16. Grèce : du 17 au 23 janvier 2019 : Olympie, Mystra, Péninsule du Magne, Monemvassia
845 kms parcourus du 17 au 23 janvier 2019
10 442 kms parcourus depuis le départ
Jeudi 17 janvier 2019 :
Voici une journée qui commence bien tôt. Le réveil sonne à 2h20. Moi seul me lève. Juste le temps d’enfiler un jean et mes babouches et je démarre la Tiny (toujours grâce à l’aide de la pompe d’amorçage de carburant de Phiphi et à l’aide de deux longs préchauffages). Je me dirige vers le port d’embarquement de Marghera, non loin de Venise. Je tends les billets à l’employé de la compagnie qui ne comprend pas pourquoi j’ai 4 billets passagers alors qu’il me voit tout seul à l’avant. Je lui explique dans un mélange d’anglais et de grec que les trois autres dorment dans le camion. Il veut les voir mais je lui explique qu’ils dorment. Il m’explique qu’il veut les voir. Et bien, viens les voir. Il monte à l’arrière et aperçoit deux silhouettes d’enfants bien cachés sous les couettes et les doudous. Cela semble lui suffire. « Audrey ? » « Ah, elle est dans sa chambre ». Je tire le rideau et Audrey se fait réveiller par l’éclairage d’une torche dirigée droit dans ses yeux, tenue par un grand gaillard vêtu d’un gilet jaune.
Rapidement, nous embarquons sur le Cruise Europa de la compagnie Grimaldi Minoan, la même compagnie qui avait déjà fait transiter notre précédent camping-car vers l’Amérique du sud. J’arrive à négocier l’une des rares places sur le pont où les panneaux solaires de la Tiny pourront continuer à prendre le soleil et charger les batteries durant la longue traversée de plus de 32 heures qui nous attend. Notre frigo électrique a en effet besoin de beaucoup d’énergie pour fonctionner. Ne pouvant rester dans le camion, je réveille tout le monde sauf Audrey qui n’a pas réussi à se rendormir suite à son face à face matinal avec le douanier. Il est 4 heures et nous montons à pied les deux hauts étages nous séparant du 7ème étage du bateau gigantesque mais quasiment désert. Celui d’hier que nous devions prendre a pourtant été annulé, certainement par manque de passagers, afin de mieux remplir celui d’aujourd’hui. Nous ne sommes que de très rares touristes, la majorité des passagers sont des routiers souhaitant éviter, comme nous, la longue traversée des pays des Balkans (Slovénie, Croatie, Monténégro, Albanie) soit près de 1800 kilomètres de route.
Nous sommes accueillis par un personnel mal aimable qui nous indique la salle où nos fauteuils réservés nous attendent pour terminer notre nuit. Pour des raisons de coût, nous n’avons en effet pas réservé de cabine mais simplement des fauteuils, comme dans un avion. Par chance, comme le bateau est vide, nous pouvons nous installer de manière assez confortable ; bien que le sol, couchés sur une simple couverture, soit assez dur. C’est à ce moment qu’on se dit qu’on n’a plus 20 ans.
Bercés par le roulis du bateau, qui avec une heure de retard s’éloigne du quai, Audrey et les enfants parviennent à se rendormir. Les poches à vomis sont, à titre préventif, disposées non loin de chacun. Audrey a en effet un triste souvenir de sa traversée entre la Sicile et Gênes où elle avait nourri les poissons méditerranéens. De mon côté, toujours attiré par les manœuvres portuaires, j’assiste, frigorifié du haut du 12ème pont au largage des amarres. Je suis bien le seul sur le pont qui en saison doit accueillir des centaines de passagers avec sa piscine, ses bars et sa discothèque.
Le port de Marghera est situé en plein dans la lagune de Venise à l’écosystème pourtant déjà précaire et menacé par ses énormes installations portuaires, pétrochimiques et industrielles. Le Cruise Europa emprunte une voie navigable tracée par des repères lumineux. Nous nous dirigeons vers l’embouchure de Malamocco, l’une des trois séparant la lagune de la mer Adriatique. La lagune est en effet protégée de la mer par une étroite bande de terre qui s’étend sur 50 kilomètres. Le navire se faufile dans le canal large de 400 mètres entre les îles du Lido et de Pellestrina. Le lourd projet Mose, ayant pour but de limiter les phénomènes désastreux de l’Acqua Alta dont je vous ai parlé dans le dernier article, va radicalement modifier l’aspect de la lagune par la construction en mer d’une digue et d’un bassin permettant son accès même en cas de fermeture des barrages contre les marées hautes.
Cela fait déjà une heure que le bateau a quitté le quai. Nous entrons en mer Adriatique. Il fait encore nuit noire. Je parviens à me rendormir quelques heures allongé sur trois fauteuils.
Une partie de la journée se passe à faire école. Les grands salons déserts nous offrent de confortables places avec une jolie vue sur mer…
Anaïs et Victor partent découvrir le navire. Je passe ma journée à rattraper le retard que j’avais pris les derniers jours sur le blog et dans le traitement de mes images. Nous avons en effet passé 3 jours dans Venise sans faire école et c’est pourtant le moment de la journée où je me pose environ deux heures sur l’ordinateur.La position GPS du bateau n’avance que très lentement sur le téléphone. Victor joue avec une petite fille parlant anglais dans la salle des jeux vidéo. Anaïs prépare des origamis qu’elle offre au personnel du bateau, en échange de sourires, de petits gâteaux et de remerciements…
A la mi-journée, nous faisons escale à Ancône, toujours en Italie, juste le temps de charger quelques véhicules et des passagers. Je profite de cette escale et de l’accès au garage pour descendre préparer des cafés à la Tiny car les expressos à 3,20€ vendus sur le bateau ne nous disent rien.
La navigation reprend et les poches à vomi restent vides. Mer d’huile. Nous sentons à peine le mouvement des vagues. Nuit bercée par mon voisin de fauteuil ronflant beaucoup trop fort. Mes sifflements ne sont pas efficaces pour le faire taire. Mes boules Quies atténuent ce vacarme de 35 décibels et m’aident à trouver le sommeil.
Vendredi 18 janvier 2019 :
Les lumières se rallument, le micro parlant dans 5 langues nous réveille et annonce la deuxième escale matinale au port d’Ηγουμενίτσα (Igoumenítsa). Nous voici en Grèce mais ce n’est toujours pas là où nous descendons. Nous observons les manœuvres portuaires depuis le pont du bateau.Bien entendu, je repense à l’été 1999, où avec mes deux compagnons de route, Jeff et Poilu, je descendais du bateau à ce même quai au volant de ma très vieille 2CV toute rouillée de 45 ans d’âge. Je m’étais lancé le défi, avec beaucoup d’insouciance, à parcourir quelques 5000 km durant un mois en direction de la rencontre mondiale des passionnés de la 2CV. Nous étions 1700 véhicules à nous diriger depuis le monde entier vers Skotina Beach sur les bords de la mer Egée. Que de souvenirs !
Le bateau reprend la navigation en mer Ionienne. Difficile de distinguer si les côtes que nous longeons sont celles du continent grec ou bien des îles entre lesquelles nous slalomons. Toujours est-il que les paysages sont jolis. Les montagnes sont enneigées mais nous sentons cependant sur le pont que les températures sont plus douces qu’au nord de l’Italie.
Le Péloponnèse est en vue. Cette immense péninsule grecque s’étend sur plus de 21 500 km2 et constitue la partie méridionale de la Grèce continentale, dont elle est séparée par le golfe de Corinthe au nord et le golfe Saronique au nord-est. Il est relié au continent par l’isthme de Corinthe et par le pont Rion-Antirion que nous voyons au large.
Avec une demi-heure d’avance, le bateau se met à quai à Patras (Πάτρα) et très rapidement nous descendons la Tiny et mettons pied à terre en Grèce.
Voici le 5ème pays de notre voyage mais le dernier en Europe. Notre prochaine frontière nous fera quitter l’espace Schengen, celle d’après nécessitera notre premier visa. Pas besoin de changer d’heure, c’est déjà fait depuis l’Italie où le soleil se couchant trop tôt à notre goût, nous nous étions déjà décalés à l’heure grecque depuis 10 jours…
Nous prenons la route après avoir traversé Patras. Nous prenons nos repères comme à l’arrivée dans chaque nouveau pays. Le gasoil est encore cher, aux alentours d’1€30. Il y a du GPL aux stations ce qui nous permettra de remplir nos réserves de gaz. Il y a des Lidl, très pratique pour les courses. Il y a aussi des vieux camions Mercedes partout, ce qui est rassurant au cas où nous tombions en panne… Nous avons déjà des signes sympathiques des habitants croisant la Tiny. La conduite semble facile.
Nous sortons de Patras et là… patatras ! c’est quoi cette conduite ? Mais pourquoi ils conduisent comme ça les grecs ? Pourquoi ne s’arrêtent-ils pas aux feux rouges et aux stops ? Pourquoi les motards ne mettent-ils pas de casque ? Mais surtout pourquoi conduisent-ils sur 4 files alors qu’on roule sur une nationale à 2×1 voie ? Bon d’accord, notre guide du routard nous avait prévenus que sur cette route, on roule comme ça mais bon ça surprend. En fait, on prend vite le pli, il faut rouler sur la bande d’arrêt d’urgence et comme ça, on peut doubler ou se faire doubler facilement. Les camions en plus de rouler vite nous doublent donc, y compris sur les bandes blanches ou les zébras.
Ce n’est pas pour rien que la Grèce est le pays d’Europe où il y a le plus de victimes de la route (149 tués par million d’habitants en Grèce contre 88 en France…). Ce n’est pas pour rien qu’on voit partout sur les bords de route des mini chapelles en hommage aux tués sur la route… ou pour remercier de s’en être sorti vivant…Ah oui, il nous faut aussi nous faire aux panneaux de signalisation écrits en… Grec. Bon d’accord, on ne peut pas trop leur en vouloir mais ce n’est pas simple… Par exemple, notre prochaine destination pour notre étape de ce soir est Ολυμπία. Evidemment, sur notre GPS ou sur notre carte, c’est écrit Olympie.
Les paysages que nous traversons ne sont pas enchanteurs comme on imagine la Grèce.Nous arrivons à Olympie sur un parking près du site antique que nous visiterons demain. Et là, notre hasard avec qui nous avons souvent rendez-vous, nous apporte encore une bien jolie surprise. Nous nous garons à côté du camion des « Chaprons bougent ». Emmanuelle dit « Mimi », Sylvain et leurs enfants Mathilde et Titouan sont sur le retour d’une année sur les routes de la Soie et de la Mongolie. Nous nous étions déjà croisés sur le festival des aventuriers à Tonnay Charente mais nous nous connaissions surtout par nos blogs respectifs et par Facebook. Nous passons donc une belle fin d’après-midi et soirée avec cette jolie famille. Bien entendu, nous ne tardons pas à sortir les cartes routières et nous leur posons plein de questions sur les prochains pays.
Samedi 19 janvier 2019 :
Olympie… Les jeux olympiques de l’Antiquité étaient des jeux panhelléniques, c’est-à-dire qu’ils rassemblaient les Grecs de toute la Méditerranée. Ce n’étaient pas les seuls car d’autres étaient organisés à Delphes, à Corinthe, à Némée ou à Mycènes mais ceux d’Olympie étaient les plus importants. La première édition des JO a eu lieu en 776 avant JC ! Les Jeux avaient un caractère sacré et permettaient aux vainqueurs de s’approcher des dieux. Pendant les Jeux, les guerres et les rivalités entre les cités s’interrompaient. Tous les quatre ans, une foule de participants, de commerçants, d’artistes se retrouvaient dans la cité du Péloponnèse. Ils ne se déroulaient, de la 1ère à la 24ème olympiade, que sur une seule journée puis au fur et à mesure de l’ajout d’épreuves, des journées furent ajoutées. Les Jeux comportaient une dizaine d’épreuves réservées aux hommes adultes : courses, lancers de javelot, disques, sauts, combats, luttes, pugilats… Les Hellanodices avaient pour tâche d’organiser le déroulement des Jeux, de veiller au respect fidèle des règles, de superviser les concours, de décerner les prix, et de punir les infractions (retard, désobéissance, corruption…) par des sanctions pécuniaires ou des châtiments corporels. Le vainqueur des Jeux revenait avec une couronne d’olivier, une palme mais surtout avec la gloire assurée, et la pitance… Aujourd’hui encore en Grèce, on accorde une place importante, souvent dans l’armée, à celui qui ramène l’or olympique. Les Jeux continuèrent pendant la période romaine mais les derniers eurent lieu en 393 après JC (ils durèrent donc pendant 1169 années et virent la victoire de 4237 athlètes). Ils furent ensuite interdits comme toutes les fêtes païennes par Théodose qui en 426 ordonna carrément la destruction d’Olympie. En 1894, Pierre de Coubertin fit adopter à La Sorbonne le rétablissement des Jeux Olympiques. Et les premiers Jeux modernes eurent lieu en 1896 à Athènes. Et depuis, c’est ici que la flamme olympique est rallumée tous les 4 ans avant d’être relayée jusqu’au lieu des JO.
C’est donc le site d’Olympie, sorti des ruines en 1829, classé au Patrimoine mondial par l’Unesco que nous partons visiter de bon matin (avant la pluie annoncée pour cet après-midi). Le site n’est pas une ville mais bien un centre religieux, très hiérarchisé, rythmé par un rituel quotidien et quelques fêtes dont évidemment les Jeux. Nous commençons par la visite du musée archéologique qui contient une importante et riche collection d’objets découverts sur le site. Nous comprenons mieux le site grâce à une maquette des lieux.
Superbes collections de bronzes du 8ème siècle avant JC, de figurines, de céramiques, de chaudrons, de sculptures dont la magnifique Niké, ou bien alors le célèbre Hermès de Praxitèle.
On y trouve de belles séries de statues qui se tenaient autrefois dans les niches disposées dans les temples ou autour des bassins du site. Le drapé des tenues féminines est d’un détail impressionnant.
Le clou de la visite se situe dans l’immense salle du musée où les deux énormes frontons du Temple de Zeus occupent toute la place. D’un côté, Zeus surveille le départ de la course de chars de Pélops contre Oenomaos. De l’autre les Centaures à corps de chevaux sont ivres et tentent de kidnapper des femmes.
Nous entrons sur le site archéologique que nous appréhendons plus facilement grâce à la visite du musée. On entre dans le stade olympique par une arche simulant le couloir par lequel on pénétrait auparavant dans les lieux.Le stade mesure 192,27 mètres et pouvait accueillir 45000 spectateurs (que des hommes). Les femmes et les esclaves assistaient au spectacle du haut du mont Kronion. La seule autorisée à pénétrer dans l’enceinte du stade était la déesse de la fertilité qui prenait place sur l’autel qu’on voit à gauche de la photo. Sur la tribune à droite, prenait place le jury.Les athlètes étaient nus et le corps enduit d’huile d’olive pour éviter les claquages musculaires. Le mot « gymnase » vient d’ailleurs du grec « gymnos » qui signifie « nu ». Anaïs et Victor, accompagnés de leur papa, tous habillés, font leur séance d’EPS sur le stade olympique. Anaïs gagne (mais grâce à un faux-départ non sanctionné par le juge Audrey).
Le Bouleutérion était un ensemble de deux bâtiments où siégeait le Sénat Olympique et où les athlètes prêtaient serment devant les magistrats et l’autel de Zeus.Nous arrivons à bien nous rendre compte de ce que pouvait donner le site auparavant aussi bien par les maquettes vues précédemment au musée que par des gravures devant chacune des ruines. C’est par exemple le cas pour le Léonidaion. C’était un grand bâtiment carré qui servait d’hôtellerie pour les dignitaires étrangers pendant les Jeux. Les chambres étaient desservies autour d’un bassin circulaire décoratif.
Le Temple d’Héra a vu 4 de ses colonnes relevées. Son origine remonte au 7ème siècle avant JC. C’est l’un des plus vieux temples doriques connus (à l’époque, les colonnes étaient en bois) et c’est le plus vieux temple du sanctuaire d’Olympie. C’est là qu’a été retrouvé l’Hermès de Praxitèle vu au musée.
Juste à côté, sur ce petit autel est allumée tous les 4 ans la flamme olympique.Cela nous fait particulièrement écho car nous avions vu passer cette flamme dans un petit village du Brésil lors de notre précédent voyage. Voici une courte vidéo de l’allumage de la flamme pour les JO de Rio en 2016.
La Palestre était la salle d’entraînement des athlètes pour la lutte ou la boxe. Le plus imposant est bien entendu le Temple de Zeus de style dorique. Il reposait sur 13 colonnes dans sa longueur et 6 dans sa largeur. L’une d’elle a été redressée à l’occasion des JO de 2004. A l’intérieur se dressait la statue géante de Zeus, recouverte d’or et d’ivoire, et considérée comme l’une des sept merveilles du monde antique. Les deux frontons vus au musée trônaient en haut de l’édifice.
Nous sortons du site archéologique et nous dirigeons aussitôt (quel rythme !) vers le musée de l’Histoire des JO, construit en 2004 à l’occasion des Jeux d’Athènes. Il retrace l’histoire des Jeux depuis leurs prémices en Mésopotamie et en Egypte 3000 ans avant notre ère jusqu’à 393 après JC. Nous y comprenons encore un peu mieux l’organisation complexe des Jeux, la place des femmes et des enfants (qui avaient aussi des compétitions organisées à des périodes différentes), la fête des vainqueurs. Nous y voyons de nombreuses céramiques, des mosaïques, des pièces de monnaie à l’effigie des Jeux.
Sont exposés également des objets utilisés par les athlètes comme ces haltères en pierre, ces disques ou ces boucliers en bronze du 5ème siècle avant JC. La course de l’Hoplite consistait à courir sur deux longueurs de stade, portant casques et jambières, bouclier de bois revêtus de bronze au bras !
Nous voyons également des listes d’athlètes inscrites sur bronze.Il est temps de rentrer à la Tiny. La pluie nous a bien arrosés pendant la visite du site archéologique. L’après-midi est consacré à l’école. Puis nous prenons la route. La moyenne kilométrique n’est pas élevée mais les paysages de montagne sont superbes et se cachent par magie dans une jolie brume ou au-dessus de nuages. La végétation méditerranéenne est principalement composée d’oliviers et de lauriers roses.
Nous bivouaquons au pied du site de Mystra que nous visiterons demain. Nuit bercée par les aboiements de chiens errants.
Dimanche 20 janvier 2019 :
La pluie est annoncée pour cet après-midi. Donc, comme hier, nous jonglons avec la météo et profitons du beau temps de ce matin pour aller visiter le site de Mystra (Μυστράς). Les ruines médiévales à couper le souffle de ce château chargé de contrôler la région, sont dressées dans un paysage magnifique. Cette incroyable ville fantôme se découvre dans un superbe cadre naturel. Ce site fut érigé par Guillaume de Villehardouin, un Franc, en 1249 sur une colline dominant la ville de Sparte. Mais après avoir fait bâtir Mystra, le seigneur dut la céder en guise de rançon. Le vainqueur, empereur de Byzance, enrichit alors la ville de magnifiques églises byzantines. Dans cette ville qui devint capitale de la région, vécurent 20 000 personnes. Elle fut un haut lieu des arts, des lettres et de la philosophie puis tomba aux mains de différentes civilisations avant de décliner.
Nous commençons par la ville basse en entrant sur le site par une lourde porte traversant les murailles. La vue sur les paysages alentours est imprenable.
Et déjà la vue sur le site que nous allons visiter est impressionnante.
D’incroyables ruines ou églises restaurées se perdent dans la végétation.
La cathédrale Agios Dimitrios abrite de superbes fresques et des pierres sculptées. Elle a été construite au 13ème siècle.
Nous ne nous lassons pas des églises et autres monuments comme l’église Saint Georges.Ou bien sa voisine, l’église de l’Evanghélistria du 15ème siècle joliment restaurée.Nous déambulons dans les ruines du monastère de Vrontochion et de son église de l’Hodhighitria revêtue de jolies fresques du 14ème siècle réalisées par les peintres de Constantinople.
Le monastère de Pantanassa est étonnamment habité par des religieuses qui vivent perchées sur cette montagne abrupte. L’intérieur de l’église de style byzantin et gothique est impressionnant. Nous adorons l’atmosphère de cette petite église intégralement ornée de fresques. Des ex-voto en métal repoussé semblent confirmer les bienfaits de la Très Sainte Mère de Dieu de Pantanassa.
Le monastère de Péribleptos du 14ème siècle est blotti contre les remparts et appuyé contre les rochers au milieu d’une dense végétation.Nous arrivons dans la ville haute avec son gigantesque Palais du Despote. Il était une ruine avant sa restauration et grâce aux fonds de l’Unesco qui a classé cette ville au Patrimoine mondial, ce palais subit des travaux impressionnants de reconstruction.
Toujours un peu plus haut, l’église Sainte Sophie édifiée au 14ème siècle est une belle construction en pierres et en briques. Le marbre est utilisé à l’intérieur notamment pour ses colonnes soutenant de belles coupoles. De belles fresques décorent les murs.
Puis après avoir grimpé 250 mètres de dénivelé sur des pierres humides et glissantes, nous arrivons aux ruines du château franc.
Nous avons un splendide panorama sur toute la plaine de Sparte et sur le bas de la cité de Mystra. Incroyable !
Après 250 mètres de dénivelé négatif, nous voici épuisés de retour à la Tiny mais comblés par cette magnifique visite dans ce lieu si vide de touristes en cette période. Nous avons adoré aller de ruines en ruines, au milieu de cette brume matinale et de cette végétation dense.
Nous passons l’après-midi dans la Tiny à l’abri de la pluie. École et blog nous occupent. Puis nous prenons la route quasiment à la nuit tombée vers Areópoli. Nous trouvons un bivouac dans la baie de Neo Oitylo (Νέο Οίτυλο) qui a l’air bien sympa selon notre application Park4Night mais il fait trop nuit pour voir l’environnement. On aura la surprise demain au réveil. Nuit bercée par le clapotis des vagues de la mer Ionienne.
Lundi 21 janvier 2019 :
Ouahhh… Quelle vue ! Quel bivouac de fou ! L’eau est limpide et de couleur turquoise… pas de plage de sable mais des rochers ressemblant à du marbre blanc.
Nous sommes à l’entrée de la péninsule du Magne, dans le sud du Péloponnèse. Nous quittons cette jolie crique qui nous invite pourtant à rester plus longtemps mais nous voulons profiter de cette journée de soleil annoncé aujourd’hui pour faire le tour de la péninsule. Les autres jours sont prévus pluvieux et nous voulons bénéficier des rayons du soleil. Nous nous arrêtons quelques kilomètres plus loin dans le village bien restauré de Areópoli (Αρεόπολη). Tout est mignon, le pavage des rues en pierre, les maisons en pierre, les églises en pierre… tout est en pierre ! Pas grand monde dans les rues. En tous cas, aucun touriste… Un chien nous accompagne durant toute la visite de la ville.
De retour à la Tiny et pendant qu’Audrey prépare le repas, j’enfile ma combinaison de mécano pour inspecter le châssis. Tout va bien. Les réparations d’Ali sur la structure de la cabane tiennent le coup. Toujours une petite fuite de carburant au niveau d’un réservoir mais rien d’alarmant. Il faudra que j’y regarde de plus près un de ces jours. Je resserre les boulons du pont arrière qui avaient été démontés lors de l’ajout des lames de ressort. Je ne trouve pas pourquoi j’ai toujours cette vibration quand je conduis et que je passe le cap des 40 km/h… ça m’agace…
Nous descendons la côte ouest de la péninsule et nous enivrons de ses paysages époustouflants. Le bleu de la mer Ionienne est incroyable. Superbes points de vue sur les anses, les criques, les baies…
L’architecture est vraiment typique dans le secteur avec des maisons aux allures de forteresses. Elles possèdent pour la plupart des sortes de tours carrées fortifiées, des gros donjons carrés.
Nous faisons une pause à Βάθεια, euh pardon à Vathia… un village dominant sur un éperon rocheux une superbe baie. Le village semble mort. Nous n’avons croisé qu’un seul habitant. Certaines maisons sont bien restaurées mais dans le fond du village, de nombreuses sont ouvertes, abandonnées avec tout le mobilier à l’intérieur. Très étonnant.
Nous continuons à travers ces paysages désolés, sauvages, aux montagnes pelées. Cela nous rappelle les vierges et austères étendues du parc national du Connemara. Un petit air de la Sky road, l’une des plus belles routes d’Irlande dans le comté de Galway que nous avions parcourue il y a quelques années.
Les murets de pierres sèches construits, on se demande bien pourquoi et comment, renforcent cette impression.
On aperçoit beaucoup de tours refuges, il y en aurait 800 sur la péninsule !On voit beaucoup de villages abandonnés, d’églises et des chapelles tout en pierre.Nous descendons dans le port naturel de Porto Kagio (Πόρτο Κάγιο). Le village est plutôt moche mais le golfe de Lakonia est tout simplement grandiose. Les eaux sont limpides.
Nous laissons les enfants se défouler sur la plage et marchons en amoureux vers le bout de la baie et trouvons la mignonne chapelle de Agios Nikolaos. Elle est ouverte. A l’intérieur, de jolies peintures, des ex-votos, des sculptures, des icônes peintes avec incrustations d’argent dans le bois.
Nous distinguons l’île de Cythère au large.Nous remontons la côte est de la péninsule. Les paysages battus par des vents violents (bien qu’aujourd’hui, le temps soit idéal) sont vraiment arides dans le sud de la péninsule. La route serpente et monte rapidement de 300 ou 400 mètres d’altitude avant de plonger de nouveau au niveau de la mer. La Tiny monte, parfois en première vitesse, mais monte fièrement…
Magnifique vue sur le sud de la péninsule avec sur la gauche, la mer Egée, et sur la droite, la mer Ionienne.C’en est terminé pour le tour de cette magnifique péninsule du Magne.
Un petit détour nous mène près de Gythio (Γύθειο) voir une épave de bateau, celle du Dimitrios. Ce bateau aurait été utilisé pour la contrebande de cigarettes. Craignant d’être surpris par les autorités, l’équipage l’aurait sabordé en y mettant le feu, avant qu’il n’échoue sur la plage en 1980.
Route de nuit durant environ deux heures pour rejoindre notre visite de demain matin. Nuit bercée par le bruit des vagues au pied du rocher de Monemvassia (Μονεμβάσια).
Mardi 22 janvier 2019 :
Nous sommes au pied du Kastro, la ville historique de Monemvassia, située sur une presqu’île, reliée par une digue au continent. Le rocher fortifié de 1,8 km de long et 300 m de large, est surnommé le petit Gibraltar du Péloponnèse. Ni du continent, ni de la digue, nous ne voyons la cité médiévale construite sur le côté du rocher.
Cité de l’Empire romain d’Orient, Monemvassia fut fondée au 6ème siècle par des habitants de Laconie qui fuyaient l’invasion de la Grèce par des peuples slaves venus d’Europe du Nord. Au 12ème siècle, elle est un actif centre commercial et maritime de l’Empire byzantin. Lors de l’invasion de l’Empire byzantin par les croisés, en 1204, Monemvassia est assiégée vainement par les Vénitiens. Elle reste grecque tandis que la majeure partie du Péloponnèse est prise par les latins. En 1245, le franc, Guillaume de Villehardouin (le même qui avait édifié la ville de Mystra que nous avons vue plus haut) entreprend le siège de la ville par terre et par mer. Mais il doit, tout comme Mystra l’abandonner en guise de rançon quelques années plus tard. Les Turcs la prennent en 1333 puis les Vénitiens en 1464, puis les Turcs la conquièrent de nouveau en 1540, avant de la perdre et de la reprendre de nouveau…. Ce n’est qu’au début de 19ème siècle que la population grecque s’y installe à nouveau.
Nous commençons la visite non pas par l’accès principal à la cité mais en longeant le long sentier contournant le rocher par la gauche. Le sentier est tout simplement merveilleux alors que les rayons du soleil commencent juste à se refléter dans la mer. Il n’est que 8 heures du matin et déjà nous sommes à l’assaut de ce petit Mont Saint Michel… Le mauvais temps est annoncé cet après-midi et nous voulons au maximum profiter.
Nous entrons dans la cité fortifiée par le bout de la presqu’île par une petite porte percée dans les remparts plongeant dans la mer.
Ce bourg médiéval logé dans la ville basse est remarquablement restauré et bien mis en valeur. La pierre rose des maisons, le blanc de la chaux recouvrant les églises donnent des tons très harmonieux à cette ville. On adore se perdre dans ses ruelles tortueuses et voûtées descendant vers la mer.
Agréable place avec son église Christos Elkoménos du 12ème siècle et son campanile de style vénitien. Face à elle, trône une mosquée.Nous empruntons un raidillon menant à la ville haute surmontée par l’église byzantine Agia Sofia.
La vue est magnifique 200 mètres au-dessus du niveau de la mer, tant sur l’horizon que sur la ville basse.
Nous marchons au sein de ruines dissimulées dans la végétation jusqu’au château. Superbe.
Cela fait trois heures et demie que nous marchons. Les premières gouttes de pluie arrivent en même temps que nous à la Tiny… Le vent se lève… Après-midi au chaud avec une jolie vue panoramique sur le bleu de la mer Egée.
Mercredi 23 janvier 2019 :
Un des moments chouettes du voyage est bien sûr le temps que nous prenons pour faire (encore plus !) des câlins aux enfants. Quel bonheur de prendre le temps sous la couette alors que la cuisson du pain pétri par Audrey hier soir et qui a levé toute la nuit embaume l’intérieur de la Tiny…
Matinée école et blog… Puis, comme tous les 4 à 5 jours, il nous faut faire nos recharges en eau. C’est assez facile en Grèce. Aujourd’hui, c’est sur le port de Monemvassia.Puis nous décidons de prendre la route côtière pour nous diriger vers le nord du Péloponnèse. Ce n’est pas la route la plus rapide mais certainement la plus belle car elle longe la mer Egée.
Il est rapidement l’heure de remplir nos estomacs affamés et nous choisissons le mignonnet port de pêche de Liméni Géraka (Λιμήν Ιέρακα). Il est bien caché dans un bras de mer. Endroit ravissant et très calme hors saison. Toujours pas de grec à l’horizon. On ne sait pas où ils sont en hiver… Nous observons le temps du repas les allers et retours d’un petit chalutier traînant des filets de pêche.
La route, enfin si on peut appeler ça une route… serpente à travers des milliers d’oliviers, certains sans doute centenaires. Leurs troncs sont ajourés, comme de la dentelle. Par endroit, la Tiny frôle de chaque côté les branches des oliviers.
Nous parcourons 50 kilomètres en évitant les trous…
Nous arrivons dans le village de Kyparissi (Κυπαρίσσι). Longtemps isolé avant qu’une route au nord rejoigne Léonídio (Λεωνίδιο), mais distant de 50 km également. Autant dire qu’il faut faire 100 km aller et retour pour que les habitants aillent travailler ou se ravitailler… Nous n’avons croisé d’ailleurs qu’une toute petite poignée de véhicules sur la route. 300 habitants vivraient ici mais on ne les a pas vus… A part un habitant nous disant qu’on n’aurait pas dû s’engager dans la rue où on est ! Effectivement, il n’a pas tort car les tuiles de la Tiny ne passent pas loin des murs…
Difficilement, nous arrivons sur le petit port de pêche.
Les rues sont bordées de maisons blanches ou bien en pierres. Les orangers et citronniers regorgent de fruits que l’on peut même ramasser depuis la Tiny tellement les rues sont étroites…
A l’attention des futurs voyageurs sur nos traces, une très récente route taillée dans la montagne, ne figurant pas sur les cartes (mais sur le GPS Osmand), relie Kyparissi à la plage de Fokiano (Φωκιανό) à côté de Pigadi (Πηγάδι). D’ailleurs, je n’ai pas pu la tracer sur la carte Google Maps au début de l’article. Prévoir par contre 100 km d’autonomie en carburant car il n’y a pas de station entre Monemvassia et Léonídio (Λεωνίδιο)… Ce qui n’est pas notre cas, on n’a pas prévu et la lumière orange de ma jauge à carburant est allumée depuis bien trop longtemps.La vue sur le mer Egée est époustouflante… On n’en revient pas de la couleur turquoise de l’eau. La route serpente entre mer et montagnes hautes d’environ 1000 mètres.
Les rares villages traversés sont toujours vides de grecs. On ne comprend pas. Nous voyons beaucoup de chats, quelques enclos avec des chèvres et de nombreuses ruches.
Nous arrivons à 600 mètres d’altitude à l’aplomb de Léonídio que nous allons rejoindre en 6 kilomètres, soit 10% de dénivelé. Il s’agit de bien gérer le freinage…Après cette après-midi à avoir observé des panoramas splendides, mais éprouvante en terme de conduite tellement la route tourne sans cesse, monte et descend durant 100 kilomètres, nous arrivons en fond de cuve de gasoil à Léonídio. Le petit port de pêche de Sampatiki (Σαμπατική) 6 kilomètres plus au nord, nous offrira un joli bivouac pour la nuit.Nuit bercée par la tempête faisant bouger la Tiny dans tous les sens. C’est le moment d’en profiter…