelques fermes où vivent des populations noires locales. La végétation devient plus épaisse et les épines d’acacias griffent les murs et le toit de notre maison.
Nous arrivons à Kromdraai au point GPS convenu avec Tristan et on se retrouve face au portail de la maison de nos hôtes et un panneau pas très engageant nous accueille…
On attend et Tristan, qui était parti à notre rencontre sur la piste car il nous croyait perdus, arrive et nous ouvre la propriété. Sa pétillante amie Keara nous accueille d’un immense sourire. Dès le premier échange de regards, on sait qu’on va passer un bon moment. Ce charmant couple a quitté la trépidante vie de Cape Town pour venir vivre les derniers mois de grossesse de Keara en toute sérénité dans ce cadre paisible. C’est à domicile que Keara donnera naissance dans deux mois à leur premier bébé. Nous partageons quelques boissons fraiches dans la Tiny et Keara et Tristan ont les yeux qui brillent quand on leur raconte notre vie. Eux aussi rêvent d’acheter un van et de voyager en Afrique.
Puis Joan, la maman de Keara nous invite à entrer dans sa jolie maison en plein milieu de la nature. Une maison si reculée de tout, autonome en énergie solaire. Un havre de paix où on se verrait bien vivre. On voit quelques animaux (des nyalas) dans le fond du jardin. Ceux-ci vivent dans un immense espace mais ce sont des animaux d’élevage qui termineront dans l’assiette ou sur le fronton d’une cheminée.
Nous passons une formidable soirée dans cette famille sud-africaine d’origine anglophone. Tristan nous régale d’un délicieux south african chicken stew, un plat de poulet cuisiné au feu de bois. Quel accueil encore une fois ! L’Afrique du Sud, 35ème pays de notre cavale, restera incontestablement LE pays où on aura fait le plus de rencontres. Et ce n’est pas fini, on est encore attendu dans deux autres familles dans quelques jours !
Samedi 6 novembre 2021 :
Matinée école dans la Tiny. Juste quelques nyalas s’en approchant nous distraient un peu et nous obligent à faire quelques récréations. Mais les enfants commencent à avoir l’habitude de voir par la fenêtre pendant l’école des baleines ou des éléphants…
A mon tour de cuisiner aujourd’hui pour nos charmants hôtes qui nous ont gâtés hier. Je prépare un plat mijoté de citrouilles, pommes de terre, champignons, lard. Avec Audrey, nous profitons du four de Joan pour préparer un crumble de pommes. On accompagne le tout d’une bonne bouteille de vin blanc. Keara, Joan et Tristan semblent se régaler. On adore ce partage dans toutes les maisons où nous sommes invités. Le fait d’avoir la Tiny permet d’avoir ce qu’il faut pour cuisiner à nos hôtes des petites recettes qu’ils ne connaissent pas.
Anaïs laisse en souvenir un joli dessin pour le bébé. Elle leur a beaucoup parlé du bébé de sa grande cousine Emilie, qui va bientôt naître en France. Keara et Tristan lui donne un foulard blanc avec des petites girafes à offrir à ce petit bébé dès que nous le verrons. En début d’après-midi, nous reprenons la route ou plutôt la piste. Tristan nous indique une piste un peu meilleure. En fait, elle est juste un peu moins pire. Mais la végétation est bien dense et nous arrivons en plus face à un arbre couché sur la piste. Pas question de faire demi-tour et de se rajouter plus de 5 km de piste défoncée. Je sors la scie sabre sur batterie et en quelques minutes, nous dégageons avec Audrey l’arbre mort. 1h10 après notre départ de la maison de Joan, nous avons parcouru 12 km et nous retrouvons l’asphalte. Ouf.
Nous roulons vers l’Ouest. Il fait encore très chaud. 44°C dans la cabine. Puis le ciel s’obscurcit et devient noir. Arrivés à l’approche d’une ville, je repère une mosquée et on s’y dirige pour demander si on peut dormir sur le parking, mais ce n’est pas possible. Les abords du quartier sont très très glauques. Impossible de s’y arrêter car on ne s’y sent vraiment pas en sécurité et bien qu’on ne soit pas difficile, on ne se voit pas y dormir. Nous décidons de poursuivre un peu malgré le ciel très menaçant et illuminé d’éclairs n’annonçant rien de bon pour la soirée.
Arrivés à Manamakhotheng, un très violent orage accompagné de bourrasques de vent rend dangereuse la poursuite de notre route alors qu’on n’y voit plus rien. Nous nous arrêtons près d’une maison en restauration où John le propriétaire, affolé à ranger tous ses matériaux pour ne pas qu’ils s’envolent, accepte avec un grand sourire qu’on se réfugie sur le parking devant sa maison. Encore un bivouac pas très heureux cette semaine le long de la route mais qui est plus que luxueux pour nous au vu des conditions météorologiques exécrables. Pas facile la vie de nomade !
Au moment de nous endormir, c’est tous les 4, blottis sur notre lit, que nous profitons d’un incroyable spectacle d’éclairs qui percent le ciel. Pendant ces fractions de secondes, il fait plein jour dehors. On a rarement assisté à un tel orage. Déjà hier soir, chez Joan, on a eu un orage très violent, peut-être la conséquence de journées très chaudes. Ça a au moins l’avantage de faire baisser les températures pour la nuit.
Dimanche 7 novembre 2021 :
Encore une journée avec rien de passionnant à vous raconter. Une journée où on patiente que le week-end se termine pour entrer dans le Parc national du Pilanesberg. On en profite pour faire une bonne session d’école, pour continuer à préparer nos vacances qui avancent à grands pas. Dans une semaine, nous serons dans l’avion ! Nous multiplions encore et encore les prises de contacts avec les loueurs de voiture et d’appartements sur place, le gardiennage à Johannesburg de notre Tiny enfin trouvé pour les deux prochains mois, la préparation de nos premiers jours qui vont être dès notre arrivée aussi intenses que dépaysants, ainsi que les échanges avec nos amis qui vont nous accueillir… Et puis toujours et encore un peu d’administratif à régler à distance.
Après quelques courses dans la ville pas très gaie de Manamakhotheng, nous roulons vers l’entrée du parc pour être demain matin prêts à commencer notre game drive. Encore un bivouac juste pratique. Décidément cette semaine, on cumule les endroits pas top pour dormir. Nous sommes sortis de cette ville pas agréable où on ne se sentait pas bivouaquer. Mais là où nous arrivons, juste à la Gate Bakgatla, c’est comme dans beaucoup d’endroits, très sale. Que de déchets plastiques, de bouteilles en verre… encore plus inimaginable juste à l’entrée d’un parc national. Mais c’est ainsi, nous faisons abstraction de cette pollution.
Audrey passe beaucoup de temps dans la préparation des cours de Sciences d’Anaïs. Il lui faut se remettre dans la génétique et le métabolisme des cellules… Elle est bien courageuse de passer des heures à se replonger dans ces cours.
Je remonte sur le toit de la cabine de la Tiny pour consolider une énième fois le support du panneau solaire qui est décidément au bout de sa vie de support de panneau solaire. Les difficiles routes sur lesquelles nous avons emmené la Tiny depuis plus de trois ans l’ont épuisé. Et n’oublions pas qu’en plus des bientôt 90 000 km de notre tour du monde, la Tiny a déjà fait un premier trajet France-Laos avec ses précédents propriétaires, La Cabane en cavale… C’est donc en ajoutant quelques sangles que le support de panneau solaire retrouve un peu de rigidité et devrait arriver à terminer la cavale en cours. Il me faudra le remplacer avant de repartir un jour en cavale…
Lundi 8 novembre 2021 :
Le Parc national du Pilanesberg, d’une superficie de 550 km², n’est pas inclus dans notre carte Wild Card mais l’entrée pour la journée pour nous 4 ne coûte que 25€ et est donc bien loin des tarifs prohibitifs des parcs du Botswana, de Zambie, de Tanzanie ou du Kenya.
Mais nous n’allons pas avoir le même avis, surtout la même chance, que nos amis Isa et Manu qui ont adoré ce parc et y ont passé plusieurs jours. La météo qui était annoncée belle n’est pas une science exacte. C’est sous un crachin qu’on rentre dans le parc. Mais pas envie d’attendre encore une journée le beau temps, sachant que ça fait déjà deux jours qu’on patiente que le week-end se termine pour ne pas qu’il y ait trop de monde. Bon, l’avantage, c’est que nous avons le parc presque que pour nous !
Pas un seul animal durant les 15 premiers kilomètres de pistes détrempées et boueuses de la Dithabaneng. Nous mettons plus de deux heures avant de photographier un troupeau de 5 gnous, au loin.
Quel dommage de ne pouvoir voir les animaux qui sont certainement bien cachés dans la végétation et les broussailles épaisses. Quel dommage aussi de ne pouvoir admirer sous un rayon de soleil ces paysages qui paraissent être les plus beaux de tous les différents parcs qu’on a déjà visités. On avait espoir que le crachin s’arrête. La pluie tombe maintenant fortement. Le Pilanesberg est situé dans le cratère d’un volcan éteint où le Lac Mankwe occupe la cheminée centrale que nous atteignons après quelques kilomètres d’asphalte parcourus sur la Tshwene.
Nous devinons des ravines couvertes de forêts, des terres sauvages, des vallées boisées, des savanes qui ondulent sur les pentes du volcan mais la pluie qui s’installe pour de bon ne nous permet pas d’apprécier à sa juste valeur le charme des lieux. La conduite est très compliquée pour notre volumineuse Tiny surtout sur une des pistes sur laquelle on s’engage qui mériterait un 4×4. Cette Lenong view, m’épuise. Arrivés après cette difficulté non sans mal, nous décidons quand-même de poursuivre sur la Sefara Drive, la Nare Link, la Makorwane puis enfin la Tshukudu e Ntsho Drive.
Bon, c’est décidé, on en a fini pour notre découverte du Pilanesberg. Je n’ai plus de forces pour conduire. Je suis trop concentré sur l’état de la piste, certainement bien dégradée par les pluies des violents orages des jours précédents, et je ne profite pas des rares animaux qu’Audrey et les enfants débusquent dans la végétation.
Je m’affale dans mon lit sur le parking du centre des visiteurs pendant qu’Audrey nous prépare à manger pour reprendre des forces.
Le temps est un tout petit peu plus lumineux mais la fine pluie est toujours là. Nous avons un mal fou à photographier les animaux. Et dire qu’il y a environ 10 000 prédateurs, charognards et ruminants ici et que les Big Five sont présents… Entre les gouttes de pluie, nous distinguons quand même des cobes à croissants, des girafes, des gnous, des bubales roux, des hippopotames, des éléphants et quelques impalas.
Mais alors que nous nous dirigeons vers la sortie, nous avons la chance d’observer de très près trois superbes rhinocéros blancs. Je vous en avais parlé dans mon précédent article sur le Kruger, mais on en avait vus de vraiment très loin, aux jumelles, et encore on avait eu du mal à distinguer si c’était des rhinos noirs ou blancs. Cette fois, pas de doute, ils sont en train de brouter l’herbe à dix mètres de nous avec leur large bouche, signe distinctif avec leurs cousins noirs. Joli moment qui restera LE bon souvenir de notre journée.
Tant pis et dommage pour le Parc du Pilanesberg que nous n’aurons pas vraiment apprécié comme on aurait pu le faire avec un joli ciel bleu. C’est extrêmement rare que nous ne profitions pas d’une visite mais cette fois les conditions n’étaient pas de notre côté. Nous sortons par la Bakubung Gate au Sud du parc.
Pas trop d’énergie pour rouler longtemps. Et puis pas trop envie de s’approcher trop vite de la capitale, notre prochaine étape, où on aura peut-être plus de mal à trouver un endroit comme on aime les trouver, en pleine nature. Encore un. Encore un bivouac sur un parking pas très heureux pour passer la fin d’après-midi. Mais le personnel du parc d’attraction Sun City accepte qu’on dorme sur un parking non loin de la porte d’entrée.
Mardi 9 novembre 2021 :
Route dans l’après-midi vers la capitale administrative d’Afrique du sud, Pretoria. Bloemfontein est la capitale judicaire du pays. Le Cap est la capitale législative. Arrivant par le Nord, nous ne nous rendons pas compte de l’étendue de l’immense agglomération qu’elle forme avec sa voisine Johannesburg. Avec ses 12 millions d’habitants, il s’agit de l’une des six plus grandes d’Afrique et se classe parmi les 30 plus grandes régions métropolitaines du monde.
Nous avons rendez-vous (encore !) avec une famille de Sud-Africains. Souvenez-vous, il y a plus de 5 mois, Anaïs et Victor étaient partis faire le tour de camping à Etosha en Namibie pour aller vendre leurs créations artisanales en bois et en fil de cuivre. Depuis, Anaïs continuait d’échanger par WhatsApp avec Mariana et Georges qui leur avaient acheté des petites choses et qui nous avaient invités à passer les voir, à 1500 km à vol d’oiseau d’Etosha. Nous voici donc de nouveau très honorés et très chanceux de pouvoir être accueillis dans une famille. Une famille de chaleureux Afrikaners de nouveau.
Nous faisons connaissance avec Mariana et Georges et deux de leurs enfants, Jaime et Darren, ainsi qu’avec un de leurs amis qu’ils ont invités pour nous rencontrer. Nous nous délectons de son récit de photographe animalier et de son extraordinaire proximité avec des léopards. Puis, étant propriétaires de plusieurs restaurants en Afrique du Sud, Mariana et Georges nous invitent dans l’un d’eux. Pas moyen de payer quoi que ce soit, nous sommes invités à choisir ce que l’on veut sur la carte ! Quelle belle soirée avec cette famille plus que généreuse et accueillante…
La discussion tourne en partie autour des animaux. Et moi qui pensait avoir pris beaucoup de photos avec mes 2355 clichés à Etosha, Georges passionné de safari-photo est revenu de ses 6 semaines dans le parc avec 77 000 photos ! Il nous en montre quelques-unes qui sont impressionnantes de beauté et de détails. Jaime, leur fils, est passionné de safari de chasse et est d’ailleurs un chasseur professionnel qui organisait et accompagnait dans son ancien travail des groupes de riches touristes dont je vous parlais il y a peu et qui viennent chasser les Big Five en Afrique du Sud. Lui aussi nous montre des photos devant ses trophées de rhinos, de léopards, de lions, de buffles mais aussi d’hippopotames, de girafes, de gnous… On reste plus circonspects devant ces photos mais celles-ci confirment bien ce que je vous expliquais précédemment, que des Américains entre autres viennent dépenser des dizaines de milliers de dollars américains pour abattre un rhino. Je lui demande si la viande est bonne mais il ne sait pas trop car ces animaux classés pour la plupart comme vulnérables, sont abattus « juste » pour la photo du trophée. Les richissimes clients doivent encore payer des milliers de dollars pour faire intervenir un taxidermiste et payer les taxes et le transport pour ensuite accrocher le trophée sur la hotte de leur cheminée. Cela fait aussi partie de l’Afrique du Sud. On comprend mieux ce qui se passe derrière ces kilomètres de clôtures grillagées et électrifiées qu’on suit depuis qu’on est sur ce continent. Espérons au moins, si l’on en croit certaines lectures qu’on a pu faire, que tout cet argent contribue bien à protéger des espèces menacées, à financer des campagnes anti-braconnage et à dynamiser l’économie locale. Mais tout n’est pas clair et certaines études laissent penser que la majorité de l’argent revient plus au gouvernement ainsi qu’aux compagnies privées organisant les safaris de chasse plutôt qu’aux populations locales. Il y aurait une vingtaine de permis de chasser le rhino délivrés légalement par an en Afrique du Sud mais le braconnage sévit toujours. Durant les 6 premiers mois de l’année, 250 rhinocéros auraient été abattus illégalement selon le ministère de l’environnement. Même dans l’espace censé être protégé du Parc du Kruger où nous étions la semaine dernière, la population de rhino a baissé de 70% au cours de la dernière décennie.
Nous parlons aussi des difficultés que les habitants rencontrent en Afrique du Sud depuis des décennies. Outre les problèmes d’insécurité, il y a d’énormes problèmes d’approvisionnement en électricité. On a pu le constater encore il y a quelques jours en entrant dans un grand centre commercial tout noir en panne d’électricité. Encore tout à l’heure en venant au restaurant, on arrive à un grand carrefour sur un périphérique en pleine capitale, où les feux de signalisation sont en panne. Couramment, on n’a plus de réseau téléphonique car les relais ne sont plus alimentés en électricité. En plein repas ce soir, le resto se retrouve quelques instants tout noir le temps que le générateur diesel prenne le relais de l’alimentation électrique. L’Afrique du Sud doit rationner sa consommation d’électricité en raison d’un manque d’entretien du réseau, de stocks de charbon non protégés et non utilisables quand il pleut, de centrales très vieilles et manquant d’entretien. Beaucoup de maisons où nous passons sont équipées de production d’énergie autonome pour pallier à ces coupures régulières.
Bref, nous passons une belle soirée avec cette adorable famille. On a beau ne pas partager tous les points de vue, notamment sur la chasse, mais c’est aussi cela la richesse de la vie et d’un voyage comme le nôtre, celui de rencontrer des personnes fières de leur pays, de leurs cultures, de leurs passions. Merci Mariana, Georges et Jaime pour ce partage.
Mercredi 10 novembre 2011 :
Nos hôtes nous gâtent de nouveau de délicates attentions ce matin. Un plateau avec deux cafés et des rusks nous est amené à la Tiny pendant l’école.
Nous sommes garés dans le joli parc paysager de cette magnifique propriété. Malheureusement, Mariana et Georges vont en être expropriés l’an prochain et la maison va être abattue et le magnifique parc paysager va être rasé pour laisser place à des immeubles résidentiels.
L’après-midi, Mariana et Jaime nous emmènent gentiment visiter deux monuments emblématiques de la capitale d’Afrique du Sud. Le premier Union Buildings, situé au sommet de la colline de Meintjies, est le siège du gouvernement et abrite les bureaux du président de l’Afrique du Sud. Construit en grès rouge, il est très imposant avec ses 275 mètres de long. Dans les jardins du Parc Louis Botha en contrebas d’où nous avons une vue panoramique sur la ville, une statue de Nelson Mandela de 9 mètres a été érigée en 2013.
Puis nous traversons la ville pour nous rendre au Voortrekker Monument qui rend hommage à l’épique exode des Boers. Quelques précisions : Les Boers sont les pionniers blancs d’Afrique du Sud arrivés dans la région du Cap au 17ème siècle, originaires, pour la plupart, des régions néerlandophones d’Europe, mais venant aussi d’Allemagne et de France. Les Voortrekkers (« ceux qui vont de l’avant » en néerlandais) sont les Boers qui ont participé au Grand Trek (Grande Migration) entre 1835 et 1852 en Afrique du Sud. En 1834, l’esclavage fut aboli dans tout l’empire britannique. Cette décision fut très impopulaire chez les Boers, et elle devint la cause d’un grand mécontentement. Désabusés, et en réaction à la politique des autorités coloniales britanniques, environ 20 000 Boers partirent du Cap (colonie britannique depuis 1806) pour s’installer à l’intérieur des terres à la recherche de liberté, d’autonomie et d’auto-détermination. La plupart d’entre eux s’installèrent dans les régions du centre ou du nord-est. Là-bas, le roi zoulou, Dingane, s’inquiéta de voir arriver autant de colons. Il massacra un groupe et tendit une embuscade pour barrer la route des Voortrekkers à un autre groupe avant d’être vaincu lors de la bataille de Bloodriver, le 16 décembre 1838. La poignée de Voortrekkers vainquit les 12 à 15 000 guerriers zoulous dont plus de 3000 périrent. Seuls trois Voortrekkers furent blessés.
Peu après, les Britanniques annexèrent ce que les Boers appelaient la Natalia, les forçant à migrer à nouveau vers les régions qui allaient devenir les républiques boers du Transvaal et de l’État libre d’Orange. La migration s’était terminée avec les créations des républiques boers au Transvaal en 1852 et dans l’État libre d’Orange en 1854. C’est ainsi que furent dessinées les frontières de l’Afrique du Sud d’aujourd’hui. Les Voortrekkers vécurent en grande partie dans l’isolement et dépendaient de la nature pour leur subsistance. Mais une nouvelle guerre éclata contre les Anglais en 1899.
Nous visitons donc ce monument de style Art-déco, symbole du nationalisme afrikaner, dont nos hôtes sont de fervents partisans. Il se dresse depuis 1949 sur une colline au Sud de Pretoria. Il est aujourd’hui le monument le plus visité de la province du Gauteng et l’un des 10 sites culturels et historiques majeurs du pays. Ce monument imposant de granit de plus de 60 mètres de hauteur est entouré à l’extérieur par un cercle en bas-relief de 64 chars à bœufs en granit et en marbre, symbole de la migration des familles à travers le pays. Pendant les attaques, les Voortrekkers pour se protéger, étaient mis en cercle avec leurs chars à bœufs. Aux coins du bâtiment, il y quatre statues des leaders boers, plus une cinquième représentant une femme boer avec ses deux enfants.
À l’intérieur, une immense frise en granit retrace l’épopée héroïque des Voortrekkers en 29 bas-reliefs. Elle mesure 92 mètres de long sur 2,30 mètres de hauteur et a un poids de 180 tonnes. C’est la plus grande frise en marbre au monde, 20 mètres de plus que celle du Parthénon sur l’Acropole d’Athènes.
Au sous-sol, un cénotaphe (tombeau symbolique sans restes humains) est illuminé à midi par la lumière naturelle du Soleil tous les 16 décembre (date de la bataille de Bloodriver), grâce à un puits de lumière creusé au sommet de la coupole plusieurs dizaines de mètres au-dessus. C’est du haut de cette coupole où nous montons en ascenseur que nous prenons conscience du gigantisme de ce monument.
Superbe vue sur la capitale et sur l’extérieur du monument.
Au sous-sol, intéressant musée qui vient compléter la visite.
Retour chez nos hôtes qui nous régalent ce soir d’un délicieux braai. Le tout accompagné de salades et de bonnes bouteilles de vin. Ce soir, Melissa, la fiancée de Jaime nous a rejoint.
Jeudi 11 novembre 2021 :
Mariana est toujours aux petits soins pour nous et a aussi pris d’affection nos enfants qu’elle emmène après l’école dans une boutique d’arts créatifs. On profite de sa salle de bains, de la machine à laver… Mariana et Georges nous proposent même de prendre soin de notre Tiny à partir de dimanche pendant toute la durée de nos prochaines vacances. Quelle gentillesse ! Au dernier moment, je décommande donc le gardiennage qu’on avait réservé et qui nous attend après-demain. Je m’attends à une réponse pas très sympa de leur part, ce que j’aurais bien entendu compris, mais en fait je reçois un message comme quoi nous serons toujours les bienvenus chez eux et qu’ils nous invitent à partager un café ou à nous offrir une nuit dans leur camping. C’est incroyable la gentillesse de ces Sud-Africains.
Nous répondons aujourd’hui à une nouvelle invitation, oui encore une ! Cette fois, nous sommes accueillis à l’Est de la capitale par un couple qu’on avait rencontré lors de notre entrée en Afrique du Sud il y a trois mois. On avait échangé quelques mots sur le parking d’une église et le lendemain matin, Élisabeth et Mathieu étaient revenus nous saluer et nous inviter à passer les rencontrer à Pretoria. Élisabeth est d’origine Suisse et Mathieu est né en France mais ils vivent en Afrique du Sud depuis 1999. Quel bonheur de partager cette soirée avec ce couple et leur fille Patricia, si jovial, si épanoui dans leur vie, si passionné par leurs hobbies, si curieux de notre aventure ! C’est aussi sympa de passer une soirée à parler dans notre langue maternelle. On a eu beau bien progresser en anglais depuis le début de notre voyage, cela nous demande toujours plus d’attention et de concentration de parler plusieurs heures consécutives en anglais.
C’est devant chez eux que nous passons la nuit.
Vendredi 12 novembre 2021 :
Élisabeth est partie travailler mais c’est un délice ce matin de nouveau de discuter autour d’un café avec Mathieu dans la Tiny. Les viennoiseries qu’il nous offre sont un pur délice, les meilleures qu’on ait mangées depuis des mois et des mois ! On aime tant échanger avec ses personnes qui malgré la soixantaine d’années et une vie confortable dans une belle maison dans un beau quartier de Pretoria sont prêtes à tout lâcher pour aller vivre dans une ferme à la campagne à l’autre bout du pays, en pleine nature, à cultiver leurs fruits et légumes. Mathieu avec son accent alsacien est tellement passionnant à écouter ! Il est très curieux de notre voyage et apprécie voir quelques photos de la Mongolie. Quelle richesse ce voyage nous apporte, que c’est captivant de rencontrer tant de personnes différentes dans notre cavale ! Merci la vie.
L’accent suisse d’Élisabeth est tout aussi agréable à écouter à son retour du travail. Finalement, nous prolongeons le plaisir en passant une soirée de plus avec nos hôtes. Anaïs et Victor profitent de la piscine car il fait très chaud aujourd’hui.
Encore une belle soirée où ce soir, c’est nous qui régalons Élisabeth et Mathieu.
Samedi 13 novembre 2021 :
Nous roulons un peu vers le Sud pour aller effectuer nos tests antigéniques indispensables pour embarquer demain dans l’avion. Ceux-ci sont moins chers que les tests PCR et on reçoit le résultat en quelques minutes par WhatsApp. Ouf, cette fois, ils sont tous les 4 négatifs !
Nous sommes ravis de voir quelques instants Gerhard chez qui nous avions été invités il y a une quinzaine de jours à Komatipoort. Il est de passage à la capitale et nous partageons un café ensemble dans la Tiny.
Puis dernière étape à une quarantaine de kilomètres pour aller garer la Tiny pour les deux prochains mois chez Mariana et Georges qui nous ont proposé de veiller dessus durant notre absence. C’est en toute sérénité que nous la laissons. Le sympathique jardinier Temba qui vit sur place jettera aussi un œil dessus. Georges démarrera le moteur de temps en temps.
Vient maintenant le moment de préparer nos bagages. Ce que nous n’avons pas l’habitude de faire car cela ne nous arrive qu’exceptionnellement de nous séparer de notre bébé. Il faut donc préparer affaires scolaires, pharmacie, vêtements… Quelques heures et machines à laver plus tard, tout est fin prêt. L’excitation est à son comble !
Nous passons à table et Mariana et Georges, et leur fils Darren, nous régalent d’un Potjiekos. C’est un plat traditionnel en Afrique du Sud importé par les Hollandais au 17ème siècle. On a déjà eu l’occasion d’en déguster un dans une autre famille mais celui-ci avait été cuisiné dans une grosse marmite en fonte sur le feu de bois. Aujourd’hui, chacun de nous a un petit faitout individuel et nous faisons mijoter à feu doux notre ragout : oignons, ail, pommes de terre, carottes, potirons, choux-fleurs, champignons, choux, courgettes, haricots et différents types de viandes rouges et blanches… le tout accompagné de riz et de différentes sauces et épices et bien entendu de beaucoup de vin ! Quelle agréable soirée, encore une fois avec nos si accueillants et généreux hôtes.
Dimanche 14 novembre 2021 :
Ce sont les séparations avec notre Tiny. Nous sommes excités de partir en avion mais aussi tristes de laisser notre bébé, notre cocon, notre protection, notre coquille d’escargot. Aussi tristes de laisser cette jolie famille qui a pris soin de nous mais nous nous reverrons tous bientôt le 19 janvier.
L’aéroport international O-R-Tambo de Johannesburg est loin à 60 km mais nos hôtes nous accompagnent jusque dans Pretoria et nous faisons la deuxième moitié du parcours en taxi. Les formalités d’enregistrement et d’embarquement se passent bien. Nous devons présenter le résultat de nos tests Covid à maintes reprises. Après quasi 3 mois de présence en Afrique du Sud, nous quittons ce pays qui nous a enchantés, surtout pour ses rencontres, mais ça vous l’avez compris ! Nous embarquons et nous décollons à 14h45 à bord d’un Airbus A220-300. C’est parti pour 2863 km et 3h47 de vol !