630 km parcourus du 12 au 25 janvier 2020

47 455 km parcourus depuis le départ

Dimanche 12 janvier 2020 :

Nous venons peut-être de passer notre dernière nuit au Cambodge. Une longue étape d’au moins 280 km est prévue (du moins espérée) aujourd’hui pour nous approcher au maximum et si possible rejoindre la frontière de la Thaïlande. Dès 7h50, la Tiny roule déjà et commence par parcourir les 10 premiers kilomètres sur une piste séparant La Plantation (où nous avons fait la passionnante visite de la culture de poivre) du grand axe routier de la RN48 qui suit en partie le littoral du Golfe de Thaïlande.

La route est finalement très correcte et nous avançons à une bonne moyenne kilométrique. Les enfants patientent tranquillement. Ils savent que ces journées entières consacrées à la route ne sont pas très agréables mais attendent gentiment que les kilomètres défilent. Pas toujours plaisant quand la route est rebondissante, que la poussière entre dans la Tiny et qu’il fait super chaud à l’arrière. Mais ils regardent par la fenêtre, lisent, jouent à Minecraft sur l’ordinateur, passe de temps en temps entre Audrey et moi sur le troisième siège devant, ramassent les objets qui tombent quand j’ai pris un peu trop fort un ralentisseur ou vu au dernier moment un trou…

La route traverse quelques villages, frôle la ville de Sihanoukville, et est bordée par endroit d’hectares de plantations de palmiers cultivées pour la décriée huile de palme.

Petite parenthèse d’ailleurs à ce sujet. Pas moyen de trouver pour la cuisine dans les petits magasins d’huile de tournesol ou autre. Il n’y a que de l’huile de palme. Il faut aller dans les plus grands magasins pour trouver plus de variétés. Les très rares huiles d’olives, quand il y en a font partie des produits de luxe à plus de 10€ la petite bouteille. Le beurre est tout aussi rare et très cher. Autre produit cher dans les supermarchés : le lait que l’on paye jusqu’à 2€ le litre, ou la farine (qu’on utilise quotidiennement pour le pain) que l’on a payé jusqu’à 3€ le kg…

Revenons-en à la route. Pour la première fois depuis que nous sommes au Cambodge, nous voyons quelques reliefs m’obligeant à rétrograder de deux rapports pour monter certaines côtes. C’est boisé et agréable. Puis nous redescendons au niveau de la mer et du large estuaire de la rivière Meteuk bordée de mangroves et de palmiers.

Début d’après-midi, la frontière devient atteignable aujourd’hui, et ça c’est cool. Comme on vous l’a déjà dit, elle nous fait stresser car officiellement, la Thaïlande interdit aux camping-cars l’accès à son territoire. Mais nombre de voyageurs nous ont devancés cette année et ont réussi à passer, et en particulier, les Un instant de vie et les PLEM, à cette même frontière de Koh Kong. On croise les doigts car il ne faut pas qu’on nous refoule car on a un rendez-vous à l’aéroport de Bangkok dans moins de 15 jours…

Côté Cambodge, la sortie se passe très facilement. Juste un peu d’attente aux bureaux d’immigration où un panneau affiche clairement « nothing to pay here ». Cool, la corruption semble être contrôlée ici. Ce qui n’était pas le cas de la frontière par laquelle nous étions entrés sur le territoire Khmer. Nous traversons la rue pour aller au bureau des Customs qui s’occupe des importations temporaires des véhicules. Le douanier jette un œil rapidement à notre TIP, juste en vérifiant qu’on n’ait pas dépassé la date limite d’importation et que nous sortons du territoire par le bon poste de frontière que nous avions indiqué en entrant, le conserve et nous fait signe d’avancer.

La barrière se lève et nous entrons dans le no man’s land. L’arrivée côté thaïlandais est un peu plus brouillon car il y a beaucoup de monde mais rapidement, du personnel vêtu de gilets jaunes, souriant et parlant anglais, nous indique où nous rendre. Sur les bons conseils de nos amis voyageurs, j’ai imprimé ce matin les formulaires TM2 et TM3 que j’ai rempli avec des informations administratives sur la Tiny et ses passagers. L’immigration se passe vite et après avoir rempli les traditionnelles arrival cards avec tous les numéros de passeports, lieux et dates d’émission et de validité que nous connaissons désormais par cœur, le coup de tampon d’entrée en Thaïlande est apposé à côté du visa que nous avions pris à Phnom-Penh. A présent, direction les Customs. Je donne notre Carnet de Passage en Douanes pour la deuxième fois depuis le départ. Il est obligatoire pour certains pays que nous avons également traversés comme l’Iran, et comme d’autres pays qui seront sur notre route plus tard : l’Inde, le Népal, l’Égypte, le Soudan. Nous avons versé une grosse caution avant notre départ à l’Automobile Club de France, qui s’engage à la restituer au pays demandeur si jamais nous ne ressortions pas le véhicule de ce pays. Il va d’ailleurs falloir que l’on commande un nouveau CPD car il se périme le mois prochain. Et nous en aurons besoin pour entrer au Myanmar et dans les pays suivants.

Le douanier me prépare le TIP, titre d’importation temporaire nous autorisant à circuler en légalité dans le pays. J’attends mais il tape avec un seul doigt sur son clavier. Le papier sort finalement à l’imprimante. Tout en le signant, je regarde ce qu’il a marqué dessus et m’aperçois qu’il a indiqué en propriétaire de la Tiny, François de La Cabane en cavale, l’ancien titulaire de la carte grise qui était déjà venu en Thaïlande avec en 2013. Le douanier a juste entré la plaque d’immatriculation dans son logiciel sans vérifier le nom du proprio (la même erreur s’était déjà produite lors de notre entrée en Turquie). C’est reparti pour un deuxième papier à préparer mais cette fois c’est encore beaucoup plus long car il doit entrer mon nom et mon prénom dans son logiciel. Je vous rappelle qu’il tape avec un seul doigt. Le papier sort à l’imprimante. Tout en le signant, je m’aperçois qu’il a édité un TIP avec une validité de 30 jours alors que j’ai un visa de 60 jours. C’est reparti pour un troisième essai, toujours avec un seul doigt…

L’assurance qu’il est obligatoire de présenter ne nous est pas demandée, contrairement à nos amis passés il y a peu de temps. Nous l’avions achetée par anticipation en octobre dernier lors de notre passage à Vientiane (chez Allianz) au Laos. Car à priori, on ne peut pas l’acheter à cette frontière.

C’est bon, nous voilà soulagés. La barrière de la Thaïlande s’ouvre ! Finalement, cette entrée qui nous a autant fait stresser que l’incertaine entrée au Turkménistan ou en Chine, s’est passée super facilement en à peine 1h30, sans corruption et sans avoir à discuter. La Thaïlande est déjà le 20ème pays de notre tour du monde commencé il y a 462 jours… déjà bientôt le milieu de nos 3 ans ! Mais déjà que de chemin parcouru, de rencontres, de galères, d’émerveillement, de doutes, d’imprévus, de joies et encore combien devant nous ! Cette magie du voyage, sans savoir de quoi le lendemain est fait, est notre adrénaline. C’est excitant.

Les zones frontalières ne sont jamais agréables et n’incitent pas à s’y poser. La ville de Hat Lek confirme la règle. Juste quelques instants pour faire du change de monnaie. Ici, ce sont des Baths au taux officiel de 1€ pour 33,73 THB. Les changes à la frontière sont rarement avantageux mais le premier distributeur de billets est à 90 km. J’accepte donc la commission de 4 % que la petite dame se prend pour me changer un billet de 100 dollars.

Gros avantage retrouvé dans ce pays : les paiements en carte bancaire. Il y a des mois qu’on n’a pas pu payer nos pleins de gasoil ou au supermarché ainsi, nous obligeant à avoir beaucoup de liquide sur nous. Et malgré nos banques en ligne, nous avons quand-même des frais fixes de retraits imposés par les banques locales pouvant aller jusqu’à plusieurs euros par retrait, ces derniers étant de plus limités à 100 ou 200€ nous obligeant à faire plusieurs opérations. Bon l’avantage d’être clients chez N26 et Boursorama, est que nous n’avons pas en plus de frais bancaires en France qui s’ajoutent à ces frais locaux.

Pas besoin d’acheter une carte SIM car notre opérateur français Free couvre la Thaïlande.

Nous ne changeons pas d’heure, car nous sommes sur le même fuseau horaire sur toute l’Asie du Sud-Est, à savoir toujours 6 heures de moins qu’en France. Par contre nous changeons de calendrier. En effet, depuis 1912, la Thaïlande compte les années depuis le Parinirvana, c’est-à-dire la mort de Bouddha. L’année 0 correspond donc à 545 av. J.-C. Jusqu’en 2483 (1940), l’année commençait au 1er mars. Mais l’année 2483 a été amputée de 3 mois, de sorte qu’à partir de 2484, l’année thaïlandaise commence le 1er janvier. Vous suivez toujours ? Pour convertir une date du calendrier thaï vers le calendrier grégorien, il faut soustraire 543. Bref, nous sommes en 2563.

Nous roulons sur une très étroite bande terrestre de quelques centaines de mètres de largeur séparant le littoral d’un petit massif montagneux marquant la frontière avec le Cambodge, le tout sur plus de 50 km de longueur. Du coup, très peu de circulation et d’habitation mais une large quatre-voies bien entretenue bien que nous soyons dans un recoin de la Thaïlande. C’est prometteur pour le reste du pays. C’est quand-même agréable de rouler sur du velours ! Nous apprenons à rouler à gauche car en Thaïlande, on roule… à gauche.

Sur les excellents conseils de voyageurs très avertis, les Exploracy, notre bivouac du jour (et sans le savoir, des prochains jours…) se porte sur la plage de Ratchakarun. L’endroit est situé autour d’une base militaire de la Croix Rouge. Un gentil militaire nous fait signe de passer malgré la barrière. Une longue plage de sable blanc de plus d’un kilomètre ombragée, quasiment sans personne dessus s’offre à nous…

Je me gare et mets un pied à terre pour vite m’empresser de tester la température de l’eau. Mais quelques amis en train de boire un coup dans une gargote me font signe d’avancer vers eux en me tendant un verre de bière. Comment refuser une telle hospitalité… A défaut de celle de l’eau du Golfe de Thaïlande, c’est donc la température de la bière que je vais tester. Ah oui, je ne vous l’ai pas dit mais en Asie du Sud-Est, la bière se boit avec des glaçons dans le verre. La sympathique discussion est assez vite limitée en anglais mais nous arrivons quand-même à échanger un peu. Audrey s’approche en répondant à la même invitation, à laquelle je n’ai pu ni eu envie d’éviter. Comme c’était la fête des enfants ces jours-ci, un des militaires s’empresse d’aller à la supérette pour offrir à Anaïs et Victor un sac avec des produits alimentaires dont des boîtes de conserves d’œufs durs ! Finalement, les heures passent et nos enfants, qui reviennent de la plage, sont également invités pour célébrer l’anniversaire d’un de ces militaires. Crevettes, calamars, riz et bières à profusion sont apportés à table. Quelle entrée en matière pour la Thaïlande ! Merci à Dang, Rom, Paik, Apichat et Vichuen pour leur accueil ! Bien entendu, en fin de soirée, j’ai voulu participer à l’addition mais je me suis vite vu amener à ranger mon porte-monnaie, me faisant rappeler que nous étions leurs invités…

Lundi 13 janvier 2020 :

Et bien, on resterait bien une journée ici sans bouger. Bien que le début de nuit ait été un peu bruyant en raison de l’anniversaire de notre nouvel ami Vichuen, le bivouac est sacrément classe. Du sable blanc et incroyablement fin, des balançoires, un support naturel en bois échoué qui nous permet de réaliser le défi du mois de janvier avec facilité (et talent)…

Ah oui, on parlait hier de la température de l’eau… Vous voulez vraiment savoir ? Elle est à la même température que celle de l’air, soit pas loin de 30°C. C’est bien la première fois qu’on se baigne dans une eau aussi chaude. Presque pas assez rafraîchissante, non je rigole… Mai ce n’est pas totalement faux !

L’ombre est parfaite pour garder la Tiny un peu au frais. Nous pouvons le faire car nous avons réussi à nous brancher sur le 220V afin de charger les batteries bien mises à contribution par le frigo et les ordinateurs qui pompent beaucoup dessus quand il fait plus de 30°C. Les ordinateurs alors qu’on est sur un plage de rêve ? Et bien oui, alors que les enfants, une fois en récréation après leur matinée d’école, jouent sur la plage, nous travaillons à fond sur la suite de l’itinéraire.

D’une part, il nous faut constituer ou trouver un convoi déjà existant, pour traverser dans deux mois le Myanmar (Birmanie). Ce pays ne peut se visiter avec un véhicule étranger qu’avec une agence officielle et accompagné d’un guide, comme la Chine ou le Vietnam, bien que nous ayons réussi à nous dispenser du guide durant notre mois passé au Vietnam. Ceci a évidemment un coût non négligeable car en plus, nous avons l’obligation de dormir dans des hôtels. Les traversées se font en minimum 6 jours, mais nous avions décidé de traverser ce petit pays en 10 jours pour pouvoir au moins visiter les sites principaux. Depuis plusieurs semaines, j’effectue des devis avec différentes agences. Mais nous avons du mal à trouver un groupe déjà existant. Nos amis avec qui nous avons déjà traversé la Chine, soit repartent en France en bateau depuis la Malaisie (bien que les prix de shipping pour eux aient doublés du jour au lendemain en raison du conflit dans le Golfe, passant à plus de 11 000€), soit traversent le Myanmar en février. Nous nous voyons donc devoir traverser seuls et assumer entièrement le coût du guide de 1700€. Ce qui est énorme pour notre budget pour seulement 10 jours de voyage. Finalement, nos amis les BAAM nous mettent en relation avec un couple de roumains que nous avions déjà rencontré en Iran l’an dernier. Ils cherchent aussi à traverser le Myanmar. J’entre en contact avec eux et m’annoncent que leur convoi de déjà 4 véhicules entre au Myanmar le 10 mars. Pile poil pour nous car notre visa thaï expire le lendemain ! Un désistement d’un des 4 véhicules engagés nous permet in extremis de nous joindre à ce convoi composé de la famille de roumains (Roxana, Adrian et leurs deux petites filles), d’un couple de français (Sidonie et Sylvain) et d’un motard australien (Stuart). Un cinquième véhicule s’ajoute finalement. Il est conduit par Rada et Henning, un couple d’allemands. Autre chance pour nous, le convoi traversera le pays en 14 jours pour un coût de seulement 450€ auquel on devra ajouter les nuits dans les hôtels. Nous passons donc une partie de notre temps à gérer l’administratif avec l’agence, à regarder plus précisément à l’itinéraire, à échanger avec les autres voyageurs… Le tout, entrecoupé de réguliers plongeons dans l’eau chaude du Golfe de Thaïlande, et de quelques bières fraîches.

Il nous faut également travailler sur la suite de l’itinéraire. Après le Myanmar (du 10 au 24 mars), nous entrerons donc en Inde, puis assez rapidement au Népal (autour du 11 avril). Là également, nous devons un peu anticiper notre parcours et affiner les dates car nous allons encore y avoir de la visite de la famille ! Qui aurait dit qu’on aurait reçu autant de monde pendant ce tour du monde ? Et ce n’est pas fini ! Mais ça, je vous en dirai davantage plus tard… En avril, c’est donc notre neveu Mattéo que nous allons accueillir. Trop hâte. Nous profitons donc également de passer quelques heures à nous occuper de son billet d’avion.

Et après le Népal, nous reviendrons comme prévu en Inde début mai pour y passer tout le mois. Et puis, après c’est là que nous décidons aujourd’hui de changer nos plans qui prévoyaient de traverser le Pakistan, l’Iran, le Sultanat d’Oman, les Émirats Arabes Unis, l’Arabie Saoudite pour rejoindre l’Égypte et descendre toute l’Afrique par l’est du continent jusqu’en Afrique du Sud. Ce dernier aurait marqué la fin de notre voyage à l’été 2021 et nous serions remontés en avion (et la Tiny en bateau) jusqu’en France. Bon, ça, c’était sans compter sur l’escalade récente des tensions entre Donald Trump et ses ennemis du Proche et Moyen Orient. Nous ne savons pas comment vont se passer les prochains mois et ne voulons en aucun cas prendre des risques éventuels en traversant cette grande zone géographique.

Il nous faut prendre la décision cependant assez rapidement pour un éventuel contournement, pour réserver à un prix correct les billets d’avions. Le plan B que nous décidons de choisir, après mûre réflexion, va être de mettre la Tiny sur un bateau entre Bombay (Inde) et Durban (Afrique du Sud) autour du 28 mai. Et nous, nous prendrons l’avion. Ceci a évidement un coût énorme, mais que nous avions anticipé car du coup, nous n’aurons pas le trajet retour dont je vous parlais au début du paragraphe à faire.

L’avantage énorme à ce changement de cap est que nous allons éviter le gros coup de chaleur que nous aurions eu entre mai et septembre où nous aurions eu des températures jusqu’à 45°C autour de la région du Golfe.

L’inconvénient majeur est la prise de risque d’effraction de la Tiny durant le shipping vers l’Afrique australe. Nous en sommes conscients d’autant plus avec ce qui est arrivé récemment à nos amis revenus de Corée vers le Cambodge dont je vous ai déjà parlé, mais prêts à l’accepter. Ça fait partie des prises de risques d’un voyage autour du monde en véhicule.

Du coup, on passe aussi du temps à chercher à entrer en contact avec des voyageurs ayant déjà fait cette traversée. Nous appelons des voyageurs, envoyons plein de mails à des agences et transitaires maritimes. Assez rapidement, grâce à notre important réseau de voyageurs et à certains groupes spécialisés sur Facebook, nous trouvons les coordonnées des bons prestataires que nous contactons.

Puis nous cherchons comment occuper ce temps où nous n’aurons plus notre Tiny qui naviguera pendant 18 à 20 jours, mais ça c’est encore à l’étude…

L’itinéraire va donc être ensuite de remonter tout le continent africain en découvrant une partie des pays suivants, au gré de nos envies : Afrique du Sud, Lesotho, Swaziland, Namibie, Botswana, Zimbabwe, Mozambique, Zambie, Malawi, Tanzanie, Burundi, Rwanda, Kenya, Ouganda, Tanzanie, Éthiopie, Soudan, Égypte où nous arriverions en mai ou juin 2021. Ensuite, on verra les envies, le budget et en supposant un apaisement des tensions au Moyen Orient, pourquoi pas un retour par la péninsule arabique et l’Iran, à moins que nous remontions vers la Jordanie et Israël d’où nous prendrions un bateau pour le sud de l’Europe. Mais bon, c’est encore loin…

Bon voilà pour le point de l’itinéraire. Vite un saut dans l’eau. Un problème majeur et vital vient se greffer. Nous sommes en rupture de stock de bières. Malheureusement, le petit épicier voisin de notre bivouac est dans le même embarras. Il me prête son vélo pour que j’aille en acheter chez son concurrent à l’autre bout de la plage.

Nous passons aussi un peu de temps à passer quelques dernières commandes sur internet que nous faisons livrer chez mes beaux-parents qui arrivent dans quelques jours à Bangkok. Dont un disque de frein de 8 kg… Bon voilà pourquoi on passe beaucoup de temps sur l’ordinateur, en plus du blog et du récurent administratif que nous devons gérer à distance. Finalement la journée passe assez vite… Mais dans un joli cadre !

Mardi 14 janvier 2020 :

Et bien, on resterait bien (encore) une journée (de plus) ici sans bouger. Bon, en fait hier, je vous ai un peu raconté deux journées en une. Je ne vais pas vous faire un copier-coller d’hier ! Si vous n’avez pas suivi, vous remontez de quelques lignes en faisant délicatement glisser la roulette de votre souris vers le haut.

La journée se passe toujours sur notre bivouac de rêve à gérer la suite de notre voyage… et à faire des pauses (à peine) rafraîchissantes dans l’eau translucide. Toujours quasiment personne à l’horizon. Les personnes croisées aujourd’hui se comptent sur les doigts d’une main. Par contre, l’épicier n’a toujours pas eu la bonne idée de refaire son stock de bières, ce qui est dommageable pour son chiffre d’affaire.

Voici le résumé de la journée de Victor qu’il écrit comme tous les jours dans son cahier de bord : « Aujourd’hui, on est encore resté sur la plage ! J’ai joué sur les balançoires, j’ai fait un château de sable, j’ai dessiné ma frise, j’ai fabriqué un labyrinthe, je me suis reposé dans le hamac, je me suis baigné, et j’ai essayé de faire un feu avec le soleil et ma loupe »…

Anaïs, quant à elle, résume sa journée ainsi : « Aujourd’hui, nous sommes restés sur la plage. Nous avons fait école, réalisé le défi du mois. J’ai continué mon Carnet d’Asie, j’ai rangé un peu ma chambre, je me suis baignée et j’ai dessiné un labyrinthe. J’ai aussi fini les 5 premiers tomes de Percy Jackson, dans le hamac »…

Encore ce soir, nous profitons d’un joli coucher de soleil.

Mercredi 15 janvier 2020 :

Et bien, on resterait bien (encore) une journée (de plus) ici sans bouger. Mais non, on n’a plus d’eau et plus de provisions alimentaires. Le petit épicier ne vendant que des produits de survie alimentaire (nouilles chinoises, chips et soda)… On a déjà prolongé hier en faisant manger du salé le matin au petit déj’ des enfants car on n’avait plus que ça mais ça valait bien le coup de manger des nouilles chinoises au lever pour profiter de ce bivouac que nous avons du mal à quitter.

L’eau du robinet sur la plage est trop jaunasse pour remplir nos réservoirs mais largement assez transparente (en fait à peine mais ça ira bien) pour faire la lessive… Un dernier saut dans l’eau, un dernier tour de balançoire et nous prenons la route en début d’après-midi.

Ah oui c’est vrai, on roule à gauche. Prenons la quatre-voies dans le bon sens tant qu’à faire !

Bien qu’on soit encore en zone rurale, on aperçoit déjà de gros changements par rapport au Cambodge. Le niveau de vie semble être beaucoup plus élevé. Les maisons sont plus construites avec des matériaux en dur. Elles sont closes, et souvent bien entretenues. Les déchets semblent nettement moins jetés dans la nature que de l’autre côté de la frontière. Le parc automobile est plus important également et composé de plus de 4×4 et de grosses berlines que de tuk-tuk et de motoculteurs tractant des remorques de marchandises ou de passagers. Autre signe de pays plus développé que ses voisins de la péninsule sud-asiatique, le nombre de personnes en surpoids. La Thaïlande est la deuxième plus grande économie d’Asie du Sud-Est après l’Indonésie. Les régimes alimentaires changent avec l’augmentation des revenus dans les pays en développement. Les populations de cette classe moyenne, avec des revenus un peu meilleurs, passent d’une alimentation à base de céréales à une consommation de graisses, de sucres et de produits animaliers. Le tout combiné à un style de vie urbain avec moins d’exercice physique.

Nous approchons de la ville, la première, Trat. Une ville comme chez nous, avec ses grandes enseignes, et ses centres commerciaux. L’arrêt est indispensable voire vital au supermarché. Deux sont même nécessaires car le premier n’a aucun produit frais. Gros plein de courses à des prix à peine un peu moins cher qu’en France. Je profite du robinet sur le parking qui me permet de repartir avec 200 litres dans mes cuves qui étaient à sec. Ah oui, en parlant de refaire les pleins liquides, j’allais en oublier les bières. Et bien, j’en mets un carton complet dans mon caddie. Arrivés à la caisse, l’employée m’indique que la vente des boissons alcoolisées est autorisée en Thaïlande depuis 2015 que de 11h à 14h et de 17h à minuit chaque jour, sauf dans les aéroports, les bars, les restaurants et lieux de divertissement nocturnes. Diantre. Il va donc falloir faire en sorte de nous approvisionner aux heures autorisées ou bien de sortir en boîte de nuit. C’est quand-même difficile de voyager car cela implique de s’adapter à chaque pays…

Pas grand-chose à faire dans le secteur mis à part quelques îles au large où nous décidons de ne pas aller. Sur cette portion, il n’y a plus de jolies plages. Nous roulons vers le nord, toujours sur cet axe routier en parfait état. Nous bivouaquons sur le parking pas très glamour du Parc National de Namtok Phlio. En espérant que les meutes de chiens hurlant à la mort cessent cette nuit.

Jeudi 16 janvier 2020 :

En début d’après-midi, nous entrons dans le parc national après s’être acquittés de la somme de 18€ tout de même pour nous 4. Le premier aperçu est un peu décevant. On sait que l’accès à la cascade n’est qu’à 10 minutes de l’entrée mais il se fait par un chemin tout asphalté…

Heureusement, un joli sentier aménagé dans la forêt permet de s’en écarter et de profiter d’une jolie végétation tropicale. Très joli mais assez rapide.

De nouveau, nous trouvons des chinois passant des heures à poser pour des selfies, à se filmer pendant qu’ils marchent dans la jungle en faisant mine de souffrir, comme s’ils montaient les ultimes mètres de l’Everest.

Nous arrivons autour d’un joli stupa appelé Alangkon Chedi, construit en 1876 en latérite en hommage au roi Rama V et de la reine Sunanta Kumareerat. Non loin cette même reine repose dans un mémorial pyramidal construit en 1881.

La cascade, Namtok Phlio est jolie mais ne casse pas non plus trois pattes à un canard. Elle possède trois niveaux et ses eaux tombent de 40 mètres de hauteur un bassin d’eau claire mais où bien trop de monde se baigne pour qu’on puisse profiter pleinement du lieu. Petite particularité, comme dans les autres pays d’Asie du sud-est, les locaux se baignent ici en short et en tee-shirt, pas en maillot de bain. C’était pareil sur la plage les jours derniers.

Nous descendons un peu plus bas dans le lit de la rivière y tremper nos pieds au milieu de centaines de poissons Masheer Barb qui viennent nous chatouiller les pieds.

Bon voilà, c’est déjà fini. Nous sortons du parc un peu frustrés d’avoir payé aussi cher pour voir aussi peu. Du coup, nous hésitons fortement à nous rendre dans l’autre parc national de Khao Khitchakut. Les droits d’entrée sont équivalents et donnent accès à une marche de 3,5 km. Nous décidons de garder ces 18€ pour autre chose. Direction la ville de Chanthaburi de 30 000 habitants, où nous nous réfugions pour le bivouac dans la cour du temple Wat Chanthanaram. Comme au Laos, au Vietnam ou au Cambodge, ce sont toujours des endroits avec de quoi stationner en sécurité et souvent très bien situés en ville. C’est encore le cas ici. On ne peut être mieux placés, au bord de la rivière.

Nous laissons Anaïs et Victor sagement dans la Tiny pendant que nous allons nous désaltérer sur la terrasse d’un bistrot et faire quelques courses. Nous revenons au camion, en ayant oublié de faire les courses. Nous ressortons.

Vendredi 17 janvier 2020 :

Dès le lever, je pars seul faire le plein de fruits et légumes au marché de la ville. J’aime traîner de bonne heure dans ces endroits chargés de vie, au milieu des locaux, sans touriste. Il est bien achalandé. Je remplis les poches à vrac en tissus de ma belle-maman de fruits et légumes et contribue au sauvetage la planète en économisant une bonne dizaine de sacs plastiques qui ne termineront pas dans les océans. Bien qu’encore une fois, la politique de traitements de déchets semblent être plus performante en Thaïlande que dans les derniers pays que nous avons traversés. Du moins ici, le ramassage est fait. Après on ne sait pas ce qu’il advient du recyclage.

Après une nouvelle grosse matinée d’école et après avoir de nouveau travaillé sur l’itinéraire du Myanmar auquel nous apportons avec les autres voyageurs quelques modifications, nous partons marcher un peu dans la ville de Chanthaburi. La promenade sur les quais est agréable. Jolie vue sur quelques vieilles maisons traditionnelles sur pilotis.

Puis nous marchons autour de la Cathédrale de l’Immaculée Conception, le plus grand édifice catholique de tout le pays construit à la fin du 19ème siècle alors que la ville était sous domination française, période qui a duré de 1892 à 1905. Elle est de style gothique avec une belle façade en ardoise et deux clochers identiques. Dommage, son intérieur est fermé et nous ne verrons pas la statue de la Vierge ornée de 200 000 pierres précieuses. Chanthaburi est en effet un important centre de l’exploitation minière de rubis et de saphirs.

Retour en achetant quelques madeleines tout juste sorties du four. Nous traversons la partie historique de la ville, la communauté riveraine de Chantaboon. Ce lieu était appelé le Chinatown de la ville car il y a de cela trois siècles, les premiers fondateurs étaient des réfugiés chinois et vietnamiens. La principale rue est donc bordée d’un mélange de bâtiments influencés par l’architecture des cultures chinoises, occidentales et thaïlandaises. Ces maisons sont celles qu’on voyait sur pilotis depuis l’autre rive de la rivière.

Nous en profitons pour jeter un œil à l’intérieur des habitations. La limite entre la partie professionnelle où les habitants vendent quelques articles sur le pas de porte et la partie privée est toujours floue. Tout se mélange.

On trouve des murs décorés de Street Art comme on aime en trouver.

Enfin, petite visite d’un temple chinois.

Le temps de prendre une douche au temple et de refaire le plein d’eau, l’après-midi est déjà bien avancé et c’est de nuit que nous arrivons sur notre bivouac en bord de mer dans la station balnéaire de Thewin, où nous aimerions nous poser quelques jours. On ne voit pas grand-chose à notre arrivée mais cette petite impasse donnant directement accès à la plage, paraît bien tranquille. On verra demain. Mais là, il est vraiment temps de passer à l’apéro.

Nuit bercée par le léger bruit des vagues. On dort toujours les fenêtres grandes ouvertes et avec les ventilos qui tournent… Mais ils brassent de l’air chaud jusqu’à 1 ou 2 heures du matin. Pas facile la vie de voyageurs !

Samedi 18 janvier 2020 :

En fin de matinée, nous allons repérer le bivouac indiqué par nos amis Élodie et Miguel, juste à côté. Ce n’est qu’à 300 mètres. Audrey m’hurle dessus : « Sylvain, tu roules du mauvais côté !!! ». Bon, elle n’a pas tort, des voitures arrivent en face. Je me mets sur la file de gauche.

Arrivés sur place, sur le parking privé du restaurant Three Tree Beach, effectivement, on a les pieds dans le sable et de l’ombre pour que les enfants jouent protégés des rayons brûlants du soleil. Le parking semble autorisé moyennant quelques consommations à la terrasse du bar. Ceci ne va pas arranger notre dépendance à la bière !! Le bivouac est en effet au top. Les roues sur la plage. Pas trop prêt non plus pour ne pas s’ensabler comme les PLEM il y a quelques jours… Des arbres qui nous font suffisamment d’ombre mais les batteries parviennent tout de même à charger. Je ne regrette pas d’avoir un peu surdimensionné mon parc de panneaux solaires par rapport à notre premier camping-car où nous étions souvent limités en Amérique du Sud. Là, c’est parfait ! 700 W répartis sur 3 panneaux différents avec 3 orientations différentes. Ils ne donnent pas tous en même temps, mais il y en a toujours au moins un qui charge selon la position du soleil.

Au large, les îlots de Ko Pla Tin, Ko Klet Chalam, Ko Khal et Ko Kruai et la plus grande île de Ko Samet où nous irons certainement passer une journée dans la semaine.

Dimanche 19, lundi 20, mardi 21… janvier 2020 : Pas souvent que je résume 3 journées en une seule !

Victor au petit matin : « oh ce matin, j’ai été réveillé par le bruit des vagues ! ». Pas désagréable…

Notre progression, vous l’avez remarqué, se fait lentement en Thaïlande… D’ailleurs, pour ceux qui ne le savent toujours pas, notre Tiny est équipée d’une balise GPS où vous pouvez suivre notre position en temps réel. Il suffit de cliquer sur ce lien. Ce dernier est également accessible directement en bas de notre blog !

Durant ces trois jours, on profite, on se repose, on travaille et on attend avec impatience l’arrivée de la famille dans une semaine à Bangkok mais nous ne sommes pas pressés d’arriver (mise à part pour retrouver nos proches !) dans cette énorme ville tentaculaire, polluée et embouteillée. Nous préférons patienter dans ce petit havre de paix. Nous profitons donc de ce bivouac idéal sur le parking tranquille de ce resto de plage. La majorité de ses clients sont des norvégiens et des suédois dont une importante communauté semble installée dans cette petite station balnéaire.

L’école prend en ce moment trois bonnes heures. Il faut prendre un peu d’avance car ce sont déjà les vacances à la fin de la semaine avec l’arrivée de mamie, papi et tonton…

Audrey prend de très nombreuses heures à préparer la programmation de l’école pour la suite de l’année. Pour que les enfants aient un objectif annuel qui leur semble réalisable, elle découpe l’ensemble du programme en 10 périodes. Une période dure 5 semaines. Dans chaque période, maths, français, littérature, sciences, histoire, géographie, langues… sont abordées. Chaque jour, après avoir rédigé leur carnet de bord qui relate la journée de la veille, les enfants choisissent les sujets qu’ils veulent travailler. Ils s’organisent comme ils veulent, l’objectif étant que tout soit validé dans les 5 semaines.

L’expérience professionnelle d’Audrey rend d’autant plus facile l’instruction en famille de nos enfants. On s’en rend compte surtout quand on croise d’autres familles de voyageurs qui rament plus. Anaïs et Victor ont la chance d’avoir une Mamantresse d’une grande patience ! Mais Audrey a la chance d’avoir deux élèves sérieux et motivés…

Nous commandons en ligne nos e-visas pour le Myanmar (45€), ce qui est quand-même beaucoup plus pratique que les longues et fastidieuses formalités que nous devons accomplir dans les ambassades ou consulats de tous les autres pays qui ne délivrent pas de e-visas. Depuis le début de notre aventure, le Myanmar et le Tadjikistan sont les deux seuls pays pour lesquels cela était possible. Le Laos, le Vietnam, le Cambodge et la Thaïlande délivrent les visas directement à la frontière en arrivant. Pour tous les autres pays (Iran, Turkménistan, Russie, Mongolie, Chine, Inde), nous avons dû aller en ambassade et rester plusieurs jours bloqués à attendre le sésame.

On décortique donc les guides du Myanmar, de l’Inde, du Népal. On trace des itinéraires sur Google Maps. On boit quelques bières. On efface les itinéraires qu’on vient de tracer pour en refaire d’autres. On compare les billets d’avions sur les comparateurs de prix. On étudie les meilleures solutions. En plus des tensions géopolitiques que nous voulons éviter, il nous faut aussi combiner les meilleures périodes dans chaque pays. On ne sera pas à la meilleure période en Inde car il fera 40°C mais on n’a pas trop le choix, en espérant que la mousson ne soit pas en avance cette année.On échange et on recueille des infos d’autres voyageurs sur internet et sur Facebook. On boit quelques bières. On cherche comment nous occuper tout le temps où la Tiny naviguera. Bref, les journées se passent ainsi alors que les enfants profitent de la plage. On boit quelques bières. On mange au resto de la plage. On profite ! On fait de grandes marches sur la plage encore un peu préservée du béton. Quelques immeubles habités par des occidentaux et de belles villas ayant les fondations dans le sable, alternent avec des petites baraques de pêcheurs. Malheureusement, le sable est par endroit bien pollué de déchets plastique.

Victor ratisse des heures le sable fin de la plage sous l’ombre des gros arbres. Anaïs joue des heures avec la petite fille des propriétaires de l’établissement. Elles ne parlent pas de langues en commun mais arrivent étonnamment à se comprendre. Anaïs et Victor enchaînent les parties de baignade et de sauts en longueur dans le sable fin.

L’eau, toujours à 29°C est tellement agréable qu’on y fait plusieurs sauts dans la journée. Le temps est bien ensoleillé mais légèrement couvert d’une brume de chaleur. La température de l’air est de 32°C mais très largement supportable. Après une longue marche de 6 km, nous allons avec Audrey nous faire masser durant une heure sur une table de massage posée sur le sable face à la mer. Du bonheur dans ce cadre exceptionnel bercés par le bruit des vagues et par cette petite brise marine.

Les proprios nous ont offert à manger deux grosses assiettes de fried-rice en plein milieu d’après-midi ! Parfait, cela fera le repas des enfants ce soir pendant que nous allons pour la première fois du voyage au resto en amoureux, découvrir quelques spécialités thaïs.

Mercredi 22 janvier 2020 :

Dernière journée sur cette jolie plage. L’accueil et les sourires du personnel du Three Tree Beach est toujours excellent et en particulier celui de Rampan, la responsable du resto. Nous passons la saluer et la remercier de nous avoir autorisés à séjourner sur son parking privé pendant ces quelques jours et pour tous les petits plats ou boissons qu’elle nous a offerts. Visite de la Tiny, échanges de pseudos Facebook et elle nous promet de nous accueillir de nouveau lors de notre prochain passage en Thaïlande.

Nous allons nous garer à quelques rues de là pour profiter du robinet nous permettant de faire les pleins d’eau, de laver le camion et de faire quelques lessives. Victor a à cœur de préparer une tournée de pancakes qu’il apporte avec sa sœur à Rampan. Ils reviennent avec 2 kilos de pommes, 1 kg de bananes et deux shakes à l’ananas !

Grande promenade de Victor et sa maman sur la plage pour à nouveau plus de 6 km. En fin d’après-midi (on apprécie les journées qui rallongent, il ne fait nuit qu’à 19 heures), nous nous déplaçons vers le nord d’une douzaine de kilomètres pour aller bivouaquer près du port qui nous mènera demain sur l’île de Ko Samet. Nuit sur un terrain vague près d’un poste de la police touristique à Ban Phe. Courses au supermarché Makro et achat des tickets pour le bateau de demain.

Jeudi 23 janvier 2020 :

Dès 8h30, nous sommes au rendez-vous sur le pont d’embarquement. Nous sommes entourés de centaines de chinois obéissant aux ordres millimétrés de leurs guides qui hurlent dans un mégaphone. Ça promet… On le sait. La proximité de Bangkok (220 km) permet aux touristes, qui n’ont pas le temps de descendre découvrir les plages du sud de pays, d’avoir un aperçu des eaux cristallines et turquoises d’une île du Golfe de Thaïlande, le temps d’une journée ou d’un week-end. Ce n’est pas notre cas, mais nous avons encore du temps libre avant d’atteindre la capitale dimanche.

Nous avions acheté des billets avec l’option la moins chère, naviguer sur un ferry qui se rend sur l’île en environ 40 minutes. Finalement, on nous annonce que pour le même prix, on embarque sur un fastboat. C’est donc en 10 minutes, cheveux au vent (pas pour moi) que nous parcourons les 7 km nous séparant de cette île de 13 km² de superficie, soit 7 kilomètres du Nord au Sud et 4 km d’Est en Ouest à son endroit le plus large.

Nous mettons pied à terre dans le petit village du port de Na Dan. Bon c’est vraiment moche, une succession de bars, restos, hôtels, magasins, agences touristiques, locations de scooters, salons de massages…

On s’acquitte du prix d’entrée dans le parc national. Ouf, on espère enfin trouver un peu de nature et d’espaces préservés. Mais là, c’est le choc. La première plage est envahie de restos horribles et de milliers de chinois, réservant pour la journée des activités nautiques : parachute ascensionnel, jet-ski, locations de bouées géantes, plongée… Mais que sommes nous venus faire ici au milieu de ses touristes venus passer des heures à faire bronzette à en devenir écarlate ? À se prendre en photo sans cesse…

Nous fermons les yeux et on file vers le sud. Heureusement, rapidement en quelques centaines de mètres, l’activité se calme et nous pouvons enfin profiter des plages et de l’eau bleue turquoise. Un décor de rêve sous un merveilleux temps. Mais nous commençons par une petite pause rafraîchissante.

Durant plus de 7 km, c’est une succession de plages répondant aux noms de Ao Cho, Ao Karang, Ao Kio Na Nok, Ao Nuan, Ao Phutsa, Ao Thapthim, Ao Thian, Ao Wai, Hat Hin Khrong, Hat Khlong Phai et Hat Sai Kaeo. Les criques de sable fin et immaculé sont magnifiques. La majorité sont occupées de petits hôtels, de plus en plus chics au fur et à mesure qu’on descend vers le sud.

Entre chacune de ces plages au sable hyper fin, on suit le littoral escaladant les rochers ou grimpant des petits raidillons dans des espaces boisés.

Nous longeons donc le littoral comme certainement personne d’autre aujourd’hui. On ne croise d’ailleurs personne. Certains hôteliers semblent bien surpris de nous voir arriver sur leurs plages privées, à tel point qu’on se fait même escorter par un vigile sur l’une d’elle pour qu’il soit certain qu’on quitte cet hôtel de luxe proposant des suites de 100 à 200 m² !

Bon, une nouvelle fois, je vous montre l’envers du décor qui n’est pas que paradisiaque. Une fois sortis des endroits accueillant les touristes, nous sommes confrontés à une terrible pollution du rivage. Et ce ne sont pas seulement des déchets de l’océan venus s’échouer. Il y a une quantité de poubelles, de plastiques, de pneus, de matériaux qui ne sont pas déposés ici par les touristes mais bien par les locaux. Pas besoin de nous écarter beaucoup de ces hôtels luxueux. A quelques dizaines de mètres de ces complexes, c’est une véritable catastrophe écologique que ne soupçonnent pas les riches touristes en train de faire bronzette. C’est vraiment dégoûtant et oppressant par endroit.

Nous observons de jolis oiseaux, de gros lézards et Anaïs aperçoit une sorte d’iguane, trop rapide pour que je le prenne en photo.

Nous atteignons le bout de l’île à 13 heures, après 4 heures de marche pour seulement faire un bon 7 km. Les ventres bien vides sont vite rassasiés en avalant un pique-nique tout en profitant du panorama.

Mais après seulement une demi-heure de pause, il est déjà temps de faire le chemin en sens inverse car le dernier bateau est à 17 heures. Nous n’avons pas le temps de revenir par le difficile chemin côtier, en escaladant les rochers entre chaque portion de plage. Nous revenons par la route bétonnée au milieu de l’île en traversant de luxuriantes collines boisées de conifères et de cajeput qui poussent en abondance.. Mais c’est très vallonné. Une succession pas très agréable de pentes entre 10 et 15 % en plein cagnard. Les réserves d’eau s’amenuisent (plus de 3 litres d’eau chacun bus aujourd’hui). Nous sommes au bout de notre vie…

Après une pause dans le caniveau, nous rejoignons le littoral et en instinct de survie, sautons dans l’eau d’une petite plage au sable blanc.

C’est finalement par la côte, moins accidentée à présent, que nous rejoignons le port où nous arrivons à peine une demi-heure avant le dernier bateau. Grosse journée de plus de 15 km de rando ! Retour en ferry sur le continent. Changement de bivouac. Nous nous rendons un peu avant Rayong, à un point repéré sur notre application iOverlander mais l’accès en bord de plage de Mae Ram Phueng est temporairement en travaux. Tant pis, on se réfugie de l’autre côté de la route sur un terrain vague.

Vendredi 24 janvier 2020 :

Matinée en plein soleil à faire l’école. Je bouge le camion car les odeurs des poubelles nous incommodent. Et oui, tous les bivouacs ne font pas rêver… J’accompagne les enfants jouer à la plage. Mais là, c’est pareil. Le sable est jonché de déchets de même que les fonds marins. Même Anaïs et Victor ne se sentent pas à l’aise et me demandent à rentrer dans la Tiny… Les chiens errants et aboyant n’inspirent pas non plus confiance.

Nous roulons deux bonnes heures sur une quatre voies en travaux en direction de le grande ville de Pattaya. Elle est peuplée de plus de 300 000 habitants et accueille chaque année plusieurs millions de touristes. Avant d’y arriver, on ne savait pas mais elle est malheureusement considérée comme étant la « capitale mondiale du tourisme sexuel ». Ce n’est bien entendu pas pour ce caractère sulfureux ni pour pour visiter les aquariums, les villages aux éléphants ou parcs aquatiques, assister à un cabaret ou à un spectacle mettant en scène tigres et crocodiles, pas plus que pour fréquenter les centres commerciaux du vilain front de mer bétonné que nous venons ici. Mais simplement pour espérer y voir des célébrations du Nouvel An chinois demain.

Mais la grosse difficulté est d’y trouver un stationnement. Nous tournons une bonne heure puis après s’être fait virer du parking d’un resto, nous trouvons refuge dans un quartier étonnamment assez calme à moins de deux kilomètres de la plage. Parfait pour les deux nuits à venir si on ne nous déloge pas. Pas trop d’énergie pour sortir se promener. La fatigue et les courbatures de la rando d’hier sont présentes.

Bon voilà une journée pas top mais il y en a aussi ! Elles font partie du voyage…

Samedi 25 janvier 2020 :

Encore une matinée bien occupée avec l’école avant le début des vacances demain midi. Et oui, J-1 avant l’arrivée tant attendue de Mamie Liliane, Papi Daniel et tonton Alexandre à Bangkok. Nous allons l’après-midi nous promener en direction du front de mer de Pattaya. Mais pour cela, sans le savoir, nous traversons un quartier rempli de femmes en tenue très très légère tentant d’attirer le chaland. Partout, des bars à hôtesses et des « salons de massages ». Les questions fusent de la part des enfants sur la prostitution. La première de Victor est « mais les filles, elles font de la publicité pour les vêtements ? ». Puis, Audrey explique la situation avant que Victor ajoute « mais si les hommes ils payent pour faire l’amour, c’est que c’est agréable de faire l’amour ? ». « euh… oui, c’est agréable… » répond Audrey. Il répond « ah ben moi j’sais pas, j’ai jamais fait ! ».

Bon, sa réponse fait sourire mais la situation que nous avons sous les yeux est terrifiante. Des centaines de prostituées, très jeunes voire mineures pour certaines, attendent le client. Et le client type est un homme d’une tranche d’âge de 50 à 65 ans, de type occidental. On en croise des centaines dans les rues. C’est glauque. On se sent mal à l’aise, d’une part en ce qui concerne la prostitution d’un point de vue général, mais surtout par rapport à l’exploitation par ces touristes sexuels, ces pédophiles se baladant naturellement main dans la main ou attablés au resto avec des adolescentes, certaines à l’allure d’enfants.

La dérive de ce qui était un petit village de pêcheurs a commencé il y a un demi-siècle quand les militaires américains ont commencé à y affluer pour tenter d’oublier les horreurs de la Guerre du Vietnam. Bien que la prostitution soit interdite en Thaïlande, elle est tolérée car les travailleuses du sexe sont loin d’être les seules à gagner leur vie de leur activité, qui est aussi la vache à lait des patrons des bars et des salons de massage, des taxis, des mafias, des hôteliers. La prostitution « génère des sommes d’argent énormes et ne pourrait exister sans la connivence de la police », affirme le journaliste britannique Andrew Drummond, qui a couvert les faits divers en Thaïlande pendant 20 ans. Un rapport de l’Onusida évaluait en 2014 à 140 000 le nombre des prostituées en Thaïlande. La seule Pattaya en compterait plusieurs dizaines de milliers. En 2016, 12 millions de touristes, dont 70 % d’étrangers, ont visité cette ville aux 2000 hôtels qui offrent plus de 100 000 chambres. A titre de comparaison, Paris et sa petite couronne a le même nombre d’hôtels mais pour le double de touristes, 24 millions (chiffres 2018).

Nous parvenons sur la plage qui ne fait que confirmer que nous ne sommes vraiment pas fait pour ces stations balnéaires dans lesquelles nous ne trouvons aucun intérêt. La plage n’a rien d’agréable bien qu’elle s’étende sur plusieurs kilomètres dans une immense baie. Le sable, contrairement aux autres plages que nous avons vues jusqu’à présent, ressemble plus à un grossier sable de chantier. L’eau n’est pas transparente. Les bateaux et jet-skis viennent slalomer entre les baigneurs.

Un espace baignade nous fera passer un peu de temps en attendant le début des festivités du Nouvel an chinois.

Mais bon, on ne s’y retrouve pas. On se sent tous les 4 mal à l’aise avec presque l’envie de rapidement quitter cette ville. Après une marche sur la plage, on s’écarte un peu du littoral pour trouver un petit resto pas trop cher et on se remplit le ventre d’un traditionnel Phat Thaï que nous préférons au barbecue de crocodile.

Puis, nous tentons tout de même de revenir fêter la nouvelle année avec nos amis les chinois, dont une grande partie porte des masques respiratoires face à l’épidémie de pneumonie causée par le coronavirus « 2019-nCoV ». D’ailleurs à ce sujet, nous recevons quelques messages de proches s’inquiétant pour nous. Pas de problème ! Enfin, pas plus que si nous étions ailleurs sur la planète. La ville de Wuhan (foyer de l’épidémie) est à plus de 2000 km de là où nous sommes, soit la même distance séparant Paris de Moscou… Il y a pour l’instant autant de cas de transmissions recensés en Thaïlande qu’en France.

On arrive face à une scène où de jeunes enfants font des démonstrations de chant et de danse devant des juges . Mais c’est très criard, très aigu, pour nous insupportable à écouter. Nos regards croisent ceux de nos enfants : eux aussi ont envie de partir ! Tant pis pour les célébrations de la nouvelle année 4 718. L’ère du Cochon de Terre se terminera sans nous pour laisser place au Rat de Métal. Sans rancune, bonne année à toute la communauté chinoise !

Bon, vous l’avez compris, c’est avec plaisir que nous allons quitter la ville de Pattaya demain avec le regret d’y être venu passer du temps. A présent, place aux retrouvailles avec la famille qui vient tout juste de s’envoler de Paris ! Plus que quelques heures à patienter…