Je reprends ici la suite de notre voyage en terre inconnue, dans le Cirque de Mafate. Pour ceux ayant manqué la première partie de notre immersion dans l’endroit le plus inaccessible et le plus reculé de l’île de La Réunion où nous sommes arrivés, il y a quelques jours, je vous invite à lire le précédent épisode en cliquant ici.

Vendredi 19 novembre 2021 :

Nous nous réveillons sur notre chouette bivouac sous les filaos et en bord d’une petite source. Un peu frais mais le petit feu nous réchauffe.

Ce matin est prévue l’intervention pour présenter notre voyage dans la classe de Sabine dans l’îlet de Roche Plate. Encore une classe unique de seulement 9 élèves. Les enfants les plus éloignés de l’école ont quand-même 45 minutes de marche, ici aussi avec un accompagnateur. Comme dans les autres écoles, les effectifs sont à la baisse mais Sabine ne craint pas de fermeture d’école. Par chance, les institutions publiques maintiennent ouvertes les classes dans Mafate malgré le faible nombre d’élèves. La classe de l’îlet à Malheur n’a que 4 élèves et celle de l’îlet Aurère n’en a que 2 ! Une nouvelle fois, nous présentons notre voyage aux petits Mafatais.

Pendant la récréation, nous échangeons longuement sur la vie dans le cirque avec trois mamans d’élèves présentes ce matin dans la classe, qui sont ATSEM ou accompagnatrice pour les trajets. Puis Sabine nous invite à venir boire un café chez elle, près de la nouvelle école. Elle et son mari Axel se sont connus dans le cirque et vivent ensemble ici dans un petit coin de paradis entouré d’une végétation luxuriante. Sabine et son mari ont 10 enfants dont un est actuellement dans la classe de Sabine. Elle a eu jusqu’à 5 de ses enfants comme élèves dans sa classe pendant une année ! 2 sont partis à l’étranger, les autres sont dans Les Bas. Axel est très fier de nous montrer le fruit de sa production de café. Comme beaucoup d’habitants, ils tiennent un gîte dans l’îlet. Voici une bonne adresse chaleureuse pour ceux qui suivront nos traces !

Puis, nous marchons un peu dans le hameau de Roche Plate séparé en deux par la Ravine Anny. Nous découvrons plus de jardins potagers que dans les autres îlets traversés jusqu’à présent, bien que l’eau soit un problème ici. Autour des cases, on trouve des nèfles, des prunes, des pêches, des mandarines, des grenadelles, des pok-pok, du raisin, des bananes, des pamplemousses, des fraises et framboises sauvages, des avocats, des oranges, des citrons, des pommes, des ananas, des goyaves, des mûres, des pépinos. On trouve aussi des légumes (parfois sous serres) : des petits pois, des haricots, des patates, des lentilles, des carottes, des radis, des brèdes, des choux, des tomates, des citrouilles, des oignons, de l’ail, des courgettes, des artichauts, des piments, du chouchou, des salades, du maïs et aussi du café. Des poules, des cabris, des lapins, des canards, des pintades, des dindons, des oies, des cochons sont élevés. Il y aussi des bassins où sont élevés des poissons. Mais au problème de l’irrigation difficile à effectuer s’ajoute le phénomène de la nouvelle génération qui a tendance à ne plus cultiver et à se tourner vers le gîte plus lucratif, s’approvisionnant par hélicoptère.

Avec Audrey, nous laissons les enfants au campement jouer avec le petit Gabriel, fils de Sabine et Axel, et décidons d’aller marcher un peu pour une courte balade sur le Piton Bronchard culminant 100 mètres au-dessus de l’îlet de Roche Plate. Du haut de ses 1264 mètres d’altitude, nous avons une vue d’ensemble sur le cirque encerclé entre la Crête de la Marianne et la Crête des Calumets, protégé par ses remparts à la verticale et dominé par 5 sommets de plus de 2000 mètres. Nous distinguons certains îlets dans lesquels nous n’irons pas (Aurère, îlet à Malheur, Cayenne, Grand Place, îlet à Bourse). Nous voyons aussi bien sur le Nord du cirque la Canalisation des Orangers par laquelle nous sommes arrivés, qu’à l’autre extrémité le Col du Taïbit (oui, en prononçant toutes les lettres même la dernière…) par lequel nous sortirons dans quelques jours pour basculer de l’autre côté du rempart dans le Cirque de Cilaos. Nous surplombons et voyons toute l’enfilade de la Rivière des Galets. Pour la première fois, on voit le temps changer en milieu de journée comme souvent sur les sommets de l’île de La Réunion. Le Maïdo et les autres sommets se chargent en gros nuages blancs qui se dissiperont dans la nuit.

De son côté, comme tous les vendredis, Sabine part dans Les Bas en marchant 2h10 pour gravir le plus difficile accès au Cirque de Mafate, le mur du Maïdo de 1000 mètres de dénivelé. Elle part y voir ses filles qui y font leurs études et reviendra avec quelques courses alimentaires. Au passage, elle passe nous offrir de la confiture de mûres qu’elle a faite elle-même, du pain, des petites salades composées et des fruits. On comprend, au vu de sa forme physique, qu’elle arrive à accomplir le fameux et mythique Grand Raid (surnommé la Diagonale des Fous) qui est l’un des trails les plus exigeants au monde. Il consiste en une traversée de l’île de 160km et 9400 mètres de dénivelé positif à boucler en moins de 66 heures !

Après un petit réapprovisionnement à l’épicerie, nous faisons un petit feu de camp bien agréable avant de nous coucher dès la nuit tombée.

Bilan de la journée : 5,9 km, 251 mètres de D+, 251 mètres de D-

Samedi 20 novembre 2021 :

Réveil à 6 heures. Un peu dur pour des vacances. Enfin pas beaucoup plus dur que le sol sur lequel on a dormi. On a découvert des nouveaux os au niveau de notre bassin. D’autant plus qu’Audrey m’a encore poussé (bon d’accord la tente penchait) et seule la fine épaisseur de mon duvet et la bâche plastique de la tente m’isolaient du sol.

Après un petit visionnage sur YouTube d’un tuto « comment replier sa tente Quechua deux secondes en moins d’une demi-heure », nous sommes prêts à 7h30 bien chargés de nos lourds sacs à dos. Mais avec l’habitude, nous n’avons plus les douleurs dans le dos des premiers jours.

Nous partons randonner en direction du site naturel de Trois roches. Le début du sentier est difficile et il nous fait prendre 200 mètres de dénivelé en 1 km. Et encore 250 mètres en 3 km. Nous sommes au pied du rempart du Maïdo et nous avons une vue panoramique sur le Cirque de Mafate. C’est juste époustouflant. Nous voyons de loin quelques îlets où nous étions il y a quelques jours et d’autres apparaissent comme celui de Marla où nous passerons notre dernière nuit.

Nous commençons à marcher de bonne heure car il fait vraiment très chaud. Enfin juste 22°C mais on a l’impression quand on monte les sentiers escarpés qu’il en fait 15 de plus. Le poids de nos bagages rend difficile notre progression. Autant nous sommes habitués à randonner à la journée, autant nous ne partons en général qu’avec un ou deux sacs qui contiennent une trousse à pharmacie, nos papiers, de l’eau, des sandwichs et des vêtements de pluie. Là il faut ajouter un peu plus d’eau que d’ordinaire (5,5 litres), deux tentes, quatre duvets, un peu plus de nourriture, un réchaud, nos affaires de toilette, des tenues de rechange, des vêtements de pluie… bref de quoi tenir 8 jours !

Après cette montée un peu sèche, le sentier continue en pente douce jusqu’à l’aplomb d’une ravine. On descend alors de 40 mètres de dénivelé pour la traverser, puis le sentier remonte d’environ 60 mètres de dénivelé avant de replonger dans le lit de la Ravine Chevaquine. Des escaliers en montée et en descente permettent de franchir quelques autres ravines, pour la plupart à sec. Peu de zones ombragées. On distingue bien la Rivière des Galets qui coule dans un plus ou moins large canyon en aval de la Cascade de Trois Roches. On peut distinguer l’eau qui se précipite entre les falaises qui se touchent presque. Un promontoire rocheux un peu dangereux permet de s’en approcher.

Nous arrivons au lieu-dit Trois Roches. Il s’agit d’un site géologique exceptionnel dans le lit de la Rivière des Galets. Une immense dalle rocheuse qui se termine en un gigantesque gouffre dans lequel l’eau de la cascade se déverse. À l’endroit où nous la franchissons à gué, nous trouvons un magnifique bivouac. Il n’est que 11 heures et nous avons donc l’après-midi de libre pour nous reposer. Au menu riz ce midi et ce sera aussi riz ce soir… Après-midi tranquille, avec construction d’un barrage, petit rinçage à l’eau claire de nos tee shirts qui ne ressemblent plus à des tee shirts mais effectivement ce sont les deux premiers jours où c’est difficile de remettre le même tee shirt le matin que la veille (après on s’habitue), point sur nos réserves alimentaires (ça devrait être juste mais ça devrait tenir jusqu’au prochain ravitaillement possible demain midi), baignade dans l’eau pas trop froide de la Rivière des Galets, sieste, dessin, lecture, prise de notes sur mon téléphone pour écrire à posteriori ce blog car je n’ai pas l’ordinateur avec moi…

Nuit à 1200 mètres d’altitude qui s’annonce un peu fraîche, juste 10 degrés.

Bilan de la journée : 4,5 km, 439 mètres de D+, 319 mètres de D-

Dimanche 21 novembre 2021 :

Comme hier, réveil à 6 heures. On ouvre la tente ; les couleurs des montagnes éclairées par le soleil au petit matin sont magiques. Comme hier petit déj’ un peu frugal avec 6 BN chacun. Comme hier, départ de rando à 7h30 une fois le bivouac plié et chargé sur nos dos. Comme hier, le premier kilomètre nous fait grimper de 250 mètres d’altitude. Il faut ça pour sortir du lit de la Rivière des Galets.

Après cette montée bien raide, nous traversons la Plaine aux sables, un îlet pratiquement désert depuis la destruction des cases en 1948 par un cyclone. Aujourd’hui, seules quelques vaches y paissent. De là, on a de très belles vues sur le Gros Morne et le Morne de Fourche. La cheville d’Audrey tient bon, bien tenue par une chevillère. Ma chérie ne ressent plus de douleur, mais après trois entorses depuis le début de notre périple, elle craint un peu plus de se refaire mal et cherche plus ses appuis.

Puis après cette reposante traversée de plaine, nous attaquons la dernière forte pente vers La Nouvelle. Elle n’est pas très longue mais paraît interminable et c’est avec plaisir qu’on arrive au col d’où l’on aperçoit les premières cases annonçant la fin de la rando. Comme toujours dans Mafate, les paysages sont grandioses quelle que soit la direction du regard. Heureusement, le sentier est à l’ombre et il va le rester quasiment tout au long de la rando.

Une rando assez courte aujourd’hui et dès 10h nous arrivons déjà à notre étape du soir dans l’îlet de La Nouvelle. Un village d’une trentaine de familles, le plus habité du cirque, qui est bien agréable avec sa grande place centrale engazonnée avec sa petite chapelle, son école. Nous y plantons notre bivouac pour les deux prochaines nuits. C’est ici que nous interviendrons lundi après-midi dans l’école. Cet îlet a été peuplé en 1875, suite à un éboulement qui a détruit le village de Grand-Sable dans le cirque voisin de Salazie. Les habitants de Grand-Sable décidèrent d’aller là où la terre était plus stable et ont franchi le Col des Bœufs pour s’installer dans un nouveau village qui porte désormais le nom de La Nouvelle.

A prix d’or, nous achetons dans une des épiceries locales deux paquets de BN, un paquet de pâtes, deux boîtes de saucisses lentilles, 8 portions de Vache qui rit pour 20€… Mais heureusement, la bière pression locale « la Dodo lé la » ne coûte que 2,50€.

Après-midi repos et petite marche pour découvrir le joli îlet de La Nouvelle situé sur un plateau de 1470 mètres d’altitude environ. On trouve plus de jolies cases traditionnelles que dans les autres îlets du Cirque de Mafate. Elles sont jolies, en bois peint de tons pastels avec leur toiture recouverte de bardeaux taillés à la main dans du tamarin, leurs varangues protégeant des rayons du Soleil les ouvertures et leur lambrequin en bois ou en tôle. Cette petite dentelle a un rôle de gouttière. Leurs pointes guident les gouttes de pluie vers le sol et cela évite de salir les murs.

Cet îlet entouré par de hauts sommets (la Crête des Calumets, le Piton Maïdo, le Morne de Fourche, le Gros Morne) ne semble pas avoir de problème d’approvisionnement en eau et on voit beaucoup de parcelles cultivées et de jolis potagers autour des cases.

C’est le seul îlet où on voit quelques engins motorisés.

Comme ailleurs dans le cirque, on voit les hélicoptères livrer le matériel.

Mais encore une fois pas beaucoup de vie de village. Certains Mafatais nous ont confié que le tourisme qui se développe de plus en plus et que les randonneurs parfois sans gêne qui entrent sur les propriétés privées les poussent un peu à se retrancher derrière des clôtures grillagées ou végétalisées pour les protéger de la vue des passants. Du coup on croise peu de Mafatais. Il faut dire qu’ils n’ont pas à sortir de chez eux pour aller faire des courses, ni pour aller chercher les enfants à l’école car soit ces derniers reviennent seuls ou bien quand ils sont trop petits, ils reviennent avec des accompagnateurs. Et la majorité d’entre eux sont bien occupés dans leurs gites.

Bilan de la journée : 3,7 km, 399 mètres de D+, 208 mètres de D-

Lundi 22 novembre 2021 :

Non pas que nous sommes en manque mais alors que nous avions prévu aujourd’hui une journée de pause sans randonnée, nous décidons de nous rendre à seulement 3 kilomètres dans la Plaine des Tamarins qu’on nous a conseillée. De magnifiques rosiers très odorants parsèment les abords du sentier. Sans le poids de nos bagages, on se sent tout léger.

La Plaine des Tamarins qu’on traverse sur un sentier plat constitué de rondins de bois est effectivement très belle et on adore la végétation. Ces troncs de tamarins, pour certains couchés par la violence de quelques cyclones, sont superbes. Ils continuent cependant à vivre, semblant ne pas souffrir de cette position couchée qui nous permet de nous asseoir pour un repos bien mérité et de reprendre des forces avec quelques raisins secs et des noix de Macadamia achetées en bord de route il y a quelques jours en Afrique du Sud.

Au lieu de faire demi-tour par le même chemin, nous en rajoutons encore un peu et décidons de faire 6 kilomètres avec 200 mètres de dénivelé positif en plus. La rando nous fait descendre par un chemin vertigineux à la Passerelle Ethève qui enjambe la Rivière des Galets.

Nous arrivons juste à midi à La Nouvelle où nous faisons connaissance avec Claudine, l’institutrice de l’îlet. Elle vient juste d’arriver avec sa fille Zola, 5 ans, depuis Les Bas comme tous les lundis matins. Mais malheureusement, elle s’est fait très mal au pied juste en arrivant. L’inconvénient majeur de vivre à Mafate est bien sûr que c’est un désert médical. L’infirmière ne doit passer que dans deux jours pour sa permanence hebdomadaire.

Après une copieuse assiette de pâtes au thon préparée par Claudine, nous nous dirigeons vers son école qui porte le nom d’école André Bègue du nom de l’homme du village, l’icône locale, à qui l’on doit le désenclavement de Mafate. Il est le fondateur de Mafate Hélicoptères en 2002, un service de transport d’un Mafatais pour les Mafatais. Il a rendu l’hélicoptère accessible. Avant, seulement quelques habitants pouvaient se le permettre. Il y avait beaucoup moins de disponibilités, il fallait appeler jusqu’à deux mois à l’avance pour avoir une course. Mais André Bègue a depuis perdu la vie dans un crash d’hélicoptère au Col des Bœufs.

Nous intervenons dans la classe devant 13 enfants de 3 à 11 ans. Encore du bonheur de partager avec ces petits Mafatais. Certains rêvent de voyager. D’autres, comme dans les autres classes vues jusqu’à présent, ont déjà eu la chance de sortir de l’île et de voyager à l’île Maurice voisine ou à Rodrigues également voisine, ces deux dernières faisant partie avec La Réunion de l’Archipel des Mascareignes. Mais peu sont déjà allés en métropole. A part ceux de la classe de Sabine à Roche Plate qui a réussi à organiser un séjour au ski dans les Alpes françaises ! C’était la première fois que ses élèves prenaient l’avion et même un ascenseur ou un escalator dans les aéroports…

Quel luxe, après 4 nuits consécutives sous la tente, d’avoir le confort d’un bon matelas que Claudine nous met gentiment à disposition dans son logement de fonction. On apprécie d’autant plus que ce soir, on dort plus en altitude et que nous sommes en plein dans les nuages et que l’air est saturé d’humidité. On a déjà eu froid la nuit dernière alors là on aurait eu encore plus froid. Et puis le confort d’une bonne douche n’est pas désagréable non plus.

Claudine s’amuse de nous voir nous émerveiller devant un saucisson et des Tucs, devant du gruyère et du parmesan accompagnant les pâtes ainsi que d’un bon morceau de fromage ! On ne s’est pas encore réhabitués à ces gourmandises depuis notre retour en France. Et puis surtout on ne s’attendait pas à ça dans le fond du Cirque de Mafate. Et nous, on s’amuse de remplir un lave-vaisselle ! Petit luxe dont on n’avait pas profité depuis 11 mois !

Bilan de la journée : 8,7 km, 647 mètres de D+, 647 mètres de D-

Mardi 23 novembre 2021 :

Le pied de Claudine ne va pas mieux. Cela va être difficile pour elle d’attendre le passage de l’infirmière demain dans l’îlet de La Nouvelle. On apprendra plus tard dans la journée que l’hélicoptère du PGHM l’a redescendue à l’hôpital de Saint Denis et qu’elle est plâtrée pour deux mois.

Nous partons pour notre avant dernière journée de rando. Celle qui va nous mener de La Nouvelle vers l’îlet de Marla. Dès 8 heures, après avoir dégusté une bonne baguette française du boulanger, tartinée de beurre salé comme cela ne nous est pas arrivé depuis aussi 11 mois (ah non, c’est vrai, on s’était fait offrir de délicieuses baguettes à Swakopmund en Namibie, et aussi à Johannesburg en Afrique du Sud), nous partons randonner. Encore une bonne montée dès le départ qui nous met bien en jambes. Plus les jours de la semaine passent et plus les kilomètres de distance et les centaines de mètres de dénivelé s’accumulent, moins on est fatigués, curieusement. On est bien entraînés. Le rythme cardio est parfait et on s’essouffle beaucoup moins. Nous n’avons plus de courbatures de la veille. Presque plus mal aux épaules. De vrais sportifs ! Le sentier en courbe de niveau, à flanc de falaise végétalisée n’est pas très technique et relativement plat, mais le précipice n’est jamais très loin. Nous traversons de nombreuses ravines dont la Ravine Kelval.

Nous arrivons en milieu de matinée à Marla, un petit îlet de 7 familles (environ 50 personnes) au pied du Col du Taïbit. Nous commandons un délicieux sandwich américain et une bonne bière Dodo que nous consommons chez Marie Paul, l’institutrice du hameau.

En début d’après-midi, c’est donc notre cinquième et dernière intervention dans une école de la semaine. Les 10 marmailles de Marie-Paule sont à fond dans notre cavale et posent beaucoup de questions et s’intéressent bien aux planisphères et globes terrestres.

Nous nous apprêtons à quitter demain pour de bon Mafate, ravis de l’expérience unique que nous avons eue de découvrir ce lieu incroyable de la manière dont nous l’avons fait, c’est-à-dire en prenant notre temps, en rencontrant certains de ses habitants, et notamment plein de petits élèves Mafatais curieux et intéressés. Dans les écoles, nous avons été accueillis par des institutrices passionnées par leur métier, mais devant faire face à de nombreuses difficultés. Agnès, Sabine, Claudine et Marie-Paule ont plein de projets, invitent des intervenants extérieurs pour ouvrir au maximum leurs marmailles au monde extérieur. Merci à elles de nous avoir accueillis.

Nous terminons l’après-midi de manière très agréable au petit snack très animé autour de quelques samoussas et de quelques verres de ti-punch bien corsés avec Marie-Paule avant de retrouver nos enfants restés chez elle. Quelle rigolade ce soir ! Nous terminons en beauté ce séjour mafatais.

Encore une fois, c’est au chaud que nous dormons ce soir. Finalement, sur les 8 nuits passées dans Mafate, nous en auront passé 4 bien à l’abri. Tant mieux car nous sommes ce soir à 1618 mètres d’altitude et la nuit aurait été fraiche sous la tente. Il y fait bien plus froid que dans les îlets à l’autre extrémité du cirque qui se situent à environ 650 mètres d’altitude.

Bilan de la journée : 4,5 km, 404 mètres de D+, 213 mètres de D-

Mercredi 24 novembre 2021 :

Dernière rando aujourd’hui. Nous sommes un peu plus légers car nous laissons une des tentes, un duvet et un matelas appartenant à Agnès chez sa collègue Marie-Paule. Tant mieux car nous avons dès le début, juste après avoir traversé quelques pâturages, plus de 440 mètres de dénivelé positif pour sortir du cirque et gravir le Col du Taïbit. C’est raide mais quelle vue magnifique sur toute l’enfilade du cirque ! Maintenant on se repère bien dans les différents îlets qu’on a pu traverser. Un dernier effort et nous voici en haut du Col du Taïbit à 2060 mètres d’altitude d’où nous avons une vue époustouflante aussi bien sur le Cirque de Mafate que sur le Cirque de Cilaos dans lequel nous basculons. Nous avons aussi une vue bien dégagée sur les Trois Salazes, sur le Gros Morne culminant à 3013 mètres et sur le mythique sommet le plus haut de La Réunion et même de l’Océan Indien, le Piton des Neiges culminant à 3070 mètres que nous avons prévu de gravir dans une quinzaine de jours. C’est lui qui a donné naissance à l’île. Mais ce volcan n’est pas éteint. Sa dernière éruption remonte à 12 000 ans. Nous avons même la vue sur la Canalisation des Orangers par laquelle nous sommes entrés dans le cirque, bien qu’elle se situe à plus de 10 km à vol d’oiseau.

Puis c’est une descente de plus de 800 mètres de dénivelé à travers la forêt sous les Trois Salazes par un sentier bien aménagé et bien entretenu par l’ONF qui nous mène sur la route d’îlet à Cordes dans le Cirque de Cilaos. 9 jours après avoir quitté le bitume sans entendre le bruit d’un moteur, si ce n’est celui de dizaines et de dizaines d’hélicoptères, nous voici revenus à la ville. Nous sommes aussi très fiers de l’aventure sportive que nous venons d’accomplir. Un total de 58,4 kilomètres et de 4389 mètres de dénivelé positif et de 3513 mètres de dénivelé négatif !

Bilan de la journée : 5,7 km, 477 mètres de D+, 833 mètres de D-

C’est parti pour deux heures de car. Mais quel car ! Un car unique ou plutôt un chauffeur unique qui emprunte l’époustouflante et impressionnante Route aux 400 virages descendant de Cilaos vers Saint Louis sur le littoral. Un chauffeur obligé de manœuvrer dans certains virages en épingles, un chauffeur frôlant les parois de trois tunnels aussi larges que le car…

Notre ami François est là pour nous accueillir à l’arrêt de bus. Nous voici de retour à Saint Pierre, tellement heureux de notre voyage en terre inconnue que nous venons de vivre pleinement. Merveilleuse soirée bien arrosée chez nos amis Alex et François que nous partageons aussi avec les vendéens Pauline et Thierry et deux autres couples installés sur l’île, Amandine et Thomas ainsi que Flo et Jé que nous prenons aussi plaisir à revoir. Les enfants qui passent des heures dans la piscine semblent prendre autant de plaisir que les adultes dont les verres s’entrechoquent dans une ambiance particulièrement conviviale autour de samoussas et de bols renversés bien typiques du coin. Merci les Amis !

Dès demain matin, nous repartons déjà vers de nouvelles aventures de l’autre côté de l’île ! Quel rythme pour des vacances !!